9 juin 2017 5 09 /06 /juin /2017 05:48

Ça n'apparaît pas sur la page consacrée au sujet sur l'un de nos quotidiens locaux, mais il y a pourtant bien eu, à La Seyne aussi, ce jeudi, et comme chaque année, une cérémonie à la mémoire des Morts pour la France en Indochine.

J'y ai d'ailleurs prononcé une allocution...

 

« Comme tous les 8 juin, jour de l’inhumation, en 1980, du soldat inconnu d’Indochine à la nécropole nationale de Notre-Dame-de-Lorette, dans le Pas-de-Calais, nous rendons hommage aux Morts pour la France en Indochine, victimes d’une guerre terminée tragiquement il y a 63 ans.

« On n’arrête pas l’Histoire.

« Sous l’impulsion de la libre détermination des peuples, la décolonisation était en marche. De Gaulle rappelait, quelques années plus tard, en 1965, la nécessité de "savoir, quand le moment est venu, reconnaître à tous le droit de disposer d'eux-mêmes".

« Rappelez-vous : A la fin de la Seconde Guerre mondiale, la paix retrouvée en Europe donna à d’autres peuples le goût de l’émancipation. Hô Chi Minh, fondateur de la ligue du Viêt Minh, proclama l'indépendance de la colonie française et la création de la République démocratique du Viêt Nam.

« La France, récemment libérée du joug nazi, tenta de rétablir son autorité en dépit des recommandations du Général Leclerc à reconnaître au Viêt Nam son indépendance dans le cadre de l'Union française.

« Les négociations s’enlisèrent pour des raisons de politique intérieure. Des incidents de plus en plus sérieux opposèrent les forces vietnamiennes aux forces militaires françaises. La guerre durera de 1946 à 1954. Il reviendra à Pierre Mendès-France d’ouvrir un programme de négociations. La conférence de Genève consacrée au règlement de la question indochinoise s’ouvrira le lendemain de la chute terrible de Diên Biên Phu.

« On dénombrera, parmi les 900.000 morts, blessés et prisonniers du conflit, 75.000 victimes tombées pour la France… mais si loin d’elle… à tous points de vue.

« Honneur aux Morts. Et que vivent la Paix et l'amitié entre les peuples du Monde. »

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
9 mai 2017 2 09 /05 /mai /2017 02:45

C'était une belle foule que celle assemblée ce lundi, jour de commémoration de l'armistice de 1945, pour le traditionnel défilé et le moment d'hommage devant notre monument aux morts. La matinée a été rehaussée par la présence des jeunes en formation dans le cadre de la préparation militaire marine dont la commune de La Seyne est la marraine, un détachement du groupe de transit dont la ville est jumelle, et, pour la première fois, deux lycéennes représentant le Mouvement de la Paix.

Un vrai beau moment de mémoire, d'autant plus fort qu'il se déroulait au lendemain du choix des Français — et des Seynois — de barrer la route à l'extrême-droite. Les leçons de l'Histoire ne font pas tout pour prévenir le pire, tant il est à craindre que les politiques ultralibérales qu'incarne le nouveau Président de la République n'enrichissent encore un peu plus le terreau sur lequel fructifient les nationalismes, mais elles permettent tout de même de concourir un peu à l'éveil des consciences. C'est ce que j'ai essayé de faire avec mon allocution...

 

« Comme chaque année, nous nous retrouvons ce 8 mai pour célébrer la victoire des démocraties sur l’Allemagne nazie.

Pour les nazis, la germanité est une nouvelle ère. A leurs yeux, l’idée même d’égalité est une aberration. Ils voient par exemple la Révolution française comme un cloaque racial gallo-romain qui s’est soulevé en 1789 contre le sang bleu des nobles germaniques. L’humanisme de la révolution est pour eux une idée néfaste, tout comme l’universalisme ou la justice sociale…

« Et, jusqu'au bout, les nazis, tout à leur folie, s’acharnèrent à maintenir les convois de la mort, même au détriment de leur armée. Le 8 mai 1945, l’Europe est exsangue.

« C’est bien pourquoi, après la Libération, les démocraties occidentales, averties des dangers, ont voulu mettre en œuvre un projet de société solidaire et dynamique.

« A cet égard, elles ont opéré les transformations économiques, sociales et politiques qui devaient permettre à l’ensemble des individus leur insertion dans la vie publique. Avec une certaine efficience pendant près de quarante ans. Ainsi, au lendemain de la victoire, à la soif de liberté, s’impose, petit à petit et à nouveau, la notion d’égalité - au sein de l’entreprise, de l’école, de la famille.

« Soixante douze années ont passé…

« Avec le temps et l'oubli du danger, avec l’essor du consumérisme, l’exigence du pluralisme, si nécessaire au redémarrage des pays, dérive progressivement vers de nouvelles aspirations, une nouvelle gouvernance néo-libérale et l’individualisme triomphant.

« Aujourd’hui, où la tendance des identitaires est à la fermeture des frontières, au retour à un nationalisme d’exclusion, la demande touche le droit, l’organisation de la société, les mœurs.

« Retenons qu’au sortir de la guerre, la France s’est réconciliée avec l’Allemagne. Ensemble les deux pays se sont alliés avec quatre autres, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, pour poser les fondations de l'Europe unie… D'autres n'ont cessé de les rejoindre. Des espérances immenses, notamment de paix et de prospérité, sont nées avec cette idée.

« Or elle sera rendue bientôt à 27 membres avec le Brexit ; l'Europe est réduite à la quasi seule notion de zone de dérégulation, de libre-échange ; la déception est grande. On est loin des espoirs de De Gaulle et Adenauer.

« Mais la désillusion ne doit pas nous décourager de persévérer, afin de construire une Europe des peuples qui défende les valeurs de liberté, de partage, d’égalité devant la loi, la capacité à subvenir aux besoins essentiels, d’éducation, d’alimentation, de logement, de sécurité, d’accès aux soins. Si elle est sociale, l’Europe peut être une bonne échelle pour répondre aux défis mondiaux.

« Mais pour l'heure, en ce lendemain d’élection du Président de la République, disons que les attentes sont fortes pour que le mieux vivre touche toutes les catégories sociales, et appliquons, ici en France, avec détermination, notre devise Liberté, Egalité, Fraternité. Il y a du pain sur la planche.

« Pour nous détendre un peu, dans cette période d'incertitudes, je voudrais revenir aux origines de ces valeurs que les nazis ont atrocement foulées du pied.

« Une idée joua un rôle fondamental à la naissance du monde occidental. Cette idée, nous la devons à la Rome antique. Elle réside dans le fait qu’être citoyen de deux endroits à la fois, autrement dit, avoir des attaches dans un pays et pourtant être pleinement citoyen et patriote dans celui où, et par lequel, on vit, a pu être une norme, comme le voulurent les Romains dans leur monde global.

« Et, en effet, comment un village, Rome, fondé en 780 avant notre ère, a-t-il pu devenir l’Empire romain, et le rester six siècles pour l’Occident, quatorze pour l’Orient ?

« Dans un récent essai, un chercheur a écrit que Romulus, le mythique fondateur de Rome, entendait réserver à tous – étrangers ou pas – le concept d’asile afin de créer de nouveaux citoyens.

« Cette mesure était révolutionnaire à l’époque au regard des pratiques usuelles. Aucune cité grecque de l’Antiquité ne fit jamais preuve, ne serait-ce que de loin, d’une aussi grande ouverture d’esprit que celle qui caractérise la culture politique romaine et la singularise.

« A Athènes, par exemple, l’accès à la citoyenneté était limité par des règles strictes. Au contraire, au cours d’un processus tout à fait unique, les habitants des "provinces" se virent progressivement accorder la citoyenneté romaine pleine et entière.

« Ainsi le Sénat de Rome devint-il un lieu dans lequel nous sommes fondés à voir une institution résolument multiculturelle. Ce trait distinctif de la culture romaine a fait observer au roi de Macédoine, au IIIe siècle avant notre ère, que "c’est ainsi que les Romains ont étendu leur territoire". Beaucoup d’historiens romains voyaient dans la politique d’assimilation de Romulus un facteur important de son succès.

« D’ailleurs, sur une partie de ce qui est aujourd'hui la France et ses environs, les Gaulois ont bénéficié de cette ouverture quand, en l’an 48, l’empereur Claude défendit devant un sénat récalcitrant l’idée qu’il fallait permettre aux citoyens issus de la Gaule, païenne et chevelue, de devenir sénateurs.

« L’affaire ne s’arrêta pas là… En 212, l’empereur Caracalla décréta que tous les habitants libres de l’empire, où qu’ils fussent, de l’Ecosse à la Syrie, étaient des citoyens romains.

« Cela ne s’est pas produit sans controverse ni conflit. Certains Romains ne dissimulaient pas la méfiance que leurs inspiraient les étrangers, qu’ils fussent citoyens ou non. "Je ne peux supporter une ville pleine de Grecs", peut-on lire sous la plume de Juvénal. Une guerre civile a même éclaté, connue sous le nom de "guerre sociale", l’une des plus sanglantes de l’histoire romaine. Mais le modèle sous-jacent apparaissait clairement : Caracalla achevait le processus que les premiers romains, incarnés par le mythique Romulus, avaient initié des siècles auparavant.

« Ainsi, le monde moderne s’est vu offrir le concept de démocratie par l’Athènes du Ve siècle avant notre ère. Et, de son côté, la Rome républicaine a apporté l'idée tout aussi importante de liberté.

« Cette idée fondatrice s’est propagée, bien plus tard, en Europe comme en Amérique. Ce n’est pas un hasard si le mot d’ordre de la Révolution française – Liberté, Egalité, Fraternité – met la liberté à la place d’honneur. Ni si George Washington parlait de restaurer "le feu sacré de la liberté".

« Vous comprenez tous où je souhaite en venir. En ce jour de célébration de la victoire sur l’oppresseur nazi, maintenons, ensemble, ce qui nous a construits, ce qu'abhorraient les hitlériens et les ont conduits à la barbarie et ses millions de morts, et que tout le monde, hélas, n'apprécie pas au plus haut point en bien des endroits de l'Europe du XXIe siècle : l’héritage humaniste de la Révolution française, non pas la Terreur, bien sûr, mais la citoyenneté pour tous, la liberté, l’égalité, la fraternité.

« Demeurons vigilants. Promouvons sans cesse une démocratie exigeante. Ce doit être le souci et la décision de tous, pour la justice et la défense inconditionnelle des droits humains.

« Vive la Paix. Vive la France républicaine dans une Europe des peuples solidaires. »

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
30 avril 2017 7 30 /04 /avril /2017 17:25

C'était, ce dimanche, le jour officiel dédié à la mémoire des victimes des camps de concentration et d'extermination nazis.

Comme chaque année, en ce dernier dimanche d'avril, nous l'avons commémoré à La Seyne. Et, comme chaque année, j'ai prononcé une allocution.

Un propos qui n'a pas fait sourciller ceux, présents, et pour certains arborant des écharpes d'élus régionaux, qui, à une semaine du deuxième tour de l'élection présidentielle, promeuvent les mêmes idées que celles qui, il y a huit décennies, ont fait basculer le Monde dans l'horreur.

J'ai mal. Mais, bon, voici mon allocution...

 

« Mesdames, Messieurs,

« "… Nous avions perdu tous nos droits, et d’abord celui de parler ; on nous insultait en face chaque jour, et il fallait nous taire ; on nous déportait en masse, comme travailleurs, comme Juifs, comme prisonniers politiques… Puisque le venin nazi se glissait jusque dans nos pensées, chaque pensée était juste une conquête… à cause de cela nous étions libres…"

« Ces mots sont extraits d’un texte paru à Paris, le 1er décembre 1944, d’une publication jusqu’alors clandestine « L’éternelle revue », créée sous l’occupation par Paul Eluard. J’y reviendrai.

« La mise en œuvre de l’extermination systématique d'un groupe humain, qu'il soit de même langue, ou de même nationalité, ou de même culture, de mêmes mœurs ou coutumes, de même particularité physique, au nom de la prévalence de la soi-disant race, ou religion, ou terre d'origine, quelle que soit l’époque, est une abomination.

« Dès sa prise de fonction, Hitler crée, avec le soutien des nazis, les premiers camps. Seront internés les opposants au régime, les « asociaux », tous ceux qui n’entrent pas dans la norme national-socialiste.

« Il faut dire et redire que ces monstres sont arrivés au pouvoir en janvier 1933 par une sorte de "coup d’Etat légal".

« Je vais expliquer ce que je veux dire par ces termes...

« Hitler est élu régulièrement ; il est à la tête d’un parti devenu premier en Allemagne mais qui reste minoritaire au Parlement. Cependant, le maréchal von Hindenburg, président en exercice et chef de file des aristocrates et des industriels allemands le nomme chancelier – Ces insensés pensaient pouvoir contrôler ce dirigeant du parti nazi !

« Hitler, conscient de la situation, manœuvre alors sans vergogne. Il dissout le Parlement, provoque de nouvelles élections… le Reichstag brûle… un jeune communiste hollandais est accusé… suivent cinq semaines fatidiques car sans contrôle parlementaire.

« Cela permet à Hitler d’instaurer un régime de terreur, de provocations et d’intimidations… l’élection est faite aux élections suivantes… Hitler est majoritaire ! Sous l’accusation de trahison, il fait interner les opposants élus… Et voilà, avec les apparences de la démocratie, comment Hitler obtînt les pleins pouvoirs !

« Avec la guerre, le système concentrationnaire prend une autre dimension et à partir de 1941, il s’intègre dans la mise en place de la "solution finale de la question juive", "l'Endlösung". Les camps d'extermination se multiplient, essentiellement de l'Allemagne à la Pologne. Ils feront plus de 6 millions de victimes, opposants politiques marqués du triangle rouge, Juifs à l'étoile jaune, tsiganes au triangle marron, prostituées et lesbiennes au triangle noir, Témoins de Jéhovah au triangle violet, gays au triangle rose, criminels de droit commun au triangle vert, apatrides au triangle bleu, handicapés physiques et mentaux, vagabonds...

« Et l’Etat français collaborationniste, quoi qu’en disent certains encore aujourd’hui, prend sa part de l’ignominie.

« La déportation, les camps d’internement, de travail, de mort, resteront à jamais comme la pire des dérives commise par les hommes contre l’humanité.

« Cette très rapide chronologie montre l’enchainement terrible des événements, lié à la seule croyance que des hommes seraient supérieurs et que d’autres pourraient être avilis.

« Comment de telles idées ont-elles pu grandir, être appliquées sans protestation massive ?

« Hitler promettait au peuple allemand l’amélioration de la vie et le maintien de la paix : "Donnez-moi quatre ans, et vous ne reconnaitrez plus l’Allemagne".

« Quatre ans plus tard, les acquis sociaux étaient détruits et les libertés fondamentales étaient bafouées…

« Après la guerre et sous l’impact des horreurs révélées, la société a fortement évolué avec des droits reconnus, des personnes, des femmes, à penser librement, à accéder aux soins, à s’informer, à se déplacer, à disposer librement de son corps. Et, pourtant, ces droits sont maintenant contestés entre le trop et le pas nécessaire.

« Partout reviennent les indifférences barbares, une dureté égoïste d’un côté et une pauvreté renaissante de l’autre. Aujourd’hui, l’individualisme est roi, il touche le droit, l’organisation de la société, les mœurs.

« Ce n’est plus « qu’est-ce que je fais pour la société ? » mais « où sont mes intérêts ? ».

« L’autorité - de l’institution, de la famille, du cadre de vie -, celle qui décide du cadre général des conduites, est rejetée au profit de la nébuleuse des réseaux sociaux, qui ont leurs formidables côtés mais qui sont aussi utilisés sans grand discernement.

« De nouveaux comportements sont aux antipodes d’une organisation sociale, politique, qui cherche, par la réflexion de tous, par la discussion, à se connaître et à comprendre les éléments constitutifs de la condition commune qui permettent des choix pertinents et collectifs, tout en rendant possible l’exercice des droits individuels.

« Les textes que nous avons entendus précédemment sont importants, merci à ceux qui les ont dits et choisis, car ils montrent les saines mais vaines tentatives de résistance aux premières mesures.

« Ces résistances ont été d’initiatives individuelles, mais de portée symbolique, d’essence humaniste.

« Certes elles ne pèseront pas lourd lorsque les méthodes, brutales des nazis provoqueront une terreur généralisée.

« Aussi, instruits de ces précédents,

« Nous sommes rassemblés pour nous souvenir et rendre hommage aux victimes, à ceux qui ont sacrifié jusqu’à leur vie pour combattre le nazisme.

« Nous sommes rassemblés pour combattre ceux qui réfutent les évidences factuelles, ceux qui entretiennent un terreau de haine et d’exclusion.

« Nous sommes rassemblés parce que les replis nationalistes à l’œuvre aux Etats-Unis, en Europe, comme avec le Brexit, sont des signaux alarmistes.

« Nous sommes rassemblés parce que ce n’est pas ce qui rassemble qui importe à de trop nombreuses personnes mais ce qui différencie.

« Nous sommes rassemblés parce que notre société, devenue plus dure, plus indifférente et plus égoïste, nous inquiète.

« Nous sommes rassemblés parce qu’une infime partie de la population accapare l’essentiel de la richesse produite au détriment de populations entières.

« Nous sommes rassemblés parce que la grande Histoire nous enseigne que l’inquiétude des peuples peut devenir dévastatrice.

« Je vous ai dit que je reviendrai au texte de mon début de propos :

« "… la Résistance fut une démocratie véritable : pour le soldat comme pour le chef, même danger, même délaissement, même responsabilité totale, même absolue liberté dans la discipline. Ainsi, dans l’ombre et dans le sang, une République s’est constituée, la plus forte des Républiques. Chacun de ses citoyens savait ce qu’il devait à tous et qu’il pouvait compter que sur lui seul ; chacun réalisait, dans le délaissement le plus total, son rôle historique et sa responsabilité. Chacun d’eux, contre les oppresseurs, entreprenait d’être lui-même, librement, irrémédiablement. Et en choisissant lui-même dans sa liberté, il choisissait la liberté de tous. Cette république sans institutions, sans armée, sans police, il fallait que chaque Français la conquière et l’affirme à chaque instant contre le nazisme… ne peut-on souhaiter que la République de grand jour conserve les austères vertus de la République du Silence et de la Nuit ?"

« Ces indicateurs doivent nous ouvrir les yeux, avertis de l’Histoire, nous ne devrions pas céder aux manipulations mais les démasquer ! Je pense :

- à la glorification identitaire, à la haine des autres, des faibles, des minorités

- aux désignations de boucs émissaires : étrangers, opposants, journalistes

- aux spoliations déguisées en mesures réparatrices de faits imaginaires

- à la distribution de cadeaux bien ciblés : emplois, honneurs, pots-de-vin

- à la corruption généralisée au profit de quelques uns

- aux pratiques de tromperies, de falsifications, de tri des informations

- à l’autopromotion, voire la célébration d’un homme ou d’une femme

- à la destruction de l’Etat de droit, de la séparation des pouvoirs

- aux manipulations mensongères ; plus la ficelle est grosse, plus le culot est grand, plus l’adhésion aveugle progresse

- à l’usage de la violence, justifié et institué

- à la peur utilisée comme un moyen ou comme un objectif

« Ne baissons pas les bras et réaffirmons, avec force et conviction, que nous défendons une France laïque, où la liberté de conscience, la liberté de penser et la liberté d’exprimer des opinions dans le respect des lois est inscrite dans notre Constitution : "La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. "

« Notre volonté est, encore et toujours, de perpétuer le projet de vivre ensemble, sans haine ni rejet, dans la richesse de nos différences.

« Vive l'amitié des peuples de l'Europe et du Monde ! Vive la France de la République ! »

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Idées et politique générale Devoir de mémoire
25 mars 2017 6 25 /03 /mars /2017 07:34

Il y a une semaine avait lieu la commémoration de la fin de la guerre d'Algérie.

Comme chaque chaque année, j'ai prononcé une allocution après le discours de la fédération nationale des anciens combattants d'Algérie (FNACA) et la lecture par Christian Pichard, maire-adjoint délégué aux anciens combattants et à la promotion de la ville, du message officiel de Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État chargé des anciens combattants et de la mémoire. Mon propos...

« Le 19 mars 1962, à midi, suite aux accords d’Evian, est officialisé un cessez-le-feu qui aurait dû mettre fin à huit ans de guerre en Algérie. Les Algériens prononceront l'indépendance officielle de leur pays le 4 juillet 1962. Malheureusement, les combats et les massacres vont se prolonger jusqu'à cette date et même ensuite, parfois avec une violence redoublée. Les principales victimes des derniers massacres seront les Pieds-noirs et les harkis.

« La Nation a souhaité, conformément au vœu de la fédération des associations des anciens combattants d’Afrique du Nord, que le jour officiel soit le jour du cessez-le-feu, mais elle a également décidé d’associer, dans le même hommage, le 5 décembre, les victimes de cette guerre, soldats, appelés du contingent, rapatriés, personnes disparues, populations civiles, victimes de massacres ou d’exactions commis avant et après le 19 mars 1962 en violation des accords d’Evian, ainsi que les victimes civiles des combats de Tunisie et du Maroc.

« De 1952 à 1962, sur ces terres d’Afrique du Nord, plus de deux millions d’hommes ont servi sous les drapeaux. Vingt-trois mille y ont laissé la vie. Ces hommes et femmes, leurs familles, cinquante cinq ans après, gardent leurs âmes meurtries.

« Il est indispensable, dans un monde où les hommes se déchirent encore aujourd’hui, où des populations entières sont réduites à l’exil et dont l’avenir dépend de la charité des peuples, que nous puissions avec solennité, chaque fois que possible, dire notre volonté de paix, d’humanité, et de respect des autres.

« Car, en effet, de plus en plus, c’est l’indifférence qui prévaut, une dureté égoïste d’un côté et trop de souffrance de l’autre. Cela sous couvert de la loi, le tout avec un cynisme, une franchise tels qu’on est effrayé. Comment refuser de voir ces milliers de pauvres gens, femmes et enfants, qui, en dernier espoir, se jettent à la mer ?

« A mes yeux, les replis nationalistes à l’œuvre en Europe, aux Etats-Unis, le Brexit, sont le symptôme de ce malaise qui s’installe. Ce n’est plus « qu’est-ce qui nous rassemble ?» mais « qu’est-ce qui nous différencie ?».

« La xénophobie, la haine et son cortège de violences sont-ils l’étape suivante qui, à défaut de préserver la qualité de vie de quelques uns, détruira, une fois encore, celle de tous ?

« Il m’apparaît donc toujours plus nécessaire de défendre, contre les égoïsmes, contre un nationalisme d’exclusion, une organisation sociale et politique, ouverte à la réflexion de tous, qui, par la discussion, cherche à connaître, à comprendre, les éléments constitutifs de la condition commune aux fins de permettre la réalisation des choix pertinents et collectifs qui « font » le vivre ensemble, dans le plein exercice des droits individuels.

« Nos pensées vont vers les victimes de toutes origines et de toutes confessions, vers toutes les familles endeuillées et meurtries.

« A tous, anciens combattants, rapatriés, harkis, civils je renouvelle l’expression de notre estime. La fraternité c’est la compréhension, le respect, la solidarité. Nous le devons, pour l’idée que nous nous faisons de la communauté nationale. Nous le devons à ceux qui ont démontré leur attachement à notre pays républicain.

« Vive la France républicaine. Vive l’amitié entre les peuples, ici, et partout dans le monde. »

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
22 novembre 2016 2 22 /11 /novembre /2016 05:23

Ce lundi soir, nombreux étaient les Seynois rassemblés dans la salle de la Bourse du Travail pour l'inauguration d'une exposition consacrée à une rétrospective sur le logement social à La Seyne depuis la création, en 1948, de notre Office public municipal d'HLM.

Il fallait en effet prendre le temps de marquer une étape dans la vie du logement social seynois, à quelques semaines du 1er janvier 2017, moment où la loi a prévu que notre office public de l'habitat ne sera plus rattaché à la commune, mais à la communauté d'agglomération Toulon Provence Méditerranée.

Ce fut l'occasion pour moi, dans mon discours inaugural, de mesurer le chemin parcouru, de féliciter les acteurs d'une belle aventure sociale. Et d'avancer vers le futur, en faisant quelques annonces...

 

« Mesdames, messieurs, chers collègues, chers amis,

« Nous lançons cet après-midi une démarche à laquelle j'ai tenu. Au travers de cette exposition, réalisée en collaboration par les services de notre office d'HLM « Terres du Sud Habitat », TSH comme on dit, et de la Ville, je souhaite prendre date à un tournant du logement social à La Seyne.

« Bien sûr, c'est une évidence : lorsqu'on parle de logement, de logement social en particulier, on parle de la vie. On parle de l'humain avant de parler de la pierre, même si la pierre doit être un outil maîtrisé de développement économique et de progrès social...

« Dans ma conception de la vie ensemble, dans notre conception partagée, je crois, tout est lié : l'action publique au sens strict, celle des établissements ayant mission de service public, les acteurs économiques et sociaux, et la force associative, tellement mise à mal depuis des années, attaquée de manière tellement irresponsable - et je pèse le mot, en ces temps de tensions sociales -, par toutes les politiques d'austérité mises en place...

« Irresponsable car il ne faut pas s'étonner de l'absence de la puissance publique quand celles et ceux qui participent à la relayer de manière vivante, sur le terrain, je parle des acteurs associatifs, notamment les amicales de locataires ou ce qu'on appelle les associations "de pied de tours", ne sont plus soutenus.

 

MA VIE, MA VILLE, MON LOGEMENT

« "Ma vie, ma ville, mon logement" est le titre cette exposition. Car c'est un élément de vie en république.

« Je ne dissocierai pas non plus de ce sujet les bons résultats du Programme de rénovation urbaine, un projet parmi les plus importants de France, qui bientôt s'achève même s'il reste quelques chantiers importants. Et je ne féliciterai jamais assez pour ces résultats « Terres du Sud Habitat », notre TSH, le Groupement d'intérêt public « Nouvelle Seyne », dont le directeur, Pierre de Riberolles, prend une retraite méritée, très bientôt...

« Je ne dissocierai pas de cette réflexion les acteurs publics tels que les forces de sécurité, les pompiers, la police municipale et nationale, mais aussi de prévention, d'éducation, scolaire et populaire, de sport et de culture, qui doivent faire leur travail dans nos cités HLM dans des conditions souvent difficiles et qui sont, eux aussi, en butte à de terribles purges d'austérité...

 

UNE CULTURE SOCIALE DE L'HABITAT

« Le logement social, donc. Aujourd'hui, nous mesurons à la fois le chemin parcouru et tout ce qui reste à faire avec des milliers de demandes en attente, dans une ville qui est pourtant l'une des rares de ce département - pour ne comparer qu'à cette échelle -, à vouloir tendre vers les 25% de logements sociaux exigés par la loi...

« Cette culture sociale, nous n'en sommes bien sûr pas les seuls dépositaires. Mais La Seyne, à l'évidence, est un pilote, une vitrine, une source d'encouragement et une force de combat, de mobilisation... Cette culture sociale, qui nous vient de loin, qui est un peu dans nos gènes seynois, ne doit pas se dissoudre dans la modernité et l'élargissement des compétences territoriales. Pour le dire d'une manière un peu plus imagée, si vous le permettez : ne perdons pas notre âme communale dans la nécessaire action intercommunale

« Au contraire, ce que j'appelle notre « culture sociale » doit se renouveler, trouver sa voie, nouvelle et renforcée, dans un monde en pleine mutation. Et je sais que les élus, les acteurs sociaux, les militants associatifs, vous, mesdames et messieurs, portez en vous cette ferme résolution.

 

LE LOGEMENT EST UN DROIT

« Dès ma prise de fonction en 2008, j'ai décidé de prendre un arrêté anti-expulsions. Eh bien je persiste et signe : lorsqu'il n'y a pas malhonnêteté et tant que les possibilités de recours et de relogement ne sont pas trouvées, avec l'accompagnement des services et des associations spécialisées, je m'opposerai toujours à toute mesure administrative injuste et aveugle.

« Que l'on ne s'y trompe pas : je suis parfaitement conscient que le logement social aurait tout à perdre dans une gestion laxiste. Mais le logement est un droit, ne l'oublions pas. Et il faut continuer le combat pour qu'il devienne une réalité et, désormais, un effort beaucoup mieux partagé.

 

DU RATTACHEMENT À L'AGGLOMÉRATION À LA FUSION DES OFFICES DE L'HABITAT

« Concrètement, au début 2017, notre office TSH sera rattaché à Toulon Provence Méditerranée, TPM. Son conseil d’administration et l'agglomération ont déjà statué dans ce sens - ne l'eussent-ils pas fait que le préfet aurait pris un arrêté l'imposant.

« L'étape suivante, probablement dans deux ans, sera la fusion de TSH avec THM, l'office toulonnais « Toulon Habitat Méditerranée », et, peut-être, si le Grand Toulon devient métropole, avec la partie de l'office départemental « Var Habitat » concernant nos 12 communes.

 

DE 1948 À AUJOURD'HUI, MERCI AUX PRESIDENTS ET AUX ÉQUIPES DES HLM

« Je veux solennellement remercier et féliciter pour l'immense travail accompli les agents et les directions de l'office, les administrateurs et les présidents, depuis tant d'années, avec une mention spéciale pour l'un des pionniers, Jeannot Passaglia, qui a été au lancement de l'aventure au lendemain de la guerre.

« Une mention particulière aussi pour le président Yves Gavory et mes collègues du conseil municipal qui, en charge depuis 2014 de représenter la ville au conseil de TSH, vont devoir laisser la place en janvier à des élus communautaires, après avoir, avec efficience et courage, mené à bien les réformes imposées, pour sauver l'office, par les instances nationales de contrôle et d'accompagnement du logement social, qui ont dû passer par des décisions difficiles en matière de gestion humaine et financière avec l'appui constant du directeur David Guengant et de ses formidables équipes.

« Nous espérons que l'agglomération permettra à quelques élus communautaires, par ailleurs conseillers municipaux seynois, de demeurer dans le conseil d'administration. Je vais d'ailleurs probablement devoir reprendre le flambeau de la présidence avec l'aide de ceux d'aujourd'hui qui pourront rester.

 

VERS DES ATTRIBUTIONS ANONYMES ET PUBLIQUES DES LOGEMENTS

« Et je voudrais que soit rapidement mené à bien un chantier dont nous parlons depuis longtemps, celui du « scoring », de l'anonymat et de la publicité, pour les attributions de logements, ainsi que les offices de l'agglomération de Rennes, puis d'autres, l'ont mis en place, pour une parfaite transparence et une équité sur la base de critères. On est tant attaqués, à tort, sur cette délicate question !

« Mais revenons à notre exposition, qui porte un regard synthétique sur l'histoire du logement social à La Seyne, avec quelques références au contexte national. Elle aura au moins un mérite : celui de rappeler, et ainsi, de faire mieux comprendre, de rendre mieux lisible, une démarche à travers les années, depuis 1948, avec ses hauts et ses bas, ses succès et ses crises, avec les immenses mutations, avec l'impact, je le disais, de politiques d'austérité, notamment depuis la crise des années 70, et les désillusions de la ghettoïsation, l'impact décisif et terrible du chômage, en France en général, et ici, avec la fermeture des chantiers navals sur fond de globalisation économique.

« Oui, au moment où l'on tourne une page, avec la nouvelle gestion intercommunale, ce bilan compte, et doit être connu.

 

UNE PAGE SE TOURNE, LA MÉMOIRE DOIT ÊTRE PRÉSERVÉE ET PARTAGÉE

« Et ce travail de mémoire, d'analyse, de réflexion, de convivialité autour du logement social ne devra pas s'arrêter là. Bientôt s'achève, je le disais, notre rénovation urbaine, et autour de l'année 2018, nous marquerons ensemble cette étape cruciale de l'évolution humaine, urbaine, sociale, et économique de notre ville.

« Un travail sur le fond, de collecte, de réflexion collective, d'implication des locataires, des citoyens, au travers de leurs associations, est nécessaire.

« Je demande d'ailleurs, d'ores et déjà aux services municipaux et à tous les partenaires concernés, de préparer cela avec la population, avec tout le tissu associatif...

« Bref, ce moment, aujourd'hui, est un coup d'envoi, dont je souhaite qu'il s'amplifie.

« Concrètement, l'exposition ira à la Maison du patrimoine en janvier, puis à la médiathèque Andrée Chedid... Une information, durant deux mois sera donnée sous la forme d'une borne interactive dans le hall de la mairie...

« Je compte sur vous toutes et tous pour multiplier les occasions de maintenir et développer l'information, la communication, l'action, autour de cette thématique centrale du logement social.

« Permettez-moi, pour terminer, de remercier et féliciter ceux qui, à TSH et dans nos services municipaux, la culture et le patrimoine, la com, la reprographie, pour leur travail collectif pour réaliser cette exposition. »

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19 juillet 2015 7 19 /07 /juillet /2015 16:22

Tandis que certains prennent le risque d'échauffer les esprits en revenant a posteriori sur une décision du Conseil municipal relative à une dénomination de voie publique contre laquelle ils ne se sont pas insurgés lorsqu'elle leur a été proposée et contre laquelle ils n'ont pas voté en séance, nous avons ce dimanche, d'ailleurs en leur absence remarquée par beaucoup et même un peu raillée par certains — ce que je regrette car ce n'était ni le lieu ni le moment —, rendu l'hommage dû aux victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etat français et aux « Justes de France ». Devant les élus, les associations patriotiques, les membres des deux centres israélites de La Seyne, la famille du seul Juste seynois connu, et la population, j'ai prononcé une allocution...

 

"Aujourd’hui, à l’appel de la République — c'est le Président Jacques Chirac, en 2000, qui en a décidé ainsi —, nous appliquons ce que les hommes clairvoyants du siècle des Lumières enseignaient : on ne sort de la nuit que par le rassemblement clair de la mémoire, que par l’obsession de transmettre, que par la lutte contre l’amnésie – si sélective.

"Ils nous ont enseigné qu’il faut lutter, sans relâche ; lutter pour la préservation de l’esprit critique ; lutter pour la liberté de penser. Cette année nous a montré que cette liberté est toujours à défendre et à protéger. La démocratie est tellement sensible à la violence qu’il est facile de la meurtrir.

"Pour l’heure, c’est à des femmes et des hommes qui, dans les heures très sombres de l’occupation, mirent en œuvre une « résistance non violente » qui sauva de nombreuses vies que nous rendons hommage, et aux victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etat français.

Mais pas seulement, l’époque et l’actualité remettent dans nos consciences cette « France des haines », unie et désunie par la morale des intérêts que Chateaubriand dénonça en son temps.

"Cette sentence s’applique bien sûr à cet Etat français qui alla au devant des souhaits des nazis, qui les amplifia ; mais aussi à ceux qui aujourd’hui prônent le repli et l’exclusion.

"Haine de l’étranger, parce que Tzigane ; haine de l’étranger en son pays, parce que Juif ; haine de l’étranger aux bonnes mœurs, parce qu'homosexuel ; haine du journaliste, parce que critique ; haine du policier, parce que garant de l’ordre républicain ; haine du migrant, parce que trop pauvre ou encombrant.

"Il faut avoir à l’esprit qu’il est bien plus facile de retourner à la barbarie que d’en sortir...

"Et c’est donc dans la boue la plus noire que se sont révélés des femmes et des hommes d’exception qui, non seulement ne crièrent pas avec les loups, mais ont eu le courage, dans la plus grande discrétion, de venir au secours de victimes. Parmi eux, il y eut beaucoup de « simples gens » dont l’héroïsme quotidien consista à accueillir des enfants juifs, à cacher leurs familles, à les soigner, ou à les faire passer en zone libre. Simples gens, parce qu’ils n’en tirèrent pas gloire mais surent, contre l’autorité, garder leurs valeurs d’humanisme, de partage, de communion. Ils sont à jamais des Justes parmi les Nations.

"En rendant hommage aux victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etat français, du régime nazi, en rendant hommage aux Justes, nous rendons justice à l’humanité. « Il y a dans les hommes plus de choses à admirer que de choses à mépriser », écrivait Camus.

"Par leurs actions désintéressées, ils nous ont enseigné que, même dans la plus grande adversité, alors même que le désespoir envahit les âmes, la moindre action positive, si ténue et insignifiante sur l’instant, sera réconfortante plus tard.

"Aujourd’hui, nombreuses sont les régions du monde où les hommes s’affrontent. De plus en plus, les conflits s’enlisent du fait, moins de velléités de conquêtes, que de volontés d'imposer une idéologie, une religion, des mœurs. Les raisons de s’opposer traversent les habitants des mêmes contrées, niant aux uns ce que l’on exige pour les autres.

"Alors, devant cette sculpture que La Seyne doit à la pugnacité de notre ami Jean, fils de Roland Huillet, reconnu Juste pour avoir caché et aidé des Juifs lors de sa captivité dans un hôpital militaire en Allemagne, devant le seul mémorial — à ma connaissance — dans le Var, si l'on excepte une plaque à Belgentier, devant cette œuvre de Michel Stefanini que nous avons érigée il y a quatre ans, faisons le vœu, en nous inclinant avec respect face aux victimes et aux Justes parmi les Nations, que l'on se garde d'attiser les braises des haines, notamment pour des questions de petite politique, y compris locale, et surtout que les irrédentistes de tous bords soient enfin touchés par les grâces des valeurs des Lumières."

 
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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
15 juillet 2015 3 15 /07 /juillet /2015 01:17

Comme chaque année, après le défilé traditionnel, à l'occasion de la Fête Nationale, j'ai prononcé un discours devant notre Monument aux Morts, en présence des représentants de la Marine Nationale, et notamment la Préparation militaire marine dont La Seyne est la marraine, le 519ème groupe de transit maritime jumelé avec notre ville, les élus, les associations d'anciens combattants, résistants et victimes des guerres, leurs porte-drapeaux, notre philharmonique "La Seynoise", notre clique, les corps constitués, la population et nos visiteurs...

"Cette fête du 14 juillet est la remémoration du rassemblement des fédérés venus en 1790 à Paris de toutes les régions du pays pour marquer son unité, à l'occasion du premier anniversaire de la chute de la Bastille, aboutissement imprévu d’une longue réflexion conduite par des esprits novateurs tout au long de ce XVIIIe siècle qualifié par l’Histoire de siècle des Lumières.

"C’est l’avènement de la démocratie, la suprématie de l’organisation citoyenne sur l’absolutisme royal ou divin. C’est aussi l’émergence de l’individu dans le groupe.

"Mais l’esprit des Lumières se heurte à la réalité de la nature humaine qui n'est peut-être pas à la hauteur des exigences. C'est Montaigne qui disait : « Le caractère, les idées, dépendent de la fortune, des circonstances, et subissent les secousses du chaos intime des passions ».

"Etre un homme parmi les hommes est en effet une responsabilité.

"Car, en ce 14 juillet de l'an 223 de la République, notre Fête Nationale est fille et petite-fille de la fête de la Fédération, symbole de la Nation émergente, et de la prise de la Bastille, symbole de la fin de l’absolutisme, le pouvoir de quelques-uns qui cède devant tout un peuple. La Révolution française nous a appris cette vérité : c'est de la responsabilité de tous et de chacun que procède notre liberté, et non pas l’inverse.

"C’est aussi l’éclairage que donne la crise économique et monétaire que traverse l’Europe et le coup de projecteur que provoque l’actualité de la Grèce. Nous sommes confrontés à une situation dont on certains se demandent si la Grèce en est la victime ou la responsable. S’il y avait responsabilité, elle serait pour le moins partagée, car les génies de l’Eurogroupe, depuis toutes ces années, ont laissé faire une succession de dirigeants et de prestigieux banquiers malhonnêtes.

"Ou bien nous nous croyons des hommes libres, capables de responsabilité, et le peuple choisit ; ou bien nous pensons que, finalement, le peuple est incapable de se conduire lui-même. Et un boulevard est alors ouvert pour toutes les formes d'obscurantisme et d'autoritarisme. Et, pour ne rien alléger, ces moments de tension sont aussi l’occasion de dénonciations, de calomnies… Au Moyen-Age, le sport à la mode était d’accuser l’autre de sorcellerie… la calomnie est un moyen redoutablement efficace d’attiser la haine des ignorants et des imbéciles… un jeu dangereux.

"Tentons alors de dissiper une partie de l’ignorance par un rapide retour sur notre histoire.

"Avant la France, nous étions une juxtaposition de peuples celtes, gaulois, romains, de cultures diverses, païennes, plus ou moins inféodés au culte gréco-romain de l’Empereur. Et puis l'empire s’est effondré et s'est christianisé.

"Et puis sont venues les invasions. Les Barbares – c'est-à-dire tous les autres que nous – ont déferlé. Ils sont venus du nord, du centre, de l’est du continent. Ils ont traversé les territoires, et ils ont fait souche. Nous sommes ces barbares. Ce sont eux qui ont créé nos identités régionales, toujours présentes, qui formaient un paysage morcelé, qui vivait d’échanges commerciaux, parfois lointains, et rythmé de guerres locales incessantes. A Vix, à Bourges, et récemment à Lavau, dans l’Aube, des fouilles montrent que l’ambre de la Baltique côtoie le lapis-lazuli des Indes.

"Et ce fut alors une suite de chefs, de rois, qui de Clovis à Mérovée, de Carolus à Capet, découpèrent en trois entités ce qui n’est pas encore l’Europe. L’une d’elles, après moult péripéties, deviendra le Domaine royal (en surface l’équivalent de trois départements) avec une zone d’influence sur les contrées proches dirigées par un Prince ou un Duc. Les siècles passaient, la situation n’évoluait guère ; en 1432, Paris est aux mains des Plantagenêt, ces Anglais honnis de nos vieux livres d’histoire, en vérité une simple affaire de famille : le domaine royal, réduit à la portion congrue, est administré depuis Bourges.

"C’est seulement à la Renaissance, et après les guerres de religion, que l’unité territoriale de la France est réalisée. C’est seulement avec l’ordonnance de Villers-Cotterêts que le français devient langue officielle en 1539. Mais c’est aussi l’acte de naissance de l’Absolutisme.

"Ainsi la France, à l’échelle du temps, n’est la France que depuis peu, et encore, c’est alors une France de populations qui ne se comprennent pas, qui ne maitrisent pas la langue commune. Ces populations subissent les guerres et elles sont assujetties.

"Il faudra la Révolution pour que se forge le Peuple français. C’est en lui et par lui que réside l’unité nationale, la Nation, le patriotisme, la Liberté (on abolit l’esclavage en 1794), l’Egalité (les citoyens sont égaux en droits), la Fraternité (la Nation organise la solidarité des uns et des autres), la laïcité (la Loi protège la Foi, et la Foi ne fait pas la Loi).

"Là est l’apport majeur de la Révolution : Universalisme, Unité et Solidarité

"Aujourd’hui, bien sûr, l'idée de Nation est traversée de celle de l’Europe des peuples, comme précédemment était la France des peuples.

"A l’échelle des territoires, la solidarité nationale française sait s’exercer, comme dans le cadre des politiques des quartiers prioritaires, pour ne pas parler de notre système de protection sociale qui nous a sauvés en 2008.

"Et, cependant, justement, en 2008, à l’échelle du Monde, les Etats ont bien été complices ou impuissants pour que les financiers continuent, avec cynisme et arrogance, de régir ce que pudiquement on appelle le marché : une vaste bulle spéculative qui se fiche du bien-être de du citoyen et de l’épargnant.

"Mais, à l’échelle de l’Europe, pourquoi tant de palabres pour savoir s'il faut aider les Grecs qui, ayant subi des gouvernements impécunieux, devraient subir au-delà du raisonnable des restrictions drastiques ?

"Alors... 222 ans après la fête des fédérés, la nouvelle ambition de la France dans l'Europe ne devrait-elle être de réactiver partout le concept de fraternité laïque : vivre ensemble, penser collectif, accepter la diversité, organiser le partage ?

"Alors... 222 ans après la fête des fédérés, ne faudrait-il pas, dans un esprit de justice, se donner quelques objectifs simples ? Assurer à chacun sa subsistance avec des chances égales pour tous, améliorer la vie collective en maintenant les outils de la Nation que nous apprécions tant, pour la sécurité, les mobilités, la santé et l'éducation, le développement durable, favoriser l’épanouissement de la personne humaine, la vie de l’esprit, celle de la culture...

"Je terminerai avec la traduction de quelques mots de cette chanson de 1971, vous la connaissez, elle est de John Lennon, et elle a fait parler d'elle, il y a quelques semaines, autour de l'école d'un village de Corse :

Imagine qu'il n'y ait plus de pays.
Ce n'est pas dur à faire.
Plus aucune raison de tuer ou de mourir.
Et pas de religion non plus.
Imagine tous les gens
Vivant leur vie paisibleme
nt...

N'imagine aucune possession.
Je me demande si tu en es capable.
Nul besoin de cupidité ou de faim.
Dans une fraternité,
Imagine les gens,
Se partageant le monde enti
er...

Tu peux dire que je suis un rêveur,
Mais je ne suis pas le seul.
J'espère qu'un jour tu nous rejoindras.
Et que le monde sera u
ni.

"Vive la France de la République, vive l’Europe solidaire, et vive le Monde des peuples amis !"

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
28 mai 2015 4 28 /05 /mai /2015 06:59

On m'a demandé de mettre en ligne le propos que j'ai tenu, devant les élus, les anciens combattants, résistants, déportés, victimes des guerres, les corps constitués, notre population et nos visiteurs, lors de la commémoration du soixante-dixième anniversaire de l'armistice du 8 mai 1945. Il fut cette année un peu long, donc peut-être plus pénible à lire qu'à entendre, ce qui avait justifié que, contrairement à mon habitude, j'avais opté pour ne pas le mettre en ligne, mais je réponds néanmoins à cette sollicitation...

 

"Durant les 5 années précédant septembre 1939, le Reich avait insolemment réarmé, annexé des territoires en toute impunité, développé des théories nationalistes, racistes, antisémites. Il ne laissait plus le choix aux démocraties européennes jusqu'à lors trop poltronnes. Ce fut la guerre.

"Et ce furent alors l’avancée irrésistible des Panzer, le réembarquement à Dunkerque, la drôle de guerre, l’exode des populations ; l’appel du général De Gaulle; les pleins pouvoirs accordés à Pétain ; Pearl Harbour et l’entrée en guerre des Etats-Unis ; l’Afrique Occidentale Française libérée, l’occupation de la zone sud ; Stalingrad, qui marqua le tournant du conflit ; Jean Moulin, préfet démissionnaire dès 1940, fédérateur national des différents réseaux, qui initia la création du Conseil National de la Résistance, le 27 mai 1943 ; les deux débarquements, le 6 juin 1944 en Normandie et le 15 août en Provence. La Libération. Une organisation intérieure qui évita l’assujettissement aux Américains…

"Après plus de cinq années de guerre, les 8 et 9 mai 1945, l’Allemagne capitulait sans condition.

"C’est un rapide exposé pour un long affrontement planétaire. prolongement de la Grande Guerre, une sorte de postface du Traité de Versailles.

"Tirons-en toujours les leçons. Ce fut une guerre d’anéantissement, dont les enjeux idéologiques et nationaux, pensés et préparés dans les temps de paix et d’accession au pouvoir, réapparaissent hélas aujourd’hui ça et là sous des oripeaux politico-religieux.

"Ainsi, ultra-national, guerrier, antisémite et raciste, le régime hitlérien a voulu établir la domination d'un peuple sur un prétendu absolument nécessaire large « espace vital ». Il s’est caractérisé par la suppression des libertés, l’omniprésence de la police et du parti unique, la terreur, une économie orientée vers la guerre.

"Or ça existe encore un peu partout, de la Corée à l'Afrique, en passant par le Moyen Orient. Les régimes totalitaires se fondent sur des projets de nature différente, mais présentent des caractéristiques communes toujours en vigueur.

"Ces régimes s’appuient sur l’adhésion d’une partie des populations… mettent en œuvre des pratiques appuyées sur la violence… éliminent les oppositions… uniformisent leur société ou se confortent dans une vision d’un monde coupé en deux, entre « nous » et « eux ». C'est pour ça qu'il faut être vigilants quand, en France et en Europe même, certains n’hésitent pas à distinguer « les Nationaux » et « l’étranger ». Ce populisme, dénoncé par l’histoire, est toujours à l’œuvre.

"Il promet tout par la magie de l’ostracisme et du repliement, mais il réfute être xénophobe ; mais ne l’est-on pas lorsqu’on estime qu’être Français, c’est être né et issu de parents nés en Anjou ou en Guyenne, comprenez en France ?

"Vous savez bien que l’ambiguïté est entretenue ! Les mentalités se rétrécissent. La peur et la suspicion s’immiscent dans les esprits… Or le jugement juste voudrait que, si on renvoie tout le temps à sa supposée origine tel groupe social abusivement et erronément constitué en vue d être ciblé, comme les gens se référant à une confession donnée, alors on doit renvoyer tout le monde à son origine. Et, pour faire court, il faut rappeler que nous venons tous de quelque part : notre grand-père à tous, homo sapiens, est parti d’Afrique !

"Qu’est ce qui a bien pu pousser un élu de la République à dire que posséder une carte d’identité française ne suffisait pas à être Français ? Oh, je sais bien, les choses ne sont pas si simples, mais celui-là a joué sciemment sur l’émotion provocatrice ; pour éclairer le débat, il eût suffi qu’il explicitât sa pensée. Hélas, les raccourcis habilement voilés font du simplisme une arme à détente reportée.

"Eux, les généraux et les soldats des armées de libération de la France, ne se sont pas posé la question. Les Africains, les Malgaches, les Algériens, les Tunisiens, les Marocains, les Indochinois, les Pondichériens, les Tahitiens, les Calédoniens, les Canaques, les Libanais, les Syriens, les Antillais, les Bretons et les Provençaux, qu’ils fussent fusiliers-marins, commandos ou spahis, du groupe naval d’assaut, de la 1ère Division Française Libre, de la 3ème Division d’Infanterie, ou encore des Marsouins de la 9ème Division d’Infanterie Coloniale, tous ceux-là offrirent leur sang à la France.

"Il l'offrirent à une France qui accoucha, avant même la victoire, d’un programme humaniste inédit, issu du Conseil National de la Résistance, qui institua, entre autres avancées, un système social qu'il nous faudrait mieux sauvegarder.

"Le passé nourrit l’avenir, ne l’oublions pas.

"Les 8 mai, Mesdames et Messieurs, - au-delà de la commémoration de la victoire des Alliés sur les forces de l’Axe réunies pour le pire autour de l’Allemagne nazie – nous célébrons la victoire sur des idées monstrueuses de haine et de rejet. Nous célébrons, aussi, ce qui a suivi : la réconciliation des peuples au sein de l’Europe.

"Notre défi, aujourd’hui encore, c'est le projet du « vivre ensemble », celui qui garantit la paix pour les générations, celui qui travaille à une prospérité collective, celui qui, parce qu’il nous concernerait tous, redonnerait de l’espoir à tous.

"70 ans ont passé et l’effroi des peuples, découvrant l’enfer des camps, la folie des hommes, ne peut plus être notre seul moteur.

"70 ans ont passé et nous ne pouvons accepter que la terreur soit le moteur de ces nouveaux combattants de l’horreur qui assassinent au nom d’une religion sans vraiment chercher à la connaître ou s’en remettant à d’odieux manipulateurs et falsificateurs.

"70 ans ont passé et il ne faut céder ni à la phobie de l’immigration clandestine, ni à la paranoïa anti-Islam. Qu’on cesse de forcer les gens issus de pays où l'Islam est la religion principale qui a pétri leur culture, à se penser musulmans. Ils ne forment pas un bloc mais sont, comme tous, une communauté humaine citoyenne traversée de tendances diverses, de la libre-pensée à l’intégrisme radical. Ne globalisons jamais et réduisons pas son image à celle de l’extrémisme.

"70 ans ont passé et notre moteur, c’est avoir l’ambition d’un projet qui s’occupe des hommes et de leur avenir.

"Notre moteur, c’est l’Education qui permet de questionner les dogmes et les prétendues vérités, et qui lutte contre la vanité de l’ignorance. Nous devons donner à chacun les outils qui lui permettront de combattre l’uniformité imposée par les fondamentalismes et d’éviter la réaction violente des identités religieuses ou idéologiques.

"Nous avons un libre arbitre, nous revendiquons notre liberté individuelle, sachons l’utiliser. N’oublions pas que la liberté – au nom de laquelle la Résistance s’est levée – est un commandement que l’on se donne à soi-même.

"L’intolérance que nous observons et qui gagne hélas les esprits ne véhicule jamais le bien, ni en politique ni en morale.

"Alors, oui, le 8 mai, devant vous, anciens combattants, porte-drapeaux, élus, corps constitués, citoyens, devant les enfants, je rappelle que des hommes et des femmes que rien ne prédisposaient à agir ensemble, issus de partis politiques différents, de convictions religieuses exclusives, de racines sociales, culturelles, philosophiques diverses, parfois adversaires, ont su se rassembler sur des valeurs communes de solidarité, d’entraide, de préservation des libertés. Ils ont réfléchi sur l’éducation, sur le partage, l’économie, la santé, le transport, sur la conscience d’être un groupe qui avance ensemble.

"Oui, le 8 mai, nous célébrons la réconciliation, le partage, les échanges. Le 8 mai, nous avons foi en l’avenir de jours heureux.

"Vive la France de la République, vive l’Europe de la démocratie, vive le Monde des peuples amis.

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
28 mai 2015 4 28 /05 /mai /2015 06:43

Ce mercredi était Journée nationale de la Résistance. Comme chaque année, La Seyne a connu sa commémoration devant notre Monument aux Morts. J'y ai prononcé un discours...

 

"Je reviens, comme chaque année, du plateau des Glières, haut lieu des résistances d'hier et d’aujourd’hui. J'ai y entendu des grands de la Résistance des années 40, Walter Bassan et Annette Beaumanoir. J'y ai entendu des résistants d'aujourd'hui, invités à porter témoignage comme je l'ai moi-même été en 2012 après notre combat pour notre maternité : Irène Frachon, lanceuse d'alerte pour le Médiator, Denis Robert, menacé depuis ses révélations lors de l'affaire Clearstream, Claire Millot qui se bat pour le migrants à Calais, ou encore Soha Bechara, résistante libanaise qui se bat aujourd'hui pour la cause des Palestiniens.

"Dans ces hautes montagnes de Savoie, le message des différents orateurs est toujours vivifiant et se résume à ceci : « résister à l’oppression, pour la liberté et dans la fraternité, est un devoir ; c’est, encore et toujours, lutter pour l’espérance de lendemains heureux ».

"Je regrette d'ailleurs que l'initiative d'associations que nous avons connue ces dernières années, ce pique-nique citoyen sur la parc de la Navale, se soit étiolée avec les années. Et je formule le vœu de voir renaître cet événement.

"Les Résistants, militants d’une France libre, ont souvent payé de leur vie leur engagement, ils ont montré que les heures les plus sombres ne sont pas dénuées d’espoir et qu’elles peuvent être suivies de grands bonheurs.

"Cette année est particulière, plus de sept décennies se sont écoulées depuis la Libération et sur décision du Président de la République, quatre figures de la Résistance vont entrer au Panthéon « Deux femmes et deux hommes qui ont incarné les valeurs de la France quand elle était à terre ».

"Je comprends qu'on puisse relever que d'autres aussi auraient pu être choisis, tels Marie-Claude Vaillant-Couturier, mais c’est à la Résistance toute entière que l’hommage est rendu, héros connus, méconnus ou inconnus.

"Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Pierre Brossolette et Jean Zay reposeront désormais auprès de Jean Moulin dans la crypte de la montagne Sainte-Geneviève, cette « maison des grands hommes » inventée par la Révolution.

"Résister, alors, c’était risquer sa vie mais aussi vivre dans l’exaltation pour la patrie et pour l’humanité. Ces femmes et ces hommes avaient la conviction qu’après la guerre, ils pourraient créer une société nouvelle, un monde nouveau.

"Deux femmes et deux hommes remarquables dont les biographies et les mérites sont développés dans tous les journaux. Permettez cependant à l’enseignant que je suis de dire un mot sur Jean Zay, dont un groupe scolaire seynois porte le nom.

"Authentique résistant de la première heure, dès le 20 juin 1940, il est assassiné par la Milice en juin 1944. Il fut ministre de l’Education nationale et des Beaux-Arts durant le Front populaire. Son bilan ministériel est inégalé.

"Pour lui, la République repose sur le civisme et l’intelligence des citoyens.

"Il réforme les Ecoles normales primaires et donne « toute liberté d’initiative » à l’instituteur à qui il demande de former les esprits et les corps par la culture et le sport.

"Je passerai sur la création de l’ENA... pour retenir qu'il a initié le sport scolaire, qu'il a préconisé l’entrée du plus grand nombre - et donc des jeunes filles - dans les lycées qu’il voulait plus démocratiques, qu'il a prolongé de 13 à 14 ans l’obligation scolaire, imaginé les réseaux d’orientation, ce qui deviendra le le centre des œuvres universitaires et scolaires en 1955, posé les fondations du centre national de la recherche scientifique. Et participé à la création des centres d'entraînement aux méthodes d'éducation active, les CEMEA, qui ont formé tant de jeunes Seynois, non seulement à l'encadrement des enfants en colonies de vacances, mais à la vie et à l'engagement citoyen.

"Ce qu'on sait moins, c'est qu'on lui doit aussi la création des théâtres lyriques nationaux, des bibliobus, et la proposition de naissance du festival de Cannes.

"Autant de lieux de formation et d'élévation des consciences du plus grand nombre aujourd'hui menacés par ceux qui ne jurent que par la finance, auxquels se joignent ceux qui, surfant sur la détresse des plus humbles, s'approprient indûment le nom de patriotes, qui est notre bien commun - comme l'est la République..., et ne visent qu'à préparer un retour par la voie démocratique des tenants de ces idéologies funestes qui ont guidé les pétainistes collaborateurs du fascisme et du nazisme.

"Alors oui, l’idéal de la Résistance est encore à atteindre, nous devons continuer inlassablement à nous battre pour la paix, la justice, les droits de l’Homme, l'éducation, la culture, le service public...

"Nous devons continuer et réaffirmer nos repères, notre désir de vivre ensemble, notre volonté de promouvoir une société plus juste, plus égalitaire, plus soucieuse des laissés pour compte."

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
12 novembre 2014 3 12 /11 /novembre /2014 04:38

http://www.theatrum-belli.com/media/02/01/2067683780.jpgComme à chacune des commémorations patriotiques, j'ai prononcé un discours ce 11 novembre, jour du 96ème anniversaire de l'armistice de 1918. J'ai, du moins, prononcé... une partie du discours prévu, car la pluie qui s'est abattue m'a conduit à l'écourter, mes feuillets détrempés s'étant mués en pâte à papier ! Ce dont ne se sont pas plaints celles et ceux de mon auditoire qui avaient oublié d'apporter un parapluie ! Voici donc mon propos...

 

"Le 1er août de cette année, à 16 heures, le tocsin a sonné dans les communes de France. Il a résonné en mémoire de ce qu’il avait sonné, 100 ans plus tôt, faisant comprendre à nos anciens sa triste signification : la guerre !

"Le 28 juin 1914, les télégraphes avaient répandu la nouvelle de l'assassinat de l'héritier d'Autriche-Hongrie à Sarajevo. Il n’aura fallu que cinq semaines pour que la première guerre mondiale éclate le 1er août.

"17 millions de morts, 37 millions de victimes.

"Cette guerre devait être rapide et limitée. Elle fut longue et mondiale.

"Si les Français se sont levés pour défendre la Patrie et pour l’idée qu’ils se faisaient de la République, on occulte souvent l’esprit revanchard qui animait les mentalités en ce début du XXe siècle. En effet, la défaite de 1870 contribua beaucoup à l’élan patriotique : la France qui avait perdu l’Alsace et la Lorraine était toujours meurtrie.

"Les appelés de 14 avaient été nourris de cette situation à l’école de Jules Ferry où l’histoire que racontaient les hussards noirs de la IIIe République était quelque peu remaniée. Les vaincus de 1870 devinrent des héros, à l’image d’Epinal d’un Vercingétorix montré comme un glorieux résistant face à l’empire romain. Sur les gravures, c’est un géant qui jette fièrement ses armes aux pieds d’un Jules César assis et grave. Je ne parle pas de cette autre image, connue de tous, de Jeanne d’Arc boutant l’Anglais hors de France, la Mère patrie ! Ainsi, les enfants chantaient dans les écoles « vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine » et « nous sommes les petits enfants qui voulons servir la patrie. Nous lui donnerons dans dix ans une armée aguerrie. »

"En août 14, ces écoliers sont les hommes qui partent au front. Ils ont en tête l’esprit de devoir et de sacrifice et sont mûrs pour devenir de la chair à canon.

"Les belligérants croient en la paix mais rêvent d’en découdre, les ambitions territoriales, politiques, économiques sont en fait les vrais moteurs de la course à la confrontation. Les évènements s’emballent, la guerre, prévue courte et de mouvements, s’enlise. Ce sera l’effroyable boucherie où on mourra par milliers pour gagner cent mètres, qu'on reperdra dans la foulée. A la mi-septembre, après un mois de conflit, les armées françaises comptaient déjà 720 000 victimes, 400 000 blessés évacués et 320 000 tués ou disparus.

"C’est dans ce premier mois de guerre qu’intervient ce qui deviendra l’affaire des soldats du XVe corps d'armée. Le conseil municipal a récemment délibéré et nous dénommerons bientôt une avenue en reconnaissance de l’injustice qui leur a été faite.

"Le 11 novembre 14, c’en est presque fini de la guerre de mouvement. La bataille de la Marne et ses taxis réquisitionnés par Gallieni, la course à la mer, sont du passé. Les armées vont s’enterrer pour 4 longues années.

"L’année dernière, j’avais emprunté à la littérature pour décrire l’enfer que vécurent les Poilus.

"Cette guerre reste gravée en lettres de feu dans la mémoire collective qui, comme les sols des sanglants combats, n’oublie pas la mort horrible dans les tranchées. Des hectares entiers sont laissés en friche du fait des sols à jamais souillés par les métaux lourds, les gaz, les munitions inertes ou pas.

"En France, on dit, aujourd'hui encore, simplement, la « Grande Guerre ». D'autres, comme l’historien américain George Kennan, parlent la « catastrophe originelle » du XXe siècle.

"A l'occasion du 100e anniversaire du début de cette catastrophe, de nombreuses études ont été publiées qui tentent de nous expliquer l'inconcevable. Elles retracent minutieusement les calculs des acteurs dans les capitales européennes, les prévisions irréfléchies d'une campagne rapide et glorieuse, la définition d'objectifs de guerre aventureux, ainsi que les erreurs d'appréciation qui ont conduit les nations dans ce chaos.

"Il semble, - il semblait ! -, inconcevable, aujourd'hui, qu'une guerre puisse éclater au cœur de l'Europe. J’espère que le présent – il faudrait que ce qui se passe dans l’est de l’Ukraine s'arrête vite - restera la réalité.

"Car, après la rupture de civilisation que fut la seconde guerre mondiale déclenchée cette fois par l'Allemagne nazie, nous avons remplacé l'équilibre toujours précaire des alliances changeantes entre Etats qui marquait notre continent il y a un siècle par une communauté européenne de droit. L'Union européenne doit continuer à nous permettre de trouver une voie pour régler pacifiquement nos divergences d'intérêts.

"Au lieu de la loi du plus fort, c'est à la force de la loi de régir les rapports entre les Européens.

"La perte de confiance dans le projet européen, du fait du chômage et du manque de perspectives d'avenir, renferme de grands dangers. Un tel climat est propice à la renaissance d'accents nationalistes, emballés dans la mélodie facile de la critique européenne. L'Histoire nous commande de nous y opposer résolument.

"Dans de nombreuses régions du monde, le système fragile de l'équilibre des forces n'appartient toujours pas au passé. Vingt-cinq ans après la chute du Mur et l'ouverture du rideau de fer, de nombreux foyers de crise persistent.

"Cette « Grande guerre », cent ans plus tard, recèle ainsi cette autre résonnance : c’est en 1916 que la ligne Sykes-Picot est imaginée. Elle fixe la carte du Moyen-Orient que nous connaissons.

"Chez nous, le déclenchement de la Première Guerre mondiale est un moment d’histoire, douloureux mais maintenant lointain. En Orient, c’est un évènement fondateur qui redessine les frontières et crée de nouveaux pays : la Turquie moderne, le Liban, la Syrie, l’Irak, la Jordanie.

"L’ancien empire ottoman, entré en guerre auprès de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie, sera combattu et démembré à l’est dans la neige et la boue du Caucase par les Russes, aux Dardanelles ou depuis l’Iran à Bassora par les Français et les Anglais, appuyés par la révolte des tribus arabes. Mais, la promesse du grand royaume arabe promis par Lawrence d’Arabie n’est pas tenue.

"Ainsi, d’une seule terre et de trois promesses (protection des Chrétiens d’Orient, sionisme, et panarabisme) les vainqueurs ont tissé un sac d’embrouilles qui dure encore : comment agréger des populations de coutumes et de religions diverses, Kurdes, Arméniens, Turcs, Perses, Sémites, Arabes, Chrétiens, Juifs, Sunnites, Chiites et d’autres encore… ?

"Aujourd'hui, notre monde est plus interdépendant que jamais. Oui, nous devons rechercher la prospérité et des espaces de liberté, mais dans un univers vulnérable où il existe de nombreux points de friction et de non moins nombreux conflits d'intérêts.

"N’oublions pas, qu’en fait, la Grande Guerre a mis fin à la première mondialisation ; que les liens entre les économies et les cultures européennes étaient tels que nombre de contemporains de l'époque jugeaient la guerre impossible, irrationnelle et contraire à leurs intérêts. .. Et, que pourtant, elle a eu lieu.

"La conviction des soldats qui l’ont fait était que, s’ils en revenaient, ils n’oublieraient jamais, absolument jamais.

"Alors pour cette guerre, la profonde, la vraie de vraie, pitié pour ces soldats qui sont morts même s’ils en sont revenus ! Ils n'avaient pas le sang des héros (H.E.R.O.S). Ils ont été des hérauts (H.E.R.A.U.T) de la paix !

"Il est indispensable, désormais, de considérer calmement non seulement nos propres intérêts, mais aussi ceux de nos voisins et partenaires, d'agir de façon responsable et de songer objectivement aux conséquences.

"Les années de la déclaration de guerre de 1914 à l'armistice de 1918 constituent hélas un riche exemple de ce qui arrive quand nous ignorons ces principes.

"Alors, vive l'amitié entre les peuples et les nations, vive la paix dans l'Europe et dans le Monde, et vive la France et sa République !"

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire