14 juillet 2018 6 14 /07 /juillet /2018 15:49

Comme tous les ans, j'ai présidé ce samedi la commémoration du 14 juillet, notre fête nationale. J'ai expliqué, dans un précédent article de ce blog, pourquoi j'ai décliné l'invitation du Président de la République à assister aux belles cérémonies se déroulant sur les Champs-Élysées.

 

Et je ne regrette nullement – loin de là ! – d'être resté à La Seyne pour prendre part aux festivités qui se sont déroulées ce vendredi, à la veille de notre 14 juillet, et sur lesquelles je reviendrai dans un autre article, ni d'avoir vécu le temps fort du défilé et du rassemblement de notre population devant notre monument aux Morts, au cours duquel, après la lecture par deux jeunes Seynois d'un très beau texte écrit dans le cadre des activités de l'association "Adolescent Citoyen Souvenir" en lien avec notre Service Municipal de la Jeunesse, j'ai prononcé une allocution que je livre ci-après...

 

 

« Mesdames, Messieurs,

 

« C’est en 1880 que le 14 juillet est devenu jour de fête nationale.

 

« Ce jour commémore à la fois la prise de la Bastille en juillet 1789 et l’anniversaire de la Fête de la Fédération réalisée le 14 juillet 1790. C’est pourquoi, en rappel de la mobilisation des citoyens venus de toutes les régions de France pour se retrouver au Champ-de-Mars à Paris, les services civils et militaires de défense et de sécurité défilent devant le peuple rassemblé.

 

« Cette fête est le manifeste, réaffirmé chaque année, de trois idées fortes issues de la Révolution.

 

« La première est l’affirmation que l’on naît libre... d’où que l’on vienne.

 

« La deuxième réside dans l’unicité de la Nation, elle est une et indivisible (dois-je préciser que ce principe n’exclut pas la diversité ?...) ; après la Liberté, c’est le volet Egalité.

 

« La troisième idée forte est que la Nation est partage, c’est la Fraternité, dont Jean Jaurès disait qu'elle est "au-dessus de toutes nos paresses, de tous nos égoïsmes".

 

« Ainsi, la Fête de la Fédération célébrait la nouvelle unité nationale fondée non plus sur la religion commune, celle du roi, mais sur la reconnaissance par toutes et tous de ces trois principes fondamentaux de notre République.

 

« Le texte fondateur de 1789, la "Déclaration des droits de l’homme et du citoyen", faisait voler en éclats les liens qui unissaient sous l’Ancien Régime le catholicisme et la société politique.

 

« La Révolution française nous a appris cette vérité : c'est de notre responsabilité que procède notre liberté.

 

« Pourquoi ai-je choisi cet aspect de la Révolution, l'émergence de la laïcité,  que nous fêtons les 14 juillet ?

 

« Pour trois raisons : d’abord, ce sont là les prolégomènes de la "laïcité à la française" : liberté des cultes, égalité de traitement devant la loi, acceptation des différences et donc fraternité.

 

« Ensuite parce que le Président de la République, eût-il tenu un discours devant la congrégation religieuse des Bernardins, et accepté du pape, peu de temps après, le titre de chanoine de Latran, a récemment rappelé devant le Congrès à Versailles ces principes intangibles. Il a souhaité en outre redéfinir le cadre des relations de la République avec les religions, une concorde – pas au sens du Concordat, on doit l'espérer ! – retrouvée dans une culture partagée.

 

« Enfin parce qu’une information, d’une portée mineure au regard du fil de l’actualité dramatique du Monde, a attiré mon attention : le gouvernement du Land de Bavière, en Allemagne, en dehors du fait de poser un ultimatum à la Chancelière sur la question des migrants, a décidé qu’à partir du 1erjuin, une croix figurerait à l’entrée de tous les bâtiments publics. Bien sûr, chaque pays a son histoire, sa constitution. C'est l'affaire des Bavarois. Mais un journaliste français qui a relaté ce fait a commenté : "La Bavière est un pays catholique. Là-bas, pas de laïcité agressive comme en France."

 

« A ces mots accolés, "laïcité" et "agressivité", mon sang républicain a tendu mes artères ! J’ai alors repensé à la réponse qu’avait faite Louis Germain à Albert Camus qui lui avait écrit une lettre hommage après avoir reçu le prix Nobel en 1957.

 

« Camus écrivait ainsi à son vieil instituteur : "On vient de me faire un bien trop grand honneur (…). Mais quand j'ai appris la nouvelle, ma première pensée, après ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j'étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé."

 

« C’est l’hommage d’un homme, distingué entre tous, à son instituteur, promoteur de l’institution républicaine, et à l’école formatrice, émancipatrice, des plus humbles aux bien-nés.

 

« Et Louis Germain répondait à Camus sa fierté, mais je n’extrais que la fin de sa lettre : "(…) Avant de terminer, je veux te dire le mal que j'éprouve en tant qu'instituteur laïc, devant les projets menaçants ourdis contre notre école. Je crois, durant toute ma carrière, avoir respecté ce qu'il y a de plus sacré dans l'enfant : le droit de chercher sa vérité. (...). Lorsqu'il était question de Dieu (c'est dans le programme), je disais que certains y croyaient, d'autres non. Et que, dans la plénitude de ses droits, chacun faisait ce qu'il voulait. (…) Le Canard Enchaîné a signalé que, dans un département, une centaine de classes de l'École laïque fonctionnent sous le crucifix accroché au mur. Je vois là un abominable attentat contre la conscience des enfants. (…) Ces pensées m'attristent profondément."

 

« Vous voyez, je rapproche des événements distants de soixante années. En soi, c’est déjà un questionnement.

 

« Je dois à la vérité de ma relation de ce fait d'actualité la réaction du cardinal Reinhard Marx, archevêque de Munich et Freising, à la décision du Land de Bavière. Je le cite : "on ne comprend pas ce qu’est la croix si on ne la voit qu’en tant que symbole culturel". Il n’a pas hésité à dénoncer "l’animosité, les divisions, les troubles" risquant d'être causés par cette décision.

 

« Nous le savons, le débat est récurrent, et cependant d’une grande actualité. Une actualité qui se préoccupe plus du "supposé signifiant" que de ce qui est réellement signifié. Le moindre signe est sur-interprété. Plus grave, et c’est ce que dénonce l’archevêque de Munich, le signe religieux perd toute signification spirituelle : la foi ne se porte pas au dehors mais au dedans.

 

« Que penser de toutes ces revendications publiques du religieux qui font de la vie spirituelle toute autre chose qu’une relation fondée sur la foi, si la religion ne se manifeste qu’en système de normes (par exemple contre l’avortement, contre le mariage pour tous, pour le port d'un voile, pour des repas spéciaux dans les cantines publiques) et non comme un système de valeurs (comme la fraternité que certains nomment "l’amour du prochain") ?

 

« Le concept de laïcité est interprété différemment selon les personnes et les contextes. Le rapport au religieux n’est pas seul en cause, je pourrai évoquer les concepts émergents de "racisation" ou "d’intersectionnalité" qui poussent à catégoriser l’individu selon son origine, ou sa sexualité, ou sa situation sociale.

 

« De fait, la laïcité, en incitant à la modération dans l’espace public, en imposant la neutralité dans la fonction publique, préserve chacun de l’intolérance, de la manipulation, religieuse ou différenciatrice.

 

« La primauté de la loi de la République sur toute autre loi évite la mise en concurrence des cultes ou des individus. En effet, d’une façon que je crois claire, la laïcité à la française, bien loin d’être agressive – j'en reviens à notre journaliste –, parle de libertés : liberté individuelle, celle du citoyen, liberté de croire ou de ne pas croire, liberté due aux autres...

 

« En cela, la laïcité est dans la continuité de l’esprit des Lumières qui présida à la Révolution. Elle rendit, la première, aux Juifs d’être des citoyens, aux femmes de divorcer, aux esclaves d’être libres. Cela, vous le savez, ne dura hélas pas et dut être réinstauré plus tard, non sans luttes. Rien n'est jamais acquis définitivement. Soyons vigilants.

 

« En tous cas, aujourd’hui, à fêter le 14 juillet comme le rassemblement des citoyens, dans leurs diversités et dans une communauté d’esprit à la française, dans notre défilé et notre rassemblement, ou sous les flonflons ou les feux d’artifices à l'image de celui d'hier soir non loin d'ici sur le Parc de la Navale, nous montrons notre attachement à la République démocratique.

 

« Alors, oui, vive La Seyne libre, égalitaire et fraternelle, Et, oui, vive la France républicaine, indivisible, laïque, démocratique et sociale. »

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
12 juillet 2018 4 12 /07 /juillet /2018 05:03

Ce serait mentir d'indiquer que ça n'a pas été un dilemme. Mais un très bref dilemme, aussitôt posé, aussitôt effacé. Bien sûr, même le plus modeste doit toujours ressentir quelque fierté à recevoir une invitation du Président de la République, en l'occurrence à assister à la cérémonie du 14 juillet sur les Champs-Élysées. Et puis le spectacle en vaut sûrement la peine.

Mais je n'ai pas hésité une seconde. C'est avec les miens, notre fougueuse et attachante population seynoise, qu'est ma place, indiscutablement.

 

NULLE IRRÉVÉRENCE : MA PLACE EST JUSTE AVEC LES MIENS

Le Président de la République – du moins son cabinet – le comprendra : mon choix n'est en rien une manifestation de dénigrement ni d'irrespect – je mesure au contraire à sa juste valeur l'honneur fait aux communes abritant des quartiers populaires fragilisés en conviant à la Fête Nationale le président de « Ville & Banlieue », leur association nationale, que je suis –, mais c'est au cœur du défilé et devant le monument aux morts de La Seyne que je me dois d'être ce samedi.

Ce sera comme chaque année un moment solennel de rassemblement populaire autour des valeurs de notre belle République, traduisant localement notre volonté durable et partagée d'unité nationale. Ce sera également, comme d'habitude, avec la présence d'un détachement des forces de la défense, le rappel du lien indéfectible qui unit nos armées et notre peuple.

 

JE COMPTE SUR NOTRE POPULATION

C'est pourquoi, au-delà des élus, des représentants des associations patriotiques, d'anciens combattants, de résistants, de déportés, de victimes des guerres, de leurs porte-drapeaux, des marins, des soldats, des forces de sécurité et de sûreté, des corps constitués seynois et associations locales, je formule le souhait que notre population, et notamment sa jeunesse, de tous nos quartiers, prenne part en nombre à nos cérémonies qui débuteront à 10 heures, à la Porte de la Rotonde, à l'entrée du Parc de la Navale.

 

QUEL 14 JUILLET ? CELUI DE 1789, OU CELUI DE 1790, OU LES DEUX ?

J'ai tenu à expliquer au Chef de l'État la raison pour laquelle je me dois de demeurer à La Seyne et me résigner à décliner son invitation, dans un courrier où j'évoque le sens que la représentation nationale a voulu donner à cette commémoration annuelle, en instaurant en 1880 le 14 juillet comme jour de Fête Nationale.

Et notamment combien il demeure important pour le maire que je suis de relayer le message fraternel d'unité auprès de mes concitoyens. Et de nos vacanciers aussi, bien sûr, qui auront, je l'espère, profité nombreux des festivités de la veille, le vendredi 13 juillet de 18 heures à minuit passée, dans le cadre de l'événement « La Navale enchantée » !

 

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Vie sociale et ville pour tous Devoir de mémoire
19 juin 2018 2 19 /06 /juin /2018 04:38

Ce fut une cérémonie empreinte de solennité, ce lundi, à l'occasion du soixante-dix-huitième anniversaire de l'appel lancé par le général de Gaulle, devant la stèle installée sur le Parc Fernand-Braudel des Sablettes pour inviter les promeneurs à se souvenir de ce propos invitant les Français à ne pas se résigner et entrer en résistance après la défaite face aux nazis allemands.

Après les beaux textes lus par deux élèves du collège Paul-Éluard, la lecture de l'Appel du 18 juin 1940 par Christian Durand, président du « Souvenir français »,  et la communication, par notre adjoint Christian Pichard, de la déclaration de Madame Darrieussecq, secrétaire d'État, comme à chaque occasion mémorielle, j'ai tenté une nouvelle fois, dans mon allocution, de tirer, pour le présent et au regard de l'actualité les leçons de l'événement commémoré...

 

« Le 18 juin 1940, à 18 heures, un général deux étoiles proclame à la radio depuis Londres : "La France a perdu une bataille, mais n'a pas perdu la guerre".

« Le 16 juin, en apprenant la démission du Président du Conseil, Paul Reynaud, il avait décidé de partir "dès le matin" pour l’Angleterre afin de poursuivre le combat. 

« Le 17 juin, Pétain avait demandé l’armistice. 

« L'appel du 18 juin était un message d'espoir. Il affirmait que la mondialisation de la guerre ferait la victoire. Il se terminait par un appel à la Résistance.

« Que nous dit-il aujourd’hui ? Que refuser ce qui est présenté comme une évidence est parfois d’une rare clairvoyance ; que la vérité ne se révèle que dans les victoires qui durent ; que les victoires ne durent que lorsqu’elles sont justes.

« Le 10 juillet, 80 parlementaires sur 846 (669 se sont exprimés) ont refusé de donner les pleins pouvoirs à Pétain. Bien insuffisant.

« Pourquoi Charles de Gaulle s’est-il opposé à ce Maréchal présenté comme providentiel ?

« Parce qu’il ne se résignait pas à la défaite ; parce qu’il pensait que ce n’était pas celle de la France ; parce qu’il savait que les batailles se gagnent dans le rassemblement et la cohésion des hommes de conviction et de volonté.

« C’est ainsi que des hommes et des femmes de tous horizons, confessionnels ou politiques, se sont assemblés puis ont été rassemblés par Jean Moulin – un préfet renégat à l’ordre régalien du moment – pour résister, pour s’opposer aux nazis, pour préparer la paix, pour élaborer un programme de justice sociale "Les jours heureux »".

« Soixante dix-huit années ont passé…

 

NE JAMAIS SE RÉSIGNER... RÉSISTER

 

« Dans des circonstances bien moins dramatiques qui n'ont évidemment rien de comparable, j’ai lancé il y a quelques mois l’Appel de Grigny. Je n’étais pas seul, des élus, des acteurs économiques et associatifs… des hommes et des femmes de tous horizons, se sont réunis pour alerter suite à une sorte de capitulation de la puissance publique pour nos quartiers urbains fragilisés. Un rapport, commandé au plus haut niveau, beaucoup de travail et… on sait les suites données : un enterrement élyséen des propositions, portées par l'ancien ministre Jean-Louis Borloo, de résistance à l'impact sur les plus fragiles des affres de l'économie dévastatrice du monde d'aujourd'hui…

« On aurait pu se résigner. Or, jeudi dernier, ici à La Seyne, la septième étape des états généraux de la politique de la ville, initiative des arpètes du fameux rapport, s’est tenue sur le thème de la sécurité.

« Qu’avons-nous entendu ? Que la désespérance n’est pas de mise, que le rassemblement, la cohésion, les convictions et les volontés existent ; qu'un infime pourcentage de la population des quartiers populaires sont des voyous, des dealers. Entendez : presque 100% des habitants ne le sont pas, ils aspirent juste à mieux vivre dans la République.

« Or cette poignée occupe tout l’espace politique et médiatique, nourrissant les peurs et justifiant le retrait des services publics. 

« "Que fait la police ? – Ce qu’elle peut, ma bonne dame !" Avec les moyens qui sont les siens… insuffisants.

 

L'INDIGNATION, MOTEUR DE LA RÉSISTANCE

 

« Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à un autre grand Résistant, Stéphane Hessel. Il nous disait "Indignez-vous !".

« Il y a de quoi, à constater que les politiques publiques se décident désormais à l’encan et au moins-dépensant ; à l’aune des bilans comptables.

« Où est le souffle ambitieux et courageux du lanceur de l’appel du 18 juin 40 ?

« On ne nous parle que de "pognon "! Et, de quelle manière, le plus souvent pour nous en priver.

« Oui, c’est une certitude : l’équité, la justice sociale, ça coûte ! La santé, ça coûte ! L’éducation, ça coûte !

« Pourtant, force est de constater : toutes les dépenses ne se valent pas.

« Des milliards sont octroyés ici et les promesses d’emploi ne sont pas mieux tenues là… Pire, on ferme, on licencie et on alloue des millions d’euros au PDG de Carrefour remercié pour ses échecs. "Indignez-vous", disait l'un !"La flamme de la résistance ne doit pas s'éteindre",disait l'autre !

« Le Conseil National de la Résistance, lui, parce qu’il a côtoyé le pire, voulait préparer le meilleur… quoiqu’il en coûte ! Persuadé que les petits ruisseaux font les grandes rivières… à l’inverse d’un ruissellement hypothétique… à trop pomper dans la mer d’Aral on en a fait une étendue désertique. 

« Pour finir, permettez que je paraphrase un aphorisme donné jeudi par une participante. Elle disait : "la prévention est comme le ménage dans une maison, c’est quand on ne le fait pas qu’on se rend compte qu’il est indispensable"...

 

UN DÉFI FACE À L'APPAUVRISSEMENT DES VALEURS ÉTHIQUES

 

« Aussi, je vous dis sans ambages que quand on ne se préoccupe plus de justice sociale, la poussière accumulée finit par attirer la vermine, le chancre s’installe, et le déloger devient de plus en plus difficile. La justice sociale est à l’image du ménage dans une maison : ne pas faire c’est se condamner à terme !

« Agir sur le destin, voilà une autre leçon de l’appel du 18 juin.

« L’espoir que portait Charles de Gaulle était de recouvrer la liberté, aujourd’hui il est de vivre ses aspirations selon ses mérites, sans semelles plombées ni cuillère d’argent… Si nous constatons un appauvrissement des valeurs éthiques, relevons collectivement le défi. Responsabiliser chacun dans une conscience collective, voilà la tâche qui incombe au décideur… avec équité, faut-il le rappeler ?

« Permettre la prise de conscience de ce que l’on est, dans l’environnement qui est le sien, et autoriser les personnes à jouer un rôle social dans le travail et dans la cité est notre devoir.

« Dans ce monde de mouvement, chacun devrait pouvoir, dans la mesure irréductible qui lui appartient, être son propre agent de problématique, de décision et de responsabilité. 

« Résistons aux déséquilibres présentés comme évidents car il est possible de faire autrement dans la paix, le partage, l’éducation, en préservant l’environnement, en retrouvant une humanité trop souvent négligée.

« L’histoire, ce sont les hommes qui la font. Demain, mieux et autrement !

« Juste ce que nous a enseigné, depuis Londres, le général De Gaulle. »

 

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
9 mai 2018 3 09 /05 /mai /2018 05:05

Dans deux ans, trois quarts de siècle se seront écoulés depuis le 8 mai 1945, jour où, a été signée la capitulation de l'Allemagne nazie, que j'ai d'ailleurs, comme d'autres, qualifiée par erreur “d'armistice” dans l'allocution que j'ai prononcée ce mardi devant notre Monument aux Morts.

 

Merci aux nombreuses personnes présentes pour cette nécessaire commémoration : les élus, les associations d'anciens combattants, les cadres de nos forces armées (marine, régiment de transit, gendarmerie), de nos polices nationale et municipale, et de nos sapeurs-pompiers, les jeunes de la Préparation Militaire Marine dont La Seyne est la marraine, ceux du collège Marie-Curie et ceux de l'association Univers Cité, les musiciens de notre philharmonique La Seynoise et ceux de la La Clique Seynoise, et nos nombreux concitoyens et visiteurs présents.

 

Voici donc mon propos...

 

 

« Le 1er septembre 1939, l’Allemagne nazie déclenchait par l’invasion de la Pologne l’une des guerres les plus meurtrières de l’histoire de l’humanité.

 

« Le mois de mai 40 voyait la débâcle des troupes françaises. Dans la déroute, celles qui le pouvaient s’embarquaient pour l’Angleterre. Pétain, Président du Conseil, demandait à l’Allemagne l’arrêt des hostilités et signait l’armistice.

 

« Mais tous les Français n’allaient pas se résigner. Dès le 18 juin, De Gaulle lançait depuis Londres un appel radiodiffusé à reprendre la lutte. Des groupes de résistance s’organisèrent dans chaque région. En mai 1943, Jean Moulin prenait la tête du Conseil National de la Résistance qui coordonnait les différents réseaux. Leur action préparera le terrain aux troupes de libération qui organisèrent en grand secret les deux débarquements, le 6 juin 44 en Normandie, l'opération Overlord, et le 15 août en Provence, l'opération Dragoon. L’épilogue, nous le fêtons aujourd’hui en souvenir du 8 mai 45, jour de la capitulation de l’Allemagne nazie.

 

« Nous retiendrons que, durant ces mêmes mois d’occupation, beaucoup ont entretenu la flamme de l’espérance par leur courage insensé et souvent leurs vies sacrifiées ; et que la haine, la xénophobie, le racisme, ont été dénoncés trois ans après par les nations assemblées dans une Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.

 

« Nous soufflons, cette année, les bougies du 73ème anniversaire de l'armistice de 45.

 

« Mais 2018 est aussi l'année des commémorations : la Ve République fête ses 60 ans et ce sera le centenaire de l’armistice de la Grande Guerre… dont le cinquantenaire fut célébré en 1968… il y a 50 ans !

 

« 50 ans... mai 68 ! Que de fantasmes, d’adhésion ou de rejet. L’expression “fake news”n’était pas de mode et pourtant que de clichés circulent, de la France qui ”s’ennuie“à “la plage sous les pavés”. Plus prosaïquement, le fait est, pour reprendre les mots d’un éditorialiste, “que la nuit, il y avait les yéyés, Johnny et France Gall, et le jour, l’uniforme gris d’une société d’obéissance.”

 

« Il faut bien le dire, enfants de ceux qui ont vu leur jeunesse traverser la guerre de 39-45, pourtant premiers bénéficiaires du Programme du Conseil National de la Résistance, les jeunes des sixties ressentaient la vacuité de cette promesse d’apporter le bien-être par le confort ménager ! Elle rejetait cette vie tracée de trois mots : métro boulot dodo. C’est pourquoi elle s’éclatait dans la musique et brassait, l’air de rien, les idées qui couvaient aussi bien en Californie (the summer of love) qu’à Prague (le socialisme à visage humain).

 

« La réalité est que mai 68 fut un événement sans précédent, à multiples facettes, où l’on s’inquiétait du déclassement des ouvriers et où les étudiants se révoltaient contre le conformisme et l’immobilisme.

 

« Ainsi ce fut, à la surprise générale, une contagion en chaîne, de Nanterre au Quartier Latin, aux universités de province, aux usines, aux administrations. Au total, près de 7 millions de salariés entrèrent dans la grève la plus puissante de l’histoire de France.

 

« Toute la France s’est mise à réfléchir et remise en question. D’un coup, dans les rues, les gens qui ne se connaissaient pas se sont mis à se parler. Ce fut la grève générale, les accords de Grenelle, l'augmentation de 35% du SMIG, rétribution des plus dominés, les femmes et les immigrés.

 

« Pourtant, face à l’autoritarisme, aux notables snobs, aux brimades à l’école, au moralisme du XIXe siècle, au statut rétrograde des femmes, aux violences… il coexistait, paradoxalement, une sociabilité, des liens de solidarité entre les gens de condition modeste, de l’humour, de la gaieté, des chansons, la passion de la vie (soit dit en passant, en l’absence de tout réseau social numérique plutôt âpre à pointer son prochain).

 

« En rompant l’ordre institutionnel, en bousculant les hiérarchies, le projet était de se délester de son identité sociale pour élaborer ensemble le commun.

 

« Pourtant, en mai, rien ne change — De Gaulle passe une journée à Baden-Baden… et l’ordre politique est rétabli —. Rien ne change, mais... tout change, un processus est enclenché qui va bouleverser l’esprit du temps. Naîtront, par exemple, le MLAC pour la liberté de l’avortement et de la contraception, le MLF, des journaux comme ActuelLibération, les mobilisations de Lip ou du Larzac… 

 

« En 68, une jeunesse se découvrait une force politico-sociale. C’était le rejet de l’autorité du monde adulte, qu’elle soit professorale, familiale, ou institutionnelle.

 

« Ne nous leurrons pas, les évolutions des mœurs, les transformations de l’école, le naufrage de l’autorité, auraient eu le même destin sans mai 68...

 

« La mentalité du “tout, tout de suite” s’inscrivait dans l’avant 68 : la libération des mœurs, l’accès au collège, la tutelle diminuée des femmes mariées, l’autorisation de la pilule, la musique émancipatrice, le mouvement pacifiste hippie. Mais il fallait désigner des responsables. Et, pour certains, aujourd’hui encore, c'est rassurant. Vous comprenez pourquoi j'ai évoqué cette période, au-delà de son cinquantenaire...

 

« Parce que, rassurés, 73 ans après le 8 mai 45, nous ne le sommes pas ! Le monde d’aujourd’hui ne nous y invite pas.

 

« Aussi, les 8 mai, au-delà de la commémoration de la victoire des Alliés sur les forces de l’Axe et l’Allemagne nazie, nous voulons célébrer la lutte victorieuse contre des idées monstrueuses de haine et de rejet, qui, hélas, renaissent sans cesse ça et là.

 

« S'il nous faut lutter contre les odieux fanatismes, il ne nous faut céder ni à la phobie de l’immigration clandestine, ni à la paranoïa anti-islam, ni à l’antisémitisme. L’intolérance que nous observons et qui gagne malheureusement les esprits ne véhicule jamais le bien, ni en politique ni en morale.

 

« Face aux dirigeants qui, dans de nombreux pays, en Europe et ailleurs, désignent des coupables, incitent au repli et au rejet, attisent les haines, nous devons crier, comme Athéna le fit dans l’Iliade “Arès, Arès, fléau des hommes, buveur de sang”, et dire à nos enfants ce que Priam dit à Hector “Pour le jeune guerrier qui tombe sur le champ de bataille tout est beau, tout est convenable. Mais la mort, pour un vieillard comme moi, si toi tu succombes, sera horrible”.

 

« Je pense bien sûr aux familles du gendarme Beltrame et des 3 autres victimes de ce fanatique meurtrier, et à tous les oppressés qui subissent les délires de quelques-uns.

 

« Notre moteur doit être l’ambition d’un projet qui s’occupe des hommes et de leur avenir. 

 

« Alors, oui, le 8 mai, devant vous, anciens combattants, porte-drapeau, élus, corps constitués, citoyens, devant les enfants, les adolescents, les jeunes, je rappelle que des hommes et des femmes que rien ne prédisposaient à agir ensemble, issus de partis politiques différents, de convictions religieuses exclusives, de racines sociales, culturelles et philosophiques diverses, parfois adversaires, ont su se rassembler pour la Libération sur des valeurs communes de solidarité, d’entraide, de préservation des libertés. 

 

« Ça s'appelle la République, celle que l'armistice de 45 a réinstallée. Mais ne croyons pas que les idées généreuses qui l’ont portée à l’organisation politique de nos contrées soient définitivement acquises. Au contraire, parce qu’elles se soucient des autres, elles sont fragiles.

 

« C’est pourquoi, elles doivent encore être promues, enseignées, diffusées, défendues.

 

« Vive l’Europe et le Monde des peuples amis, vive la Paix, vive la France républicaine ! »

 

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
30 avril 2018 1 30 /04 /avril /2018 04:20

Soixante-treize ans après la libération des camps de la mort nazis, rendez-vous était pris, comme chaque année, ce dimanche, pour un défilé solennel qui a conduit les élus de notre majorité municipale, les représentants des polices nationale et communale, des forces armées, des anciens combattants, résistants, déportés et victimes des guerres, et notre population, autour de notre monument aux morts pour une commémoration visant à exercer, toujours, notre devoir de mémoire.

Avant que je ne prononce l'allocution que je retranscris ci-après, deux jeunes de lycées seynois ont lu, pour l'une, Priscille Laporte, un fort beau texte du pasteur Marin Niemoller, et pour l'autre, Max Robert, un hommage émouvant à Jean Gallon, instituteur déporté qui brava l'interdiction d'enseigner aux enfants tziganes du camp où ils étaient enfermés.

Ces témoignages de jeunes, après la prise de parole de Jacqueline Bonifay, alerte nonagénaire seynoise ayant survécu à la barbarie de la déportation, furent un moment empreint d'intense émotion. Merci à eux.

Mon propos, donc...

 

« Mesdames, Messieurs,

 

« Depuis dix ans, j’ai l’honneur de prendre la parole, ici-même, afin de renouveler le souvenir de la libération des camps. Au fil des interventions, je me suis donné une ligne de conduite : rappeler encore et toujours que l’impensable peut arriver dans un enchaînement fait de coups de force, d’indifférences, de calculs, de peurs, mais aussi, de l’utilisation légale d’un vote populaire, fût-il manipulé. C’est ainsi que les nazis arrivèrent au pouvoir, parce qu’un peuple, enivré de se croire le plus puissant, s’est laissé abuser et s’est rendu volontairement aveugle.

 

« Le texte dont notre jeune lycéenne vient de vous donner lecture, l’illustre parfaitement.

 

« Hitler est élu régulièrement avec l’appui irréfléchi du capitalisme allemand. Les hommes de la Sturmabteilung (les SA) ont créé les conditions de cette élection par la violence, la peur, la flatterie, la corruption, l’appât du gain. C’est, dès 1933, l’incendie du Reichstag, prélude utile à la proclamation de la "Reichstagsbrandverordnung" qui suspend sine die les libertés individuelles.

 

« Les nazis ne tarderont pas, en 34, à faire payer aux SA cette puissance par une purge lors de la nuit des Longs Couteaux qui n’exclut pas l’assassinat…

 

« Les méthodes expéditives ne s’arrêtent pas là. Sitôt la victoire acquise, même étriquée, les premiers camps d’internement sont installés.

 

« Sont arrêtés les opposants au régime, les dits "asociaux" (homosexuels, handicapés, juifs), tous ceux qui n’entrent pas dans la norme nationale-socialiste, avec comme point d’orgue, en 38, la nuit de cristal, pogrom contre les Juifs.

 

« Avec la guerre, le système concentrationnaire prend une autre dimension et, à partir de 1941, il s’intègre dans la mise en place de ce qu'on a appelé "die Endlösung der Judenfrage", c'est-à-dire la "solution finale de la question juive". Les camps se multiplient en Autriche, en Pologne, en France avec le camp de Struthof. Ils feront plus de six millions de victimes.

 

« La déportation, les camps d’internement, de travail, de mort, resteront à jamais comme la pire des dérives commises par les hommes contre l’humanité.

 

« Je vous disais  à l'occasion d'un précédente commémoration :

 

"Nous sommes rassemblés pour nous souvenir et rendre hommage aux victimes, à ceux qui ont sacrifié jusqu’à leur vie pour combattre le nazisme.

"Nous sommes rassemblés pour combattre ceux qui réfutent les évidences factuelles, ceux qui entretiennent un terreau de haine et d’exclusion.

"Nous sommes rassemblés parce que ce qui importe à de trop nombreuses personnes est ce qui nous différencie.

"Nous sommes rassemblés parce que notre société, devenue plus indifférente, plus égoïste, nous inquiète.

"Partout, aujourd’hui, reviennent les indifférences barbares, les attitudes racistes, l’antisémitisme, le rejet de l’autre."

 

« Comment ne pas évoquer deux événements survenus au mois de mars. L’un par référence à la barbarie et la réponse qu’apportèrent les Justes : le gendarme Arnaud Beltrame a risqué sa vie en sauvant l’otage d’un individu fanatique islamiste (je n’oublie pas que trois autres personnes furent assassinées) ; l’autre à un crime raciste, antisémite, puisque Madame Mireille Knoll fut torturée et assassinée parce qu’elle était juive.

 

« Aussi, je vous propose une réflexion sur quatre points qui, certes pourrait sembler nous éloigner de ce pourquoi nous sommes réunis ce jour, mais qui font débat et sont trop souvent sujets à désinformation. Désinformation, je l’ai dit, première source de dérive, il n’y a qu’à observer ce que fait Viktor Orbàn en Hongrie...

 

« Premier point, sur l’identité, d’abord et parce que je viens de parler de l’islamisme fondamentaliste. Nous ne devons pas céder à l’amalgame, les fascistes musulmans sont minoritaires, gardons-nous de caricaturer tous les autres et de nous caricaturer nous-mêmes. J’emprunte à Sélim, un personnage de fiction d’un roman récent : "Il a aimé la France, à la folie. Son école, ses rues propres, son réseau ferroviaire, son orthographe impossible, ses vignobles, ses philosophes, sa littérature et ses institutions. Mais autour de lui, les Français n’habitent plus la France qui l’a enchanté. (…) Quand ça a commencé, quand il a entendu des Français s’en prendre aux immigrés au son d’un tonitruant « pinard et saucisson », il a fait comme tant d’autres : il a préféré feindre de ne pas comprendre. Tout était dit, pourtant : voilà l’idée qu’ils se faisaient du pays des droits de l’homme. Du vin et de la cochonnaille. Tel est leur grand programme culturel."

 

« Deuxième point, sur la délation. Nous en avons horreur. Le délateur est un cafard. Pas la victime. Quand la dénonciation est une défense de soi-même, elle est un droit : je pense aux femmes agressées qui ne doivent plus hésiter à porter plainte. Mais quand la délation est une volonté de nuire, l’occasion de s’approprier des biens, d’exercer le mal pour le mal, elle est une abomination.

 

« Troisième point, sur l’antisémitisme. Il ne peut être considéré comme une opinion. Ici, dans cette commémoration, c’est une évidence. Faire du mal à quelqu’un pour ce qu’il représente indépendamment de lui-même, au nom d’une idéologie, est une barbarie.

 

« Parce que la confusion des esprits chez certains est grande, il nous revient cependant de dire et d’expliquer : Oui, certains peuvent se prononcer contre la politique de colonisation de l’Etat d’Israël et ne pas être antisémites. Non, on ne peut pas crier impunément "mort aux Juifs" au nom de la cause palestinienne. La haine est un poison.

 

« Quatrième point, enfin, parce que l’actualité persiste, sur les migrants. Gardons-nous de réactiver les oppositions simples et manichéennes entre ceux d’en-bas et ceux d’en-haut, entre ceux d’ici et ceux de partout (nomades et réfugiés), entre les "gens honnêtes" (que nous serions) et les "prédateurs" (que eux seraient).

 

« Parmi ces migrants honnis par certains, nombreux sont ceux qui avaient une situation non seulement honorable mais confortable avant qu’ils ne se résolvent à prendre le chemin de l’exil. La volonté de rester entre soi, de refuser et de rejeter l’étranger n’a rien à voir avec le patriotisme qui est l’amour des siens.

 

« Ces comportements sont aux antipodes d’une organisation sociale, politique, qui cherche, par la réflexion de tous, par la discussion, à se connaître et à comprendre les éléments constitutifs de la condition commune qui permettent des choix pertinents et collectifs, tout en rendant possible l’exercice des droits individuels.

 

« Ne baissons pas les bras et réaffirmons, avec force et conviction, que nous défendons une France laïque, où la liberté de conscience, la liberté de penser et la liberté d’exprimer des opinions dans le respect des lois est inscrite dans la Constitution.

 

« Notre République s’est donné les outils juridiques protecteurs. Faisons appliquer ses principes, partout et par tous. Ne dévoyons pas les vertus laïques, éduquons les citoyens, rejetons la tentation des communautarismes où les identités se consolident les unes contre les autres.

 

« L'écrivain Le Clézio écrit dans une tribune : "Prenons garde à ne pas dresser autour de nous des frontières mentales encore plus injustes que les frontières politiques".

 

« Pour conclure cette célébration contre l’oubli : Que devons-nous faire du passé ? Eh bien, se soucier du présent !

 

« Vive l’Europe et le Monde des peuples amis ! Vive la France de la République, de la laïcité et de la démocratie ! »

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
19 avril 2018 4 19 /04 /avril /2018 05:02

Les Seynois, et les Saint-Elmois en particulier, j'en suis certain, ne me donneront pas tort. J'ai formulé un avis favorable au projet de la Marine nationale de mettre l'un de ses bâtiments de la forêt littorale du Fort Saint-Elme à la disposition de la fondation catholique des « Apprentis d'Auteuil », association d'utilité publique agréée par l'État, pour y assurer l'accueil d'une quarantaine de mineurs migrants isolés.

La Seyne a toujours été une terre d'accueil pour ceux qui ont dû fuir leurs pays de misère ou de guerre. Elle ne faillira pas en ce XXIe siècle où la route demeure longue vers la fraternité universelle.

 

UN SITE LITTORAL EXCEPTIONNEL À PROTÉGER ET VALORISER

La Marine nationale veut mettre en vente cette colline littorale que nous avons réussi, par les révisions de nos plans d'urbanisme, à sanctuariser et sauver de l'urbanisation mortelle qu'elle aurait pu connaître. Les militaires l'ont désormais désaffectée et, sans maintien d'une présence générée par une activité, Gilles Vincent, maire de Saint-Mandrier et vice-président de la métropole chargé de l'environnement, et moi, craignons des intrusions et des risques d'incendie qui pourraient être fatals à ce bel espace boisé à cheval sur nos deux communes.

Si le Conservatoire du littoral, que nous avons saisi pour élaborer un projet de gestion partagée avec nos communes et notre métropole, comme c'est le cas depuis quelques années au Domaine de Fabrégas, a d'ores et déjà acquis la partie mandréenne de la forêt, les négociations s'avèrent plus ardues avec la DMPA du Ministère des Armées qui, souhaitant réaliser le maximum de profit sur la partie seynoise du domaine, semblerait prête à vendre au plus offrant, y compris à quelque riche investisseur privé désireux de posséder une magnifique propriété littorale, même si j'ai placé tous les verrous administratifs interdisant les constructions et protégeant l'espace boisé classé.

 

L'ACCUEIL DE MINEURS ISOLÉS : UNE OPPORTUNITÉ À SAISIR

Mais les échanges continuent et, fussent-ils longs, nous ne désespérons pas de parvenir à une solution de compromis qui conjuguerait une partie des objectifs financiers de la Défense et ceux de notre territoire, dans le but, comme nous l'expliquions en 2015 à Var-matin (cliquez sur l'article ci-contre pour l'agrandir) de préserver, valoriser et ouvrir la forêt au public, rétablir la liaison piétonnière littorale entre Saint-Elme (La Seyne) et Saint-Asile (Saint-Mandrier), maintenir l'action d'insertion conduite par l'association Tremplin, et entreprendre un chantier d'insertion durable pour la réhabilitation du fort historique comme cela a été fait au fort de l'Éguillette (photo ci-dessous).

Cela permettra en outre, sur la partie occidentale jouxtant le port de Saint-Elme, le maintien des activités des associations nautiques qui, dès 2019, devront libérer les espaces nécessaires à la réalisation d'un chenal d'avivement indispensable pour empêcher l'ensablement et l'amas des posidonies qui, chaque année, engorgent notre charmant petit port.

En ces circonstances, l'accueil à Saint-Elme des malheureux jeunes migrants isolés, outre la belle œuvre humanitaire dont La Seyne sera fière, permettra de prendre le temps de poursuivre les échanges avec le Ministère des Armées sans crainte de dégradations pouvant s'avérer irrémédiables pour ce site naturel et patrimonial qui, sans cela, aurait été laissé à l'abandon.

Amis Seynois, faisons donc nôtre la devise des « Apprentis d'Auteuil » : La confiance peut sauver l'avenir.

 

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3 janvier 2018 3 03 /01 /janvier /2018 06:40

La plupart avaient 20 ans.

Ceux qui ont été sauvagement assassinés dans le froid matin du 2 janvier 1944.

Et les barbares qui les contraignirent à creuser eux-mêmes la fosse où ils allaient les exécuter.

La plupart, les 75 criminels comme la dizaine de martyrs, étaient des Français.

 

UNE JEUNESSE FANATISÉE FACE À UNE JEUNESSE HUMANISTE

Les uns de ces jeunes hommes, les barbares, presque tous nationaux de chez nous, engagés volontaires dans la 8ème compagnie du 3ème régiment de la division allemande Brandenburg, brutaux et sans scrupules, étaient principalement des militants d'extrême-droite auxquels s'étaient agrégés des truands du milieu marseillais, des égarés et des paumés dont certains fuyaient le service du travail obligatoire, jeunes hommes du cru dont certains parlaient provençal, capables de se fondre sans uniforme dans la population locale pour localiser, traquer, tabasser et exécuter les partisans et résistants, et ceux qui les aidaient.

Les autres de ces jeunes hommes, les martyrs, également nationaux de chez nous, à l'exception d'un officier de l'aviation italienne, que les convictions ou les circonstances avaient conduits à refuser la soumission et la collaboration avec l'occupant nazi, s'étaient engagés dans le maquis des Francs tireurs et partisans, et avaient installé un camp discret sur les hauteurs de Signes, à la ferme de la Limatte.

De là, ils effectuaient des coups de main contre l'ennemi, notamment sur le littoral varois, le déstabilisant par l'intérieur en vue du débarquement allié de Provence.

Des jeunes gens de France ont torturé et exécuté d'autres jeunes gens de France, et aussi des villageois, coupables d'avoir dignement enterré ces derniers.

 

UN COMBAT PLUS QUE JAMAIS D'ACTUALITÉ

Avec Toussaint Codaccioni, ancien maire-adjoint seynois, et Christian Pichard, notre actuel adjoint délégué, entre autres missions, aux anciens combattants, nous étions ce mardi comme chaque année à la commémoration du massacre de Signes, avec le préfet, les anciens combattants, et les représentants des armées et corps constitués, parmi d'autres élus varois et bucco-rhodaniens (mais, étrangement, cette fois-ci, en l'absence de tout parlementaire).

Rappelant l'atroce affrontement entre deux jeunesses aux idéaux antagonistes qui, peut-être, pour certains, les dépassaient, les uns nationalistes fanatiques de l'extrême-droite, les autres humanistes, républicains et patriotes, le professeur Jean-Marie Guillon, dans un discours poignant, a rappelé que « le combat de Signes est plus que jamais un combat d'actualité ».

 

(R)APPELONS LES JEUNES À UNE INSURRECTION PACIFIQUE

Cette référence aux dangers d'aujourd'hui de tous les nationalismes, de tous les fanatismes et de toutes les radicalisations, qui font des ravages dans notre jeunesse française, européenne et mondiale, m'a remémoré l'Appel adressé en 2004 par des Résistants de 39-45 aux générations d'aujourd'hui et de demain, dont je crois devoir livrer un extrait...

« Au moment où nous voyons remis en cause le socle des conquêtes sociales de la Libération, (...), nous appelons les jeunes générations à faire vivre et retransmettre l'héritage de la Résistance et ses idéaux toujours actuels de démocratie économique, sociale et culturelle. (...) »

Et la conclusion...

« Nous appelons les enfants, les jeunes, à une véritable insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent à notre jeunesse que la consommation marchande, le mépris des plus faibles et de la culture, l'amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous. (...) Plus que jamais, à ceux et à celles qui feront le siècle qui commence, nous voulons dire avec notre affection : "Résister, c'est créer. Créer, c'est résister." »

C'était il y a presque quinze ans. Qu'est-ce que les jeunes de 2004 devenus des hommes et femmes adultes ont retenu de cet appel ? Quel avenir s'offre à notre jeunesse à l'aube de 2018 ? Celle d'aujourd'hui répondra-t-elle, enfin, à l'Appel ? Sommes-nous prêts à l'y aider ?...

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Idées et politique générale Devoir de mémoire
12 novembre 2017 7 12 /11 /novembre /2017 09:11

Il y a cent ans, le Monde entrait dans la dernière année d'une guerre qui aura occasionné environ vingt millions de morts et mutilés.

Nous avons commémoré ce samedi le quatre-vingt-dix-neuvième anniversaire de l'armistice du 11 novembre 1918 qui mettait fin au plus ravageur des conflits qu'avait jusqu'à lors connu l'humanité.

Une guerre dévastatrice, mais qui a ouvert des portes vers les temps de l'avenir.

Et, comme il est d'usage, j'ai prononcé une allocution devant notre monument aux morts...

 

« Il y a cent ans, l'année 1917 aura été une période clef de la Grande Guerre.

« En janvier 17, le président américain Woodrow Wilson réaffirme la volonté de son pays de ne pas s’engager. Il renvoie les belligérants dos-à-dos et propose « une paix sans victoire ». Mais il ne sait pas que le Kaiser Guillaume II, sous pression du blocus anglais, a autorisé la reprise de la « guerre sous-marine à outrance » : les « U-boote » ont ordre de couler tous les bateaux qui font route vers les ports britanniques, y compris les neutres.

« En décembre 17, est signée l’armistice entre l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et la Russie.

 

« Et, entre janvier et décembre 1917, il y aura eu trois faits qui marqueront bien sûr la guerre, mais aussi le siècle à venir, et sûrement le nôtre, le XXIe, pour bien des années encore...  

- les deux révolutions russes ; le Tsar abdique sous la pression de la rue. Il entraîne son empire dans sa chute et ouvre la voie à une Russie nouvelle qui poursuit la guerre quelques mois.

- l’entrée des Etats-Unis dans le conflit en avril car, outre les attaques contre les navires américains, les Allemands commettent l’impair de tenter de monter le Mexique contre leurs intérêts. L’Amérique rompt alors avec l’isolationnisme qui était la règle depuis l’indépendance.

- et la déclaration de lord Balfour, le ministre des affaires étrangères britannique, en faveur d’un « foyer national juif » en Palestine, sur laquelle je reviendrai.

« Et donc, en avril, les Américains entrent dans le conflit. Leur rôle sera décisif mais il faudra attendre des mois pour voir débarquer en France les premiers « sammies », nom que les Français donnent aux enfants de l’Oncle Sam.

« Durant ce même printemps, alors que la guerre dure depuis trois ans, dont trente mois d’immobilité, le front français est secoué par une vague de mutinerie. Après l’échec de l’offensive Nivelle au Chemin des Dames, en avril, des milliers de soldats refusent de « remonter aux tranchées ». Le mouvement est massif : 30 000 à 40 000 soldats impliqués. Pourquoi ? Parce que le champ des possibles s’ouvre en cette année 1917, les événements se succèdent, dont les grèves de femmes — je vais vous en dire un mot —, les horizons changent !

« D’ailleurs le même phénomène s’observe dans plusieurs autres pays, en Italie, les paysans ; en Russie, l’armée, officiers compris ; en Allemagne, les marins d’origine ouvrière sur fond de lutte des classes ; dans l’empire ottoman, les clivages entre turcs et arabes se révèlent.

« Et, en effet, en échange d’une révolte contre les Ottomans, des promesses ont été faites à Hussein, le Chérif de la Mecque. Ce sont alors les accords entre le Britannique Sykes et le Français Picot. Ils tracent sur la carte une ligne qui dessine les futures zones d’influence : Syrie et Liban pour la France, Irak et Iran pour les Anglais.

« Pourtant, en novembre, de façon totalement contradictoire, le gouvernement britannique, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, s’engage dans une déclaration écrite en faveur de l’installation d’un « foyer national pour le peuple juif » en Palestine. Ainsi, dans ce partage, le statut de la Terre sainte, et surtout celui de Jérusalem, reste dans une zone grise… car il est soumis à deux promesses pour un seul territoire ! On sait aujourd'hui ce qu’il adviendra…

« L’hiver 1917 marque un net durcissement de la vie quotidienne. Ainsi, à l’arrière, les femmes osent, pour la première fois, réclamer l’égalité salariale avec les hommes. Ces derniers sont partis au front, les usines sont remplies d’ouvrières qui assurent l’économie de guerre.

 

« En 1917, 430 000 femmes travaillent dans les usines d’armement. L’hiver est le plus froid de la guerre – la Seine est prise dans les glaces, les températures restent sous zéro jusqu’en avril.

 

« Tout est parti de 250 couturières qui apprennent que la paye de leur semaine sera amputée du samedi après-midi. Travailler autant et être moins payé ! Trop c’est trop, l’interdit moral saute : elles feront grève en temps de guerre !

 

« Pourquoi ? Parce que l’effort demandé est injuste : elles subissent des cadences infernales qui les forcent à prendre leur « dînette » de midi sur le pouce – elles resteront d'ailleurs dans les mémoires sous le surnom de « midinettes » -  mais, de plus, à perdre une demi-journée de salaire !

 

« La fièvre gagne la province, surtout les usines d’armement. Ce sera déterminant avec la simultanéité des mutineries, de la révolution russe… Les midinettes sèment la panique : le 29 mai, la Chambre des Députés vote la semaine anglaise dans les industries du vêtement, le samedi après-midi est chômé et payé. L’égalité salariale, elle, attendra. Et elle attend toujours...

 

« Il faut savoir — je m’adresse en particulier aux jeunes des collèges Wallon et Eluard, je les remercie de leur présence —  que les femmes, dans leurs combats, partent de très loin. En effet, les manuels de bonne conduite d'il y a cent ans établissaient qu’une femme se devait d’être discrète lorsqu’elle se trouvait dans une rue. Celles qui marchaient rapidement étaient soupçonnées de mauvaise éducation, tout comme celles qui parlaient à voix haute ou agitaient les bras loin du corps. Il était, bien entendu, hors de question de sortir sans avoir la tête couverte. Seules les filles perdues sortaient, comme on disait... « en cheveux ». À méditer...

 

« Avec l’agitation sociale, si j’ose dire « le ver est dans le fruit » ou encore, si je fais référence à l’expression attribuée à Jaurès sur le libéralisme, « le poulailler libre commence à s’organiser en regard du renard libre ».

 

« Ainsi, c’est avec la Grande Guerre qu’il est envisagé une définition des valeurs d’une société fondées sur la solidarité, l’entraide, le vivre-ensemble et le souci de la planète… Un siècle plus tard, nous désespérons toujours d’y arriver !

 

« Le néolibéralisme proclame toujours qu’il n’y a pas d’alternative à la spéculation financière. La planète n’en peut plus, les masses souffrent…

 

« Si nous n’y prenons pas garde les inégalités économiques, les problèmes climatiques, feront notre linceul aussi sûrement que la boue ravagée des tranchées.

 

« Les droits de chacun à se nourrir convenablement, à se loger dignement, à se déplacer utilement, à s’ouvrir au monde richement, à vivre en paix, sont, encore et toujours, les aspirations des peuples.

 

« En 1917, cette espérance aidait à supporter l’insupportable…

« Voyez, en cette année 1917, les bases d'un monde nouveau étaient en gestation.

« Bien entendu, fin 1917, rien n’est joué. En prenant le pouvoir lors de la révolution dite « d’Octobre » (qui a eu lieu en novembre), Lénine et les bolcheviks ont recentré leurs intérêts, ils signent un armistice, libérant le front de l'est. Soulagé, Berlin jette toutes ses forces à l’ouest…

« Mais c’est en novembre également que celui qu'on appelait « le Tigre » revient aux affaires, à 76 ans, avec pour ligne de conduite la guerre à tout prix. Clémenceau, sénateur du Var, possède une détermination sans faille.

« Il réclame une confiance aveugle, le secret des délibérations. A la chambre des Députés son programme est simple « Politique intérieure, je fais la guerre ; politique extérieure, je fais toujours la guerre ». On le traite de despote ? Il hausse les épaules et menace de remettre sa démission. Il gagnera le surnom de « Père la Victoire ».

« C’est aussi en 1917 que sont développées de nouvelles armes mobiles, les blindés. Des chars d’assaut dont le plus gros prototype, le C2, sera conçu et fabriqué ici même, à La Seyne, dans nos anciens chantiers, les FCM... les Forges et chantiers de la Méditerranée. Il sera testé à Janas et sur la plage des Sablettes… mais ne sera livré qu'après la fin de la guerre !

« Et il faudra encore attendre une année pour que cesse le carnage mondial.

« En ce jour de commémoration, c'est à environ 3 millions de Français, parmi les 20 millions de morts et d'invalides, que nous rendons hommage. Ils furent souvent tués ou meurtris dans des conditions atroces, et je laisse en leur mémoire la conclusion à l'un d'eux, le sergent Duval : « … La nuit arrive et nous nous couchons allongés dans le boyau, sur la terre. Il fait froid et pour comble de malheur il se met à pleuvoir. La terre crayeuse se met à fondre en ruisseaux blanchâtres et, au bout d’une heure, nous ne sommes plus que de pauvres loques boueuses et grelottantes. Enfin le jour morne commence à paraître… Le  [canon de] 75, rageur, hurle par rafales… »

« Souvenons-nous, toujours.

« Vive la France de la République. Vivent les couleurs arc-en-ciel de l'Europe et du Monde des peuples amis. Vive la Paix ! »

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire
27 août 2017 7 27 /08 /août /2017 03:37

C'est inhabituel que j'y prenne part. C'est d'ordinaire Raphaële Leguen, notre Première Adjointe, qui préside la cérémonie de commémoration de la libération de La Seyne, survenue le 26 août 1944, non que j'estime devoir bouder ce moment fort de la vie communale, mais simplement parce que, nous répartissant entre élus nos temps de congés, c'est usuellement mon tour en cette deuxième quinzaine d'août. Sauf cette année, soixante-treize ans après que les nazis ont été chassés de chez nous.

Sous un soleil de plomb, après avoir honoré, devant la stèle apposée au boulevard du 4 septembre en leur mémoire, les trois policiers seynois résistants fusillés quelques jours avant la libération de notre cité, puis parcouru en défilé solennel les quais de notre port, j'ai prononcé une allocution. Je la livre aux visiteurs de mon blog, illustrée des fort belles photos qu'Isabelle Servais m'a aimablement offertes.

 

« Jeudi dernier, l’Espagne, la Catalogne, Barcelone, ont été le théâtre meurtrier d’actions terroristes. Des gens de tous âges sont morts ou ont été blessés parce le fanatisme ne veut faire aucun discernement ! Rendons leur hommage…

 

« Dans l’esprit des Alliés, le débarquement en Provence est la suite nécessaire de celui de Normandie. Les premiers objectifs sont les ports de Toulon et de Marseille pour l’approvisionnement des armées de libération.

 

« On l’a vu, c'est à la 1ère armée française, commandée par le général de Lattre que reviendra l’honneur de s’engager la première. Cette armée d’Afrique, composée des forces ayant rejoint la France libre, de la Légion étrangère, des Zouaves et des Tirailleurs, fit feu de tout bois.

 

« La 1ère Division Française Libre, les Marsouins de la 9ème Division d’Infanterie Coloniale, la 3ème Division d’Infanterie Algérienne, le groupe naval d’assaut, les commandos d’Afrique, débarquent le 15 août dans le golfe de St-Tropez, dans la baie de Cavalaire et au Cap Nègre.

 

« Leur volonté farouche fera mentir les prévisions. Les libérations interviennent avec des  semaines d’avance.

 

« Les combattants de l’ombre, descendus de leurs maquis, avaient préparé le terrain.

 

« Le territoire de La Seyne, comme il a été décrit précédemment, est donc libéré le 26 août. Le port et les chantiers navals étaient un enjeu et donc une cible. L’ennemi se livra aux destructions des infrastructures de manière à ralentir les futurs approvisionnements arrière.

 

« A La Seyne, les troupes allemandes s’ingénièrent à réduire à néant toutes les installations portuaires : quais, grues, machines, ateliers, entrepôts, cales de lancement... Le 17 août, ce que les bombardements des Alliés n’avaient pu faire pour gêner la Kriegsmarine, elles allaient le réaliser en quelques heures.

 

« Les mines ruinèrent la construction navale pour plusieurs années. Seul, le pont basculant, fêté cette année de belle manière pour ses 100 ans, est miraculeusement épargné. Enfin... façon de parler, car sa sauvegarde fut l'œuvre de résistants agissant au sein de l'entreprise...

 

« Nous devons la libération de notre ville à la 9ème Division d’Infanterie Coloniale, partie de la "merveilleuse" armée d’Afrique, ainsi que la qualifia le vice-amiral Giraud le 14 juillet dernier alors qu’il remettait la Légion d’Honneur à l’un de ces libérateurs seynois.

 

« Comment imaginer que cette armée composée en grande partie de troupes disparates fût si efficace, si enthousiaste, si solidaire, qu’elle obtînt le respect du haut commandement allié ?

 

« Au regard de ce qui s’est passé la semaine dernière, parce que Barcelone se revendique ville cosmopolite et ouverte, mais aussi parce que, le 12 août, à Charlottesville aux Etats-Unis, un activiste raciste a foncé sur des contre-manifestants, cette armée constitue une référence : celle des bienfaits de la diversité et du volontarisme, que, ramenée à nos jours, je souhaite évoquer.

 

« Depuis près de 10 ans, l’Union Européenne, traverse une tourmente inédite par son ampleur.

 

« Sa dernière traduction - hors terrorisme -, le Brexit, est le signe que, dans les opinions publiques européennes, le nationalisme de rejet est actif. Dans plusieurs Etats, des partis qui prétendent redonner au peuple la parole et la souveraineté, sont de plus en plus populaires. Ils en appellent à une essence nationale, unique et irréductible, à une seule communauté politique valable selon eux, celle du "peuple national", à préserver des agents dissolvants ou métissants qui, soi-disant, la menaceraient.

 

« Ce populisme souverainiste, souvent cocardier et excluant, progresse dans les urnes des pays de l’Union. On voit bien comment la xénophobie, l’islamophobie ou l'antisémitisme, comme le thème du retour à la matérialité des frontières, inspirent les mesures de contrôle, de surveillance, sécuritaires et patriotiques, et d’érosion des libertés publiques.

 

« Ainsi pour un certains nombre d’Européens, l’espoir réside dans une communauté nationale restaurée, protégée qu’elle serait d'influences allogènes et extérieures trop différentes de son essence et de ses valeurs supposées.

 

« Cette hiérarchisation autorise non seulement le mépris, mais aussi le sentiment de supériorité au nom duquel on peut tout aussi bien déshumaniser et asservir que, prétendument, civiliser et dominer.

 

« La colonisation et la guerre de conquête d’antan ont cédé la place à l’entre soi.

 

« Pourtant, c’est un constat, l’Europe née de la seconde guerre mondiale a voulu se transformer en espace politique de paix.

 

« C’est rare et attractif dans la réalité géographique du monde tel qu’il est. On pourra toujours se dire que l’Europe est imparfaite. Elle l'est. Comme le sont les hommes…

 

« Et c’est bien pourquoi, en la défendant, nous devons l’améliorer. Mais cette vision, d’absence de frontières et de paix, ne peut pas s’imposer si les politiques européennes jouent contre les peuples – non pas les peuples au sens d’essences nationales, mais au sens des communautés sociales et solidaires.

 

« Elle ne peut s’imposer que si elle contribue à donner à chaque individu, à chaque communauté sociale, et à chaque communauté politique nationale, l’assurance et la perspective d’une égale dignité et d’un avenir prometteur. Sans cela, le sentiment du déclin devient l’horizon. Et la communauté excluante, la perspective.

 

« Oui, on est loin d’une réalité sans défaut. Par le passé - nous fêtons une libération survenue il y a 73 années -, nous avons connu notre lot de dictateurs et autres idéologues sanguinaires.

 

« Ils ont imposé à l’ensemble de la société des règles strictes de renoncement à tout ce qui pourrait divertir le peuple de ses devoirs sacrés envers Dieu ou le Parti.

 

« Ils ont eu l’obsession de la pureté, qui a conduit à "l’épuration”, au refus de la différence, à la volonté d’éliminer les intellectuels et les artistes irréductibles. Et ça n'est pas fini : pensons à l’exemple récent de Liu Xiaobo, entre autres...

 

« Enfin, ils prônent l’éradication de l’art et de la culture, qui pourraient développer l’esprit critique, et aussi et surtout l’enrôlement de la jeunesse.

 

« Ainsi, récemment, le 11 juin 2014, "l’Etat" Islamique promulguait une charte régissant la vie : elle impose, entre autres, le voile intégral aux femmes et l’habit dit “afghan” aux hommes, le port de la barbe, sa longueur et sa taille.

 

« Cible privilégiée de ces radicaux, les enfants, surnommés les “lionceaux du califat”, sont embrigadés dès l’âge de 6 ans pour en faire des soldats ou des terroristes.

 

« Et, le pire n’est jamais loin, les femmes et les enfants des terres conquises sont considérés comme “butins de guerre” et vendus sur les marchés.

 

« Non, décidément, nous sommes loin de nos idéaux des “Lumières” !

 

« Je disais, le 14 juillet, que “la liberté ne se réalise que par l’égalité” ; j’ajoute avec Rousseau que “seule une égalité en droit entre les hommes [et les femmes] peut assurer le règne conjoint de la liberté et de la sécurité”.

 

« Mais ne soyons pas pessimistes. Aussi étonnant que cela puisse paraître, le monde est plus pacifique au XXIe siècle. Depuis la fin de la guerre froide, il y a eu moins de guerres ; en France, moins d’homicides.

 

« Parallèlement, la culture de la paix progresse et, si on en croit Kant, “les êtres humains sont mauvais par nature mais raisonnables”.

 

« Il s’agit donc de revenir aux principes énoncés par les Conventionnels de notre Révolution française : concilier le “droit à l’existence”, “l’égalité des jouissances” avec le respect de la propriété privée, s’engager dans la formation d’un “homme nouveau”, allant vers le “bonheur commun”, une “idée neuve en Europe” disait Saint-Just en 1794, et j’ajouterai “dans une société laïque”, gage de tolérance.

 

« Pour conclure, je n’oublie pas que des populations souffrent, que la guerre sévit encore dans bien des endroits du monde et que l’actualité est désespérante.

 

« Alors, même si les temps économiques sont rudes, si les efforts qui nous sont demandés s’accroissent, si notre solidarité est toujours plus sollicitée, si notre travail d’acceptation des autres et de leurs différences est à parfaire… il ne faut pas bouder notre présent, ici et maintenant.

 

« Les destructions de la libération, 65% de notre ville, sont dépassées. Nous vivons en paix, dans des conditions enviées, dans une ville qui se renouvelle et qui avance !

 

« Les hommes ne peuvent faire et maintenir la paix entre eux que s’ils cultivent en eux-mêmes l’esprit de paix, de tolérance, de compassion. C'est le message que nous ont légué nos libérateurs.

 

« Honneur, donc, à eux, ceux de la 1ère Armée française libre, comme ceux des groupes de résistance et des Forces françaises de l'intérieur, qu'ils demeurent aujourd'hui des nôtres ou qu'ils aient donné leur vie pour la France et la Liberté.

« Et que vive La Seyne, libre, diverse, et ouverte, dans la France de la République et dans le Monde de l'amitié entre les peuples ! »

 

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire Idées et politique générale
16 juillet 2017 7 16 /07 /juillet /2017 16:09

Que ce soit il y a trois jours, à l'occasion de la Fête Nationale, ou ce dimanche pour l'hommage rendu aux victimes des crimes racistes et antisémites de l'État Français et aux Justes de France, il est des orateurs qui ont été bien plus applaudis que les « officiels » (dont je fais partie...).

 

Ce sont les « ados » de l'Espace Accueil Jeunes (EAJ) municipal « Jules Renard » du quartier Berthe qui, dans leurs temps libres, et avec juste ce qu'il a fallu d'appui de la part de Romain Wencorzewski et Jérôme Diadio, leurs animateurs du Service municipal de la jeunesse que dirige Morad Yacoub sous le pilotage de Makki Boutekka, notre adjoint à la jeunesse, ont rédigé deux textes qu'ils ont lus à plusieurs voix.

 

Ça ne leur vaudra peut-être pas tout de suite le prix Nobel de littérature, mais je tiens à saluer leur initiative et leur performance en m'autorisant à publier leurs écrits fort bellement déclamés dans la solennité de ces moments de mémoire.

 

Et à leur dire un grand merci. À eux (et à leurs animateurs communaux). Et à tous les autres jeunes Seynois qui, demain, pourront, je l'espère, s'avancer sur les traces qu'ils ont initiées, pour attester que l'effort de mémoire et d'éveil des consciences n'est pas le seul apanage des « vieux » que nous sommes et nous rassemblons par habitude autour de nos stèles commémoratives...

 

 

14 JUILLET : LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ

 

Oyez ! Oyez !

 

Liberté, Egalité, Fraternité,

 

Hier, pour que l'on vote, des gens sont morts.

Aujourd'hui l'abstention bat des records.

Le peuple se souleva pour ne faire qu'un 
Nord,

Sud, Est, Ouest, avançant avec le bonnet phrygien.

Marianne nous guidant sur le chemin.

 

Liberté, Egalité, Fraternité,

 

Bleu, Blanc, Rouge,

Fiers de notre drapeau, qui nous représente,

Qui nous unit, malgré nos différences.

Notre hymne national est un chant révolutionnaire,

Rempli d'histoire, qui a construit la France.

En août 1789, la déclaration des droits de l'homme et du citoyen vu le jour,

Proclamant la liberté et l'égalité entre tous, sans aucune distinction.

 

Liberté, Egalité, Fraternité,

 

Aujourd'hui nous avons un message à faire passer.

Il y a des siècles, des combats ont été menés

Pour qu'aujourd'hui nous ayons les mêmes droits.

Respect et tolérance, voici des valeurs que nous défendons.

Liberté, Egalité, Fraternité,

Aujourd'hui nous rendons hommage aux héros de la Nation.

 

 

 

JUSTE UN FRANÇAIS FACE À UN FRANÇAIS JUSTE (DIALOGUE)

 

— Juste un Français :

 

« J'ai la haine, j'ai la haine contre moi-même.

Mon cœur se meurt

car c'est rempli de peur

que je n'ai pas su défendre mes valeurs.

J'ai perdu la foi,

je ne me vois plus dans le miroir,

dans ce long couloir,

je me sens seul et sans espoir.

À vie ce sera gravé dans ma mémoire,

j'ai envoyé mon voisin à l’abattoir.

Comment as-tu pu faire preuve d'autant de dévotion ?

Toi qui, comme eux, risquais les camps de concentration.

D'où te vient cette force, ce courage

qui a même dépassé les limites

de la solidarité et du partage ? »

 

— Un Français Juste :

 

« Écoute, tu n'as pas à t'en vouloir

car en venant me voir

pour m'exprimer ton mal-être,

cela prouve que, malgré tout, tu restes fort et honnête.

Maintenant tu sais ce qu'il faut faire,

ce qu'il faudra faire.

On ne peut plus laisser des gens

être déportés dans les camps

parce que soi-disant

ils sont différents.

Division, haine, rage,

l'ennemi veut nous séparer.

Union, amour, courage,

nous devons rester soudés.

Être juste ce n'est pas si compliqué.

C'est seulement être humain,

avoir du cœur et ne jamais oublier

notre fraternité.

Ce n'est pas qu'une question d'altruisme,

c'est surtout pousser l'humanité

à son paroxysme. »

 

 

D'autres ados de l'EAJ de Berthe, en avril 2016...

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Éducation - enfance - jeunesse Devoir de mémoire