Var-matin a récemment publié l'historique des projets qui se sont succédé depuis 30 ans pour tenter de résoudre la difficile question de la traversée routière nord-sud de La Seyne par le goulet d'étranglement du port.
Chaque candidat aux élections municipales y est en effet allé de sa proposition, plus ou moins réaliste car plus ou moins intégrée dans le paysage urbain et portuaire, plus ou moins règlementairement faisable (on est dans une rade militaire et une zone patrimoniale protégée...), et plus ou moins financièrement concrétisable.
Avec un projet de pont, récemment devenu un tunnel, l'alternance politique seynoise de 2020 a remis en question un programme que la Métropole Toulon Provence Méditerranée avait pourtant arrêté, pré-budgétisé et pré-programmé dans le calendrier prévisionnel du "Nouveau programme national de rénovation urbaine" des centres-villes de Toulon et La Seyne. C'était un élargissement des quais.
C'est bien dommage. Mais rien n'interdit de revenir à la raison.
IL EXISTE DEPUIS 2019 UN PROJET RAISONNABLE DE TRAVERSÉE DU PORT
Oui, ce qui avait été une chimère pouvait devenir réalité. Après une étude de plus d'une année portée par la Métropole qui, il faut le rappeler, est seule compétente en matière de voiries et de rénovation urbaine, un avant-projet a été finalisé le 27 septembre 2019.
Il était prévu un élargissement des quais du port permettant de reporter la circulation automobile sur une partie du plan d'eau portuaire actuel, jusqu'à la première panne, les anneaux d'amarrage "perdus" étant reportés vers un quai du site des anciens chantiers navals. Outre les terrasses élargies, l'espace gagné sur les actuelles voies de circulation aurait permis le passage du futur bus à haut niveau de service (BHNS) et les modes doux de mobilités (piétons, vélos, etc.). Les schémas ci-dessous, extraits du document de la Métropole, en montrent le principe général.
UNE TRAVERSÉE BUDGÉTISÉE, AVEC UN CALENDRIER PRÉVU PAR LA MÉTROPOLE
Une estimation du coût du projet a été réalisée. Le même document de la Métropole le présente. L'extrait ci-dessous montre que les différents chantiers représentaient, en 2019, un coût total d'un peu moins de 20 millions d'euros (19.721.834 euros), à la charge de Toulon Provence Méditerranée, devant s'inscrire dans le cadre du programme faisant l'objet de la déclaration d'utilité publique (DUP) du transport en commun en site propre (TCSP). Même si, comme pour tout projet important sur les infrastructures, les montants auraient certainement dû être réévalués, c'était beaucoup moins coûteux que n'importe quel projet de pont ou de tunnel.
Un calendrier prévisionnel avait été élaboré. Les diverses phases d'étude et préparation (beige clair sur le tableau ci-dessous, également extrait du document de TPM) et celles de travaux (marron) étaient prévues pour démarrer en 2023 et s'achever en 2030, l'essentiel étant réalisé autour des années 2026 et 2027. Il y aurait certainement eu du retard comme pour toute opération touchant à d'importantes infrastructures, mais un horizon était dessiné.
LE "PONT DE LA RÉCONCILIATION"... IMPOSSIBLE !
Ce programme a été intégré début 2020 dans la convention devant être signée entre la Métropole et l'État pour le financement du renouvellement urbain des centres-villes de Toulon et de La Seyne. Mais c'était sans compter avec le renoncement de la nouvelle équipe municipale qui avait prévu dans son programme la réalisation, au lieu de l'élargissement des quais, d'un ouvrage cher à l'un de ses plus éminents colistiers, Guillaume Capobianco : une passerelle routière aux abords de notre historique pont levant, le fameux "Pont de la Réconciliation". La convention a ainsi été modifiée, comme il apparaît sur l'extrait ci-dessous.
J'avais alors émis des doutes sur la faisabilité de cette "passerelle-pont". Je m'en étais inquiété dans un article de ce blog qu'on peut relire en cliquant pour l'agrandir sur sa reproduction ci-dessous.
LA MAIRE A RENONCÉ AU PROJET IRRÉALISTE DE PONT, MAIS...
Je ne m'en réjouis pas, mais les faits me donnent aujourd'hui raison. Pas plus que la "réconciliation" entre la maire et le promoteur du projet de pont-chimère, Guillaume Capobianco, le "Pont de la Réconciliation" ne semble plus désormais à l'ordre du jour. La maire l'explique dans un article paru dans Var-matin, avançant les mêmes causes d'abandon que celles que j'avais moi-même évoquées.
Mais la solution d'une traversée immergée, qui semble maintenant être retenue par la maire, rencontre elle aussi des obstacles tels que ses divers instigateurs, dont le maire Maurice Paul (1995-2001) et... moi-même en 2008, y avons renoncé. La maire tiendra-t-elle enfin compte des analyses du passé ? La Métropole se décidera-t-elle à siffler la fin de la récréation seynoise ?
LA RAISON EST-ELLE UN CONCEPT ENCORE EN VIGUEUR À LA SEYNE ?
Il est temps que tout le monde revienne à la raison. Il n'y a pas besoin d'organiser un référendum comme le demande l'extrême-droite, selon son habitude funeste de politique démagogique. Pour une fois, tout le monde pourrait s'entendre sur le programme simple d'un élargissement des quais du port.
Il n'est peut-être pas inutile de rappeler que ce projet, lorsqu'il avait été soumis aux divers votes du conseil municipal et du conseil métropolitain, avait recueilli un assentiment unanime de toutes les familles politiques. Mais c'était avant que la course au pouvoir local ne soit relancée avec l'élection municipale de 2020 et son lot de promesses toutes plus irréalistes les unes que les autres, pourvu qu'elles séduisent l'électeur.
On est en 2023. Les élections locales ont eu lieu, il ne devrait pas y en avoir d'autres avant 2026. Peut-être est-il temps de revenir à la raison. Mais la raison est-elle encore un concept en vigueur chez les acteurs de la majorité aux affaires de notre ville ?...