L'intervention que je propose ci-dessous à la lecture des visiteurs de ce blog, prononcée ce samedi au Conseil communautaire de l'agglomération TPM pour expliquer les raisons de l'abstention des élus seynois lors du vote du Programme Local de l'Habitat intercommunal, sera peut-être un peu "technique", mais je préfère la livrer
in extenso pour que celles et ceux qui s'intéressent aux enjeux de la politique de l'habitat soient au fait de la réalité du travail accompli au sein de la commission de l'habitat de TPM, notamment par Rachid Maziane, adjoint chargé de la politique de la ville et du logement...
"Monsieur le président, "Mes chers collègues,
"Enjeu majeur pour l'avenir de notre territoire, le Plan Local de l'Habitat (PLH) est un acte de programmation qui traduit une volonté politique et commune dans le domaine de l'habitat.
"Il expose les orientations politiques dans des objectifs et des moyens de l'agglomération pour son développement économique.
"En effet, il ne peut y avoir de développement économique sans organiser et planifier le logement, pas plus d'ailleurs que sans organisation ni planification des transports publics.
"Le PLH vise à arrêter des objectifs, des actions et des moyens afin de répondre aux besoins en logements et d'assurer entre les territoires une répartition équilibrée et diversifiée de l'offre en logement.
"S'agissant d'une compétence d'intérêt communautaire, le PLH ne peut se limiter à la somme des intérêts de chaque commune. Les intérêts de certaines de nos communes pourraient aller à l'encontre des intérêts généraux de notre agglomération.
"Son élaboration a été menée en étroite collaboration par TPM et chacune des communes. Tout comme les autres communes, La Seyne-sur-Mer a fortement participé à sa préparation, car la politique de la ville est un enjeu majeur, tant pour pour notre ville que pour notre agglomération.
"Avant d'évoquer le PLH et les points qui ont fait débat, il est important de souligner que le bilan du précédent PLH fait état d'environ 50% à 70% des objectifs réalisés. Les 30 à 50% restants sont en cours de réalisation. Combien sont ou seront réalisés in fine ? Quelle évaluation pouvons-nous collectivement réellement tirer et comment l'intégrer dans le nouveau PLH ?
"Un Programme Local de l'Habitat doit comporter des propositions ambitieuses.
"Il est axé sur trois champs :
- Développement économique,
- Aménagement du territoire - déplacements – transport,
- Politique de l'habitat.
"Ces trois champs d'action sont fortement liés. C'est même leur corrélation qui permettra une réelle dynamique de notre agglomération.
"Le diagnostic de TPM présente la situation sociale, économique et démographique que nous partageons collectivement : TPM accueille 89% des emplois publics du SCOT, 85% des personnes bénéficiaires du RMI et 78% des emplois domestiques faiblement rémunérés.
"Même avec les efforts réalisés par les uns et les autres, la programmation des logements sur 2009 – 2015 ne permettra pas de pallier le manque de logements pour les actifs, et notamment les 20 – 39 ans, tranche d'âge qui diminue dans notre agglomération.
"Une partie des objectifs du PLH ne répondent pas à notre contexte.
"Malgré les toutes dernières avancées de la part de certaines d'entre nos communes, que je remercie sincèrement d'avoir accepté de s'impliquer un peu plus, la part des logements sociaux programmée dans le PLH ne me semble à la hauteur ni de nos difficultés, ni de nos ambitions.
"Si les derniers éléments chiffrés annoncent prés de 4000 logements sociaux (2009-2015, il aura fallu convaincre pour une juste répartition territoriale, et alors que, il y a quelques semaines encore, prés du quart concernaient la seule ville de La Seyne.
"On est toutefois inquiet car, à taux de réalisation identique à celui du précédent PLH, la projection de production de logements sociaux sera loin de permettre d'atteindre des objectifs conformes à la loi SRU.
"De plus, dans le cadre des PLU de chaque commune, il est primordial de mettre en oeuvre la loi ENL, qui prévoit la construction de 30% de logements sociaux dans chaque production de logements, y compris dans les immeubles collectifs.
"Cette proposition est plus que nécessaire pour un PLH cohérent et pouvant répondre au contexte de notre agglomération.
"Mais annoncer de tels chiffres ne fait que masquer un réel malaise dans la production des logements dont la part des logements sociaux. En effet, notre programmation des logements sociaux se répartit ainsi :
- 20 % PLAI,
- 20 % PLS,
- 60 % PLUS.
"Or les plafonds des loyers et de prix en France métropolitaine sont les siuvants :
Logement T3 – 73 m² | PLS | PLUS | PLAI |
Prix au m² | 7,64 | 5,10 | 4,52 |
Loyer | 557,72 | 372,30 | 329,96 |
"On le voit : le différentiel de loyer est au moins de 50 %.
"Il faut savoir qu'un habitant sur deux ne paye pas l'impôt dans notre agglomération et que 35% de cette population perçoit moins de 900 euros/mois.
"L'inflation du marché locatif est liée à la faible part des logements publics et à la pénurie de la production de logements dans leur ensemble.
"Pour endiguer cette inflation, seule une mise en chantier de logements vraiment sociaux permettra à la fois de loger des familles modestes., et de contenir, voire d'augmenter, la part des jeunes actifs qui sont le pivot de notre développement économique et de l'essor, notamment, de notre technopôle de la mer.
"Par ailleurs, le PLH prévoit la Garantie Risques Locative (GRL) pour les bailleurs, en partie privés. Il s'agit d'une somme dérisoire mais qui fait peser sur les acteurs privés le logement des familles modestes.
"Pourquoi ne pas prendre pleinement nos responsabilités par une production plus importante de logements à loyers modérés pour les ménages ?
"En ce qui concerne les logements étudiants, l'objectif de 550 logements peut sembler important mais les premiers besoins sont estimés par nos propres services à 1 000 logements, et seulement pour couvrir les besoins de l'Université de Toulon et du Var. Le président intérimaire de l'UTV les évlaue pour sa part à un minimum de 1500. Et d'autres de nos services indiquent que, de surcroît, rien que pour l'installation d'Euromed à Ollioules, le besoin est de 1500 autres logements d'étudiants. On le voit, les 550 logements prévus sont réellement insuffisants, même si une part des logements saisonniers permettra de loger les étudiants, mais à des prix totalement inadaptés aux revenus de la plupart des jeunes.
"D'autre part, selon un plan d'action du PLH, pour les attributions des logements sociaux, le contingent préfectoral devrait être reversé aux communes. En l'état, ce n'est pas une solution. Cela ne le deviendra que lorsque nous aurons une gestion inter-bailleurs des demandes de logements, ce que la plupart des bailleurs importants refusent aujourd'hui, et aucune mesure n'est prévue dans notre PLH pour les inciter à avancer en ce sens.
"Je m'en tiendrai à ces quelques éléments significatifs de la trop grande modestie de notre PLH.
"Des pistes de travail, telles qu'élaborées dans d'autres PLH, auraient du être explorées, telles que le montage opérationnel avec les communes, les aménageurs, les promoteurs, pour dynamiser la production de logements, proposer des réalisations à un prix estimable entre 1800 et 2000 €/m² habitable, modifier nos pourcentages pour produire 20% de PLS, 60% de PLAI et 20% de PLUS, décider de concentrer notre Fonds d'Aide à l'Habitat sur les communes les plus productrices et les plus en phase avec les objectifs des lois SRU et ENL, ou encore favoriser l'accès des étudiants au parc locatif privé, avec des démarches de certification des chambres d'étudiants ou une charte de qualité.
"Tel qu'il était envisagé il y a encore quelques semaines, nous aurions dû voter contre le PLH.
"Mais nous reconnaissons qu'il y a eu des avancées, jusqu'aux toutes dernières heures de l'élaboration de ce PLH. J'en sais gré à ceux de nos collègues qui ont proposé des efforts. J'en sais gré aussi aux personnels de TPM qui ont bien perçu les enjeux et ont bien aidé à convaincre.
"Mais ces avancées paraissent encore bien insuffisantes au regard des besoins. Ne l'oublions pas : rien qu'à La Seyne, ce sont plus de 3000 familles qui attendent depuis des années une attribution de logement social. On estime ce nombre à 10 à 11000 au plan de nos douze communes.
"Et, permettez-moi d'ajouter une remarque un peu égoïstement seyno-seynoise. Vous le savez, sur les 853 logements dont la démolition et la reconstruction sont prévus dans le Programme de Rénovation Urbaine (PRU) du quartier Berthe à La Seyne, cosigné par TPM, 200 doivent être construits dans d'autres communes de notre agglomération. Je regrette vraiment de n'avoir pas pu les identifier dans le PLH.
"Mais peut-être aurons-nous, au fil des années de ce PLH, une lecture commune de nos avancées, voire une évolution collective dans le sens d'une plus grande prise en compte des besoins de nos concitoyens.
"Pour l'immédiat, les conseillers communautaires de La Seyne s'abstiendront sur ce vote."