On l'a vu ces jours derniers, il aura fallu trois ans pour modifier notre Plan local d'urbanisme et parvenir à imposer par le droit des règles d'urbanisation plus contraignantes que celles qui étaient en vigueur auparavant, afin de tendre vers une meilleure intégration urbaine et de moindres nuisances.
RETIRER UN PERMIS : IMPOSSIBLE ! SURSEOIR À STATUER : ENCADRÉ ET RISQUÉ !
Mais j'ai demandé à nos services de ne pas attendre le terme de la longue procédure et d'anticiper chaque fois que possible. À titre de test, j'ai retiré dès le début de mon mandat un permis de construire un immeuble au milieu de la zone pavillonnaire des Mouissèques, face aux anciens ateliers mécaniques des chantiers navals, qui avait été classée "super-urbanisable" par mes prédécesseurs. Mal m'en a pris : le juge administratif ne l'a pas entendu de cette oreille et, la Loi étant la Loi, j'ai dû faire machine arrière ! Il fallait donc agir plus finement.
Deux solutions s'offraient à moi. J'ai en partie utilisé la formule du "sursis à statuer", c'est-à-dire du report d'accorder l'autorisation de construire sur une zone dont j'étais à peu près certain qu'elle allait pouvoir être règlementairement rendue moins constructible au terme de la procédure de révision du PLU. Mais cette solution est très encadrée, dans un délai contraint, pour une durée très limitée, avec des raisons de forme et de fond très précises. En clair, je ne pouvais en faire une règle générale, au risque de me faire taper sur les doigts par un juge ! Ça a tout de même fonctionné pour plusieurs opérations. Et je connais des promoteurs qui, ayant envisagé cette éventualité, on renoncé d'eux-mêmes à leurs projets.
NÉGOCIER SELON LE BON VOULOIR DES CONSTRUCTEURS
Pour d'autres quartiers, il était manifeste qu'il serait impossible de revenir sur les énormes droits à construire. C'était le cas à Châteaubanne, à Gai Versant, et aux Mouissèques. De trop nombreux immeubles étaient déjà sortis de terre avant mon élection, enserrant des petites villas isolées entre des murs borgnes de cinq étages. Réduire la constructibilité dans ces zones aurait contraint les habitants de ces pavillons à finir leur jours sans vue ni lumière, et sans pouvoir s'en sortir en vendant leur bien à un prix décent puisque devenu inconstructible pour un immeuble. Sans compter que la Loi interdit d'enclaver une zone moins constructible au sein d'une zone qui l'est beaucoup plus. Et on se souvient sûrement du drame humain vécu en 2009 par Michèle et Jacqueline, ces dames âgées qui se sont trouvées dans cette situation.
Dans ces sites là, j'ai utilisé une deuxième solution et nous avons entrepris des discussions avec les promoteurs. Et ça a finalement fonctionné assez souvent. Je tairai leurs noms, mais ceux qui regarderont sur place verront que, au Gai Versant, dès 2009, a été réalisé un projet immobilier intégrant les futures règles du PLU révisé : distance accrue des voies et limites séparatives, hauteur limitée des immeubles. À Châteaubanne, un permis délivré un an avant les règles nouvelles a pu intégrer une fois et demie le nombre de places de stationnement imposées. Aux Mouissèques, un opérateur a accepté de réaliser 20 logements sociaux sur la quarantaine de son programme. S'ils l'ont fait, c'est tout de même qu'ils y trouvaient leur compte, me dira-t-on. Certes, mais encore fallait-il le leur demander. Sans contrepartie.
Et, partout, nos services ont suivi avec attention le déroulement des chantiers, imposé des contraintes pour le bruit, les abus d'usage des voies et trottoirs, se sont rendus sur place, souvent avec mes adjoints et moi, pour écouter les doléances des riverains, porter leurs plaidoiries auprès des opérateurs, ou les aider à se défendre quand ils ont subi des dégradations du fait des travaux. Ils ont aussi recherché des solutions publiques pour contrebalancer les impacts, parfois terribles, de cette "sur-urbanisation" : amélioration des plans de circulation, de la sécurité des piétons, du stationnement, des transports collectifs, du traitement des résurgences d'eau. Et tout ça en concertation constante avec les Comités d'intérêt local et les associations d'habitants, auxquels je tiens à dire toute ma gratitude pour leur esprit... constructif !