La Chambre régionale des comptes, saisie par le préfet du Var après le vote de notre budget en déséquilibre courant avril, a rendu ces derniers jours son délibéré. Son avis confirme notre analyse des difficultés, nous encourage dans nos efforts de gestion, pointe l'exactitude de nos comptes, et écarte les choix douloureux de hausse de la fiscalité locale, de baisses de subventions au monde associatif, ou de coupes drastiques dans les effectifs de personnels titulaires.
Mais il permet aussi à l'État et aux banques de disposer d'un éclairage sur la réalité budgétaire et financière seynoise qui ouvre des perspectives, tant pour l'immédiat que pour le futur.
Avons-nous alors eu tort, en votant un budget délibérément déséquilibré, de poser un acte que certains nous ont vivement reproché ?...
LES DIFFICULTÉS BUDGÉTAIRES SEYNOISES SONT « EXOGÈNES » À NOTRE GESTION
La Chambre régionale des comptes (CRC) reconnaît que la situation financière est structurellement tendue du fait de deux raisons indépendantes de la gestion municipale actuelle.
> Elle évoque d'une part l'endettement historique de la commune, malgré les efforts de gestion opérés ces dernières années par notre équipe, qui portent toutefois leurs fruits dans trois domaines :
— la réduction de la dette (de 152 à 136 millions d'euros) contractée pour les trois-quarts avant 2008 ;
— la sécurisation, des emprunts « structurés », presque « toxiques », c'est-à-dire dont les taux peuvent « s'envoler » en fonction des parités respectives de certaines devises, contractés dans les années 2000, que nous avons en partie réalisée (2014-2015), et qui est en partie en voie de l'être (2016) ;
— le dégagement d'un excédent de fonctionnement (recettes moins dépenses), qui demeure cependant insuffisant pour financer l'annuité en capital de la dette.
> La CRC impute d'autre part nos difficultés à la baisse des dotations de l'État, dont elle note qu'elle n'est que très partiellement compensée par la solidarité nationale et territoriale (« péréquation ») dont doit bénéficier une commune comme la nôtre, qui reçoit la dotation de solidarité urbaine (DSU) au regard de la pauvreté de certains de ses quartiers.
LES ERREURS DE COMPENSATION DE L'EXONÉRATION DE LA TAXE FONCIÈRE DES BAILLEURS SOCIAUX SONT RECONNUES
La CRC constate que la direction départementale des finances publiques (DDFIP) du Var a reconnu début juin notre suspicion d'erreur dans la compensation de l'exonération des taxes foncières sur les propriétés bâties des logements sociaux situés dans les périmètres prioritaires de la politique de la ville, même si la proposition d'augmentation de recettes formulée par la DDFIP et donc reprise par la CRC est inférieure à nos estimations.
L'EXACTITUDE DES RECETTES ET DÉPENSES EST CONSTATÉE
La CRC note que les dépenses et recettes de fonctionnement n'appellent pas, quant à leur exactitude, d'autre observation qu'une erreur d'écriture (1), et deux mises à jour budgétaires suite à des notifications intervenues après le vote du budget le 15 avril (2), qu'il faut rectifier ou intégrer. Il est rassurant de relever que certaines remarques un peu hâtives de quelques opposants sur la supposée « incompétence » de notre équipe et de nos cadres communaux sont infondées...
PAS DE HAUSSE DE FISCALITÉ, MAIS DES EFFORTS DE GESTION À ACCENTUER
La CRC note que la commune a poursuivi avec l'élaboration de son budget sa recherche d'économies de gestion, mais qu'il faut les accentuer, en particulier sur la masse salariale, d'autant que la Chambre confirme notre analyse selon laquelle qu'il n'est pas possible d'augmenter les taux de la fiscalité locale.
La CRC ne propose ainsi ni hausse de l'impôt local, ni nouvelle baisse des subventions aux associations, ni licenciement de personnel titulaire, mais, outre les mises à jour déjà évoquées, recommande pour équilibrer notre budget quelques réductions de dépenses (3) et augmentations de recettes (4).
L'ÉTAT A BIEN RÉAGI, AVEC, POUR PARTIE, DES EFFETS IMMÉDIATS
L’État, de son côté, n'allouera pas de subvention d'équilibre, la situation n'étant pas jugée dramatique au point de la justifier.
Mais il s'est engagé sur appui accru pour la gestion sécurisée de la dette structurée, acceptant d'augmenter de 5% l'aide du fonds de soutien aux collectivités locales ayant souscrit des emprunts à risque. Cela permet de stabiliser sans délai les taux des derniers prêts à risque demeurant dans notre portefeuille d'emprunts, en l'occurrence ceux souscrits par nos prédécesseurs auprès de Dexia, dont le capital restant dû excède les 21 millions d'euros.
En outre, le cas soulevé par La Seyne au plus haut niveau de l'État ayant permis de révéler des difficultés identiques dans d'autres communes, la Secrétaire d'État à la politique de la ville a jugé utile, pour 2017, une relecture de la compensation de l'exonération de taxe foncière sur les logements sociaux des quartiers prioritaires, en plus du premier résultat obtenu pour 2016. Pour les mêmes raisons, dans la perspective du projet de loi de finances 2017, le chantier est ouvert d'une revisite de la dotation de solidarité urbaine (DSU) dont l'accroissement à peine symbolique est loin de compenser la baisse des dotations ordinaires, visant notamment à gommer les effets de seuil pour les communes, comme La Seyne, qui ne figurent pas au nombre des 250 les plus pauvres (dites "DSU-cible"). D'ores et déjà, le Comité des finances locales (CFL) s'est saisi de ces nécessités, ainsi qu'en atteste l'article paru sur le site de l'association France Urbaine.
DES MOTIFS DE SATISFACTION...
Nous sommes donc satisfaits que les magistrats de la CRC partagent notre analyse des causes des difficultés, reconnaissent qu'elles ne sont pas inhérentes à notre gestion, constatent l'exactitude de notre budget, et valident les efforts déjà engagés... et à poursuivre.
Nous apprécions aussi que l'État ait consenti des efforts, dont deux à effet immédiat (exonération de la taxe foncière mieux compensée et fonds de soutien accru pour les emprunts « quasi toxiques »), et que les questions en suspens de solidarité nationale et de compensation des exonérations soient inscrites à l'ordre du jour de ses travaux, certes en vue de 2017.
... ET UN RETOUR EN VUE DE LA CONFIANCE DES BANQUES ?
Même s'il ne faut pas crier victoire dans l'immédiat, on doit aussi se réjouir d'une première conséquence, du côté du monde bancaire qui, depuis des années, était plus que rétif à accompagner La Seyne, craignant pour sa solvabilité. Si la situation demeure tendue, les efforts engagés et la « caution morale » que représentent l'avis de CRC et les réponses de l'État ont permis que, depuis ces derniers jours, deux établissements bancaires ont accepté le principe de nous allouer des prêts (5 millions d'euros de Dexia pour 2017 et 7 millions d'une autre banque pour 2018), qui nous permettront de mener à bien quelques investissements nécessaires.
ET MAINTENANT ?
Tout cela règle la difficulté pour 2016, mais à coup d'efforts accrus pour nos personnels auxquels j'ai réservé la primeur de la situation, et dont je sais combien ils sont prêts à donner le meilleur d'eux-mêmes pour défendre le service public. Je proposerai donc ce mardi à notre conseil municipal de voter un budget équilibré par les recommandations de la CRC. Nous pourrons ainsi relâcher nos contraintes sur les investissements dès juillet, et, en septembre, nous présenterons une nouvelle délibération relative aux subventions aux associations, après analyse de leurs comptes, levant ainsi des malentendus malicieusement véhiculés par certains (5)...
Et, pour 2017 et le futur, nous resterons vigilants, tant dans notre propre gestion que dans les suites qui seront données aux points dépendant des décisions de l'État.
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(1) : oubli d'une avance perçue en 2011 sur une aide de l'Agence de l'Eau pour une étude de diagnostic sur le réseau pluvial
(2) : d'une part, les produits du fonds de soutien aux collectivités locales ayant souscrit des emprunts à risque qui n'ont été notifiés que le 29 avril, et, d'autre part, la réclamation - que nous contestons - postérieure au vote du budget, d'une somme due au Syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) du tourisme de l'Ouest-Var au titre de 2014
(3) : La CRC recommande, en compression de dépenses :
- une baisse accrue des achats de prestations de type "animations" (- 11.900 euros)
- une diminution des achats d'énergie (- 46.000 euros)
- une nouvelle baisse des coûts de personnel (- 50.000 euros sur les personnels non titulaires et - 100.000 euros sur les emplois d'insertion aidés)
(4) : La CRC recommande, en augmentation de recettes, des évaluations à la hausse :
- des recettes du casino de jeux (+ 61.900 euros)
- de la compensation de l'exonération de taxe foncière sur les logements sociaux sur les logements sociaux (+ 84.000 euros)
- de la part variable du crématorium (+ 60.000 euros)
- et + 100.000 euros de "recettes exceptionnelles"
(5) : Des malentendus quant aux baisses de subventions seront ainsi levés. Nous avons voté en avril un budget dédié aux associations en baisse de 16% par rapport à 2015 (et non 40% comme on a pu le lire dans certaines déclarations !). Mais nous avons alors délibéré pour n'attribuer que 75% de ce budget, par prudence, au cas où la CRC aurait décidé d'une nouvelle diminution (comment alors "récupérer" des sommes déjà mandatées et peut-être utilisées ?). La Chambre n'ayant pas retenu l'option de réduire les subventions, nous allons pouvoir allouer le reliquat de 25%, en soutenant, entre autres critères, les associations qui participent à l'effort et qui, malgré des gestions sérieuses et prospectives, rencontrent le plus de difficultés de trésorerie. Le trimestre estival sera mis à profit pour cette lecture précise des situations respectives de chacune des associations.