Beaucoup de Seynois sont atterrés et en colère.
Peut-être n'avons-nous pas assez expliqué, préparé, accompagné nos concitoyens au cours de ces 14 mois qui ont suivi le moment où, en septembre 2009, conformément à la Loi, mon ami Jo Pentagrossa, adjoint au maire en charge des finances, et moi-même avons dû nous résoudre à proposer au Conseil municipal de voter ce que l'État demande à la commune de faire depuis... 2001 : réduire les abattements sur la taxe d'habitation pour élargir le nombre de contribuables et parvenir à équilibrer le budget 2010 sans diminuer les offres de services publics communaux et poursuivre nos investissements en cours ou devenus indispensables.
J'avais pourtant expliqué en son temps l'impact dramatique que cette décision, toujours repoussée par nos prédécesseurs malgré les alertes récurrentes des services départementaux de l'État, aurait sur nombre de ménages, dont certains, déjà cruellement en souffrance du fait d'une perte continue de pouvoir d'achat, auront le plus grand mal à joindre les deux bouts en cette période précédant les fêtes de fin d'année.
Je renvoie mes visiteurs à l'article explicatif publié en page 8 du numéro d'octobre 2009, ou celui relatif au budget 2010, en page 4 du numéro d'avril 2010, du magazine municipal "Le Seynois", distribué aux foyers de la commune, ou à l'article que j'avais publié alors sur ce blog, ou encore à un article du quotidien Var-matin du 19 septembre 2009, qui faisaient état de ce à quoi nous avions dû nous résigner, prévoyant hélas les conséquences complexes de cette décision qu'il n'était plus possible de différer.
Mais que nous ayons fait un effort suffisant ou non de communication ne change rien au problème de notre peuple seynois, déjà rudement soumis à la contribution collective, même si chacun s'accorde à reconnaître que, en contrepartie, à La Seyne, un nombre significatif de services est offert à tous.
J'ai délibérément attendu que se tienne une réunion du Conseil municipal pour donner solennellement sur cette situation pénible un point de vue objectif, dégagé autant que faire se pourrait de normales réactions sous le coup de l'émotion. Au regard de l'enjeu majeur pour mes concitoyens, suscitant de compréhensibles manifestations d'indignation, j'ai aussi choisi de suspendre mes publications sur ce blog et les réseaux sociaux jusqu'à ce que se soit tenue cette séance de l'assemblée communale. Les autres sujets pouvaient attendre.
Et je livre donc à présent à mes visiteurs le propos que j'ai tenu en ouverture de cette réunion :
"Chers collègues,
"A l'occasion d'une séance somme toute bien ordinaire du Conseil municipal, certains de nos concitoyens, à l'appel du Parti Communiste Français de La Seyne, viennent aujourd'hui exprimer le mécontentement et les inquiétudes qu'éprouvent, c'est vrai, je le sais parfaitement, beaucoup de nos concitoyens.
"Je l'ai dit à maintes reprises, je comprends cette colère. Je comprends ce qui les amène à manifester. Je comprends d'autant mieux cette colère qu'elle est justement tournée vers les vrais responsables de la situation, au premier rang desquels l'Etat.
"La situation qu'il a créée - et qu'il entretient - est comme une peine de mort décrétée pour nos collectivités locales et tous les services publics de proximité ou nationaux.
"Et programmer notre mort, c'est faire peser le poids de la situation de crise sur nos collectivités, et donc sur les citoyens, alors que la grande finance s'en sort, toujours, renflouée par les fonds publics.
"Il y en a assez !
"Je le sais, nous le savions : notre décision de baisser les taux d'abattement a eu des conséquences dures pour nombre d'entre les Seynois, d'entre nous, car nous sommes touchés, évidemment, comme tout le monde, nous-mêmes, dans cette enceinte.
"J'en parle avec mes concitoyens tous les jours, car vous le savez, je ne fuis pas la confrontation ; je n'ai jamais craint de rencontrer les Seynois ni de leur parler les yeux dans les yeux.
"Et d'ailleurs, j'ai décidé l'organisation de réunions publiques, que je présiderai, les 8, 11 et 13 décembre, avec, le 30 novembre, une rencontre avec les responsables associatifs et les conseillers de quartiers, et, le 8 décembre, une rencontre avec les chefs d'entreprises.
"Nous pensons qu'il faut continuer et amplifier le débat déjà entamé avec la population seynoise et de mobiliser notre ville contre la charge insupportable que l'Etat fait peser sur les collectivités et, à travers elles, sur les citoyens.
"Après les réunions publiques, nous allons convoquer un Conseil municipal, extraordinaire. La date en sera très bientôt communiquée.
"Ce Conseil sera tout d'abord l'occasion d'un débat sur le fond.
"Un débat ample ; un débat argumenté et informé, un débat digne.
"Un débat à la hauteur de ce que nos concitoyens attendent de nous.
"Mais débattre n'est pas le but, c'est le chemin. Le chemin obligé, certes. C'est un moyen et non une fin.
"Il faut que ce débat constitue le départ d'une mobilisation. Locale, c'est sûr, cela dépend de nous, mais le départ aussi, je l'espère, d'une mobilisation départementale, s'inscrivant dans une démarche régionale et nationale, car ce que nous vivons aujourd'hui à La Seyne, d'autres habitants des villes pauvres, dans tout le pays, le vivent également, et certains de façon bien pire. Et, hormis les rares villes très riches, toutes les collectivités commencent à rencontrer les mêmes pires difficultés.
"Et, vous le verrez hélas, dans quelques jours, ce seront tous les maires de France, réunis en Congrès à Paris, de toutes sensibilités, qui tireront ensemble la sonnette d'alarme.
"Elus et citoyens doivent se retrouver. Le Conseil extraordinaire sera une façon solennelle de marquer cette volonté.
"Notre volonté de montrer que nous sommes des gestionnaires responsables des deniers publics, des élus conscients de leur devoir, des élus qui ne cherchent pas à faire dans la facilité et dans la démagogie.
"Mais que nous sommes aussi des élus estimant que leur devoir est d'alerter et de mobiliser la population, sans tarder. Car nous avons atteint la limite des efforts que nous demandons à nos concitoyens d'assumer.
"Nous en avons assez du démantèlement des collectivités et, au final, du démantèlement de la République. Du démantèlement de tout ce que le Conseil National de la Résistance a tissé. Tout cela demande peut-être à être modernisé, mais certainement pas à être saccagé !
"Mais je ne veux pas rentrer davantage dans le débat aujourd'hui.
"Les réunions publiques et le Conseil municipal extraordinaire diront, en leur temps, ce qu'il en est de la vérité des finances de cette ville et des conditions de son développement. Je dirai tout. Croyez-moi. Comme je l'ai toujours fait.
"Et à l'issue du débat, nous proposerons au Conseil de s'engager au travers d'une motion.
"Cette motion que je vous proposerai pourra, si vous la votez, constituer la base d'un appel à la mobilisation de nos concitoyens et je vous inviterai à l'apporter, en manifestation calme mais solennelle, aux représentants locaux de l'Etat, en Préfecture.
"Voilà ce que je voulais vous communiquer avant d'entamer cette séance.
"Merci. Je propose que nous commencions nos travaux."
On le voit, nous ne nous dérobons pas. Je rejoins pleinement en cela le propos de Christine Sampéré, adjointe chargée de l'éducation, lors de la séance au cours de laquelle a dû être prise cette décision, après avoir mis en cause le désengagement de l'État envers les communes : "Nous affronterons ces jours difficiles à venir".
Nous y sommes.