Quelques analyses personnelles à l'issue du second tour de l'élection présidentielle dans le Var, dans la métropole du Grand Toulon et à La Seyne, avec un regard particulier sur nos quartiers seynois d'habitat social qui peuvent être fiers d'eux-mêmes.
On peut le dire : la démocratie et la République leur doivent beaucoup.
Explications...
LE VAR ET LA MÉTROPOLE TOULONNAISE EN GRAND DANGER DE TOTALITARISME
Le Var continue à pencher dangereusement vers l'extrême-droite qui recueille 55% des suffrages. Seules 20 communes sur 153 ont placé le candidat républicain en tête, soit trois fois moins qu'en 2017. Cette évolution, illustrée par l'image ci-dessous, est fort inquiétante.
Dans notre métropole Toulon Provence Méditerranée, notamment, la candidate d'extrême-droite arrive en tête, recueillant plus de 107.000 voix, soit 52% des votes. Même à Toulon, dont le maire est un supporter récent mais actif de M. Macron, le président réélu ne devance Mme Le Pen que de 577 voix sur près de 73.000 votants. En 2017, Mme Le Pen n'était en tête que dans une seule de nos douze communes, elle l'est aujourd'hui dans huit d'entre elles.
LA SEYNE ET L'OUEST-VAR EN FÂCHEUSE SITUATION
La Seyne en fait hélas partie, avec 52% des électeurs ayant opté pour le vote fasciste. C'est vrai dans la plupart des quartiers de la ville. On doit s'inquiéter pour les élections législatives prévues en juin prochain.
Dans notre 7ème circonscription de l'Ouest-Var, où le candidat du Front National avait en 2017 séduit moins de 16.000 électeurs (43%), le même ou un autre futur candidat d'extrême-droite pourrait a priori compter sur les 37.000 suffrages qui se sont portés ce dimanche sur Mme Le Pen. Effrayant.
MALGRÉ LA POUSSÉE D'EXTRÊME-DROITE, LE SUD SEYNOIS PLUTÔT PLUS RÉPUBLICAIN QUE LE NORD, ET BIEN PLUS QUE LE CENTRE
Dans la partie seynoise de l'ancien canton de Saint-Mandrier, c'est-à-dire les quartiers plutôt résidentiels au sud d'une ligne partant approximativement de Barban à l'ouest jusqu'au Fort de l'Éguillette à l'est, en passant par les Quatre Moulins, le Pont-de-Fabre et le Fort Napoléon, Mme Le Pen ne devance certes M. Macron que de moins de 200 voix. Mais cette première position de l'extrême-droite est une situation inédite, ces quartiers votant traditionnellement pour la droite républicaine. La maire, soutien du « programme fondamental » de M. Macron, à laquelle leurs habitants ont pourtant majoritairement fait confiance en 2020, n'a pas réussi à endiguer cette vague vers l'intolérance et la fracture entre citoyens.
Dans l'ancien canton de La Seyne, au nord de cette même ligne, sauf à Berthe et au centre, Mme Le Pen obtient en revanche 53% des suffrages, atteignant même près de 55% dans les zones situées en périphérie des quartiers populaires prioritaires de Berthe et du centre ancien, comme si l'effet "voisinage de l'Autre, du Différent, de l'Inquiétant" avait joué, ainsi que ce fut le cas dans les communes rurales, dans le sens du rejet de la démocratie.
LE RETOUR DE BÂTON DE L'ABANDON DU CENTRE-VILLE
Le centre-ville, pour sa part, a voté à 65% pour la candidate fasciste. Notre cœur historique ne cesse de se paupériser et ne voit toujours pas démarrer d'action ambitieuse et prioritaire pour la restructuration et la diversification de l'habitat, la lutte contre les marchands de sommeil dans les trop nombreux taudis, et la rénovation du cadre urbain, alors que le Nouveau programme national de rénovation urbaine qui était prêt à être signé avec l'État fin 2019 n'a été finalisé que très récemment, après de trop longs atermoiements de la maire qui a contraint la métropole à en renégocier les termes.
La droite nationale de M. Macron paye ici le prix politique de l'obstination de la droite locale de Mme Bicais à défaire ce qu'avaient engagé ses prédécesseurs. On n'inversera pas la tendance avec seulement des jardinières, des statues et des fresques murales, si artistiques soient-elles, avec des animations festives ou culturelles s'adressant plus aux visiteurs qu'aux résidents, avec une visibilité policière accrue, mais sans consigne de proximité et de relation aux habitants (comment s'en étonner avec comme pilote un maire-adjoint soutien de Mme Le Pen ?...), ce qui conduit à l'effet inverse et accroît le sentiment d'insécurité, avec l'abandon des programmes majeurs d'un complexe de cinéma, de reconstruction d'une crèche et la valse hésitation pour celle d'une école, ou avec des initiatives mettant la charrue avant les bœufs comme la révision prématurée de la circulation automobile sans concertation avec les riverains.
LES GENS DE BERTHE CHAMPIONS DE LA DÉMOCRATIE, HEUREUSEMENT POUR TOUS !
Il n'est que dans nos ensembles d'habitat social qu'un formidable sursaut démocratique a pu s'observer. Chez les habitants des neuf communes varoises ayant bénéficié de la "politique de la ville", l'écart entre Mme Le Pen (50,9%) et M. Macron (49,1%) est de 8 points moindre que dans le reste du département.
Et notre quartier Berthe se singularise très positivement. Ses électeurs se sont déplacés bien plus qu'habituellement pour aller voter, avec "seulement" 46% d'abstention (contre 41% au premier tour, une partie des électeurs de gauche s'étant manifestement abstenus) alors qu'elle avoisinait les 70% aux précédents scrutins.
Dans les cinq bureaux de vote de Berthe, même s'il y a eu une déperdition de reports potentiels du fait de la décevante non qualification de M. Mélenchon, nos concitoyens les plus pauvres et les plus ostracisés ont dépassé leurs rancœurs pourtant grandement justifiées par la politique antisociale et stigmatisante de M. Macron pour utiliser les bulletins de vote à son nom afin de sauver la démocratie, et lui ont accordé 59% de leurs suffrages. Si l'on s'en tient aux trois bureaux de vote de la partie de Berthe n'ayant que du logement social public et presque aucune résidence privée, les votes ont été à 66% en faveur du candidat républicain, et il réalise même 71% dans l'un d'entre eux.
LES YEUX OUVERTS ET SANS ILLUSION, LE PEUPLE VULNÉRABLE DE FRANCE AU SECOURS D'UN CHEF D'ÉTAT QUI L'OSTRACISE
C'est le seul signe encourageant de ce vote. Celles et ceux que le président-monarque méprise et enferme depuis cinq ans dans la misère et la relégation, celles et ceux qui sont trop souvent ignorés voire désignés comme boucs émissaires par la majorité municipale seynoise, sont ceux de nos concitoyens seynois qui se sont levés avec le plus de ferveur pour défendre la République. Les démocrates de notre commune et de notre métropole leur doivent un vrai coup de chapeau et une sincère gratitude.
C'est d'ailleurs le cas dans la plupart des quartiers populaires vulnérables de France qui, après avoir grandement soutenu le projet de M. Mélenchon (60% chez nous), ont fait fi de leurs légitimes aigreurs et ont voté à 69% non pas pour le programme de M. Macron (car ils ne se font aucune illusion sur le retour qu'ils peuvent attendre d'un président ultralibéral au seul service des nantis) mais pour sauvegarder les valeurs de liberté, d'égalité, de fraternité, de démocratie et de laïcité que Mme Le Pen entendait fragiliser.
LES PARTIS DES GAUCHES ET DE L'ÉCOLOGIE ONT LE DEVOIR D'ENTENDRE LA VOIX DU PEUPLE
Forts de leur jeunesse et de leur esprit de solidarité, nos concitoyens de Berthe constituent en tout cas un solide point d'appui pour l'avenir. Et celui-ci commence aujourd'hui dans la perspective des élections législatives de juin. Puissent les partis politiques, ici et ailleurs, en tirer les leçons. Porter les aspirations populaires d'un monde meilleur suppose, chez nous plus qu'ailleurs au regard du poids du bloc fasciste départemental et de la droite varoise recomposée en coalition républicano-macroniste, de s'appuyer sur les forces vives qui ont émergé en leur donnant toute leur place comme acteurs du changement, et de s'imposer une absolue unité de projet social, écologique et démocratique.
Et celle-ci ne peut se traduire que par des candidatures à la députation unitaires et uniques, de la social-démocratie à la gauche radicale. Partout. Donc dans la circonscription des cinq communes de l'Ouest-Var. Toute autre stratégie, non seulement serait suicidaire, mais constituerait surtout une insulte méprisante aux plus humbles qui ont grand espoir de changement et ont su montrer la voie juste.