C’est indéniable, le projet de réforme des retraites comporte des avancées en matière d’équité et de justice : intégration de la dimension pénibilité, calculs plus appropriés aux travailleurs à temps partiel, qui concerne beaucoup de femmes, et octrois de trimestres pour les jeunes qui entament leur vie professionnelle avec des temps d’alternance ou en apprentissage. Il reste que ces propositions du gouvernement doivent encore pouvoir être amendées par les parlementaires, car il y a des points de vigilance et, toujours, la question de la durée de cotisation qu’il est sûrement possible de ne pas tant accroître si on aborde de façon plus globale la question de la protection sociale.
NE PAS « GRIGNOTER » LE GAIN D’ESPÉRANCE DE VIE
Parce que, démographiquement, la structure des régimes de retraite redevient favorable au-delà de 2035, l’allongement de la durée de cotisation prévue pendant 15 ans à partir de 2020 doit pouvoir faire l’objet d’une révision, je l’espère, à l’initiative des parlementaires socialistes ; sinon, ça va « grignoter » près des deux tiers du bénéfice en espérance de vie alors qu’on sait que, si il devrait logiquement continuer à augmenter un peu, l’espérance de vie en bonne santé, elle, ne suit pas le mouvement.
Je crois qu’on doit se féliciter que la demande du Parti socialiste a été prise en compte pour la recherche de l’équilibre des régimes de retraite : ne pas augmenter la CSG, mais plutôt prévoir une augmentation raisonnable des cotisations sociales des salariés et des employeurs permettant, normalement, de résorber les déficits prévus d’ici à 2020 ; on est bien là dans le système de répartition auquel les Français sont attachés, considérant à juste titre que la pension est un salaire différé.
MOBILISER LES REVENUS FINANCIERS ET DU CAPITAL POUR UNE RÉFORME GLOBALE
Mais il reste que la question des retraites ne doit pas être déconnectée de l’ensemble du financement de la protection sociale, avec une vraie réforme fiscale et sociale, de même qu'il faut, ainsi que le PS l’a pourtant proposé en 2010, et encore cet été, que l’on mobilise les revenus financiers et du capital. En tous cas, il ne faudrait pas que les ménages soient doublement contributeurs, d’une part par l’augmentation de leurs cotisations que les salariés acceptent parce qu’ils savent que c’est une obligation « mathématique » inéluctable au regard des évolutions de l’âge d’entrée dans le monde du travail et de l’espérance de vie, et d’autre part en supportant une possibilité offerte aux employeurs de compensation de l’augmentation de leurs propres cotisations « retraites » via une baisse des cotisations de la branche « familles », ou en subissant une hausse compensatoire de la TVA ou de la CSG.
On a avancé. Le régime par répartition peut être conforté, voire sauvé. Il reste à considérer que les ménages, comme les petites et moyennes entreprises, ne peuvent pas supporter le maximum à eux seuls. C’est le champ du capital et des produits financiers qui doit être appelé à l’effort global, au-delà du strict équilibre des régimes de retraite. C'est cette grande réforme fiscale et sociale qui doit en ouvrir la voie.