16 juillet 2010 5 16 /07 /juillet /2010 06:00

14_juillet_feu.jpgIl n'y avait certes pas, mercredi matin, les milliers de Seynois et de visiteurs qui, le soir du même jour, ont envahi le parc de la Navale et le port pour assister au feu d'artifice, prendre un moment de détente à la terrasse d'un café, s'amuser à l'un des bals populaires, ou flâner en ville.

Mais je suis ravi de voir chaque fois grandir le nombre de participants au cérémonies commémoratives. Et c'était le cas pour ce 14 juillet 2010.

Merci à tous ceux qui ont contribué à l'organisation parfaite de cette commémoration, avec une mention particulière pour les bénévoles passionnés du "Group Military Conservation" qui ont fait défiler leurs vieux véhicules militaires, aux porte-drapeaux des associations patriotiques, aux représentants de nos armées, parmi lesquels les jeunes de la Préparation Militaire Marine, dont La Seyne est la marraine, qu'anime mon ami l'Enseigne de Vaisseau Arnaug Guillard, et un détachement du 54ème Régiment d'Artillerie jumelé avec notre ville, les sapeurs-pompiers qui ont fait défiler leurs moyens flamboyants, les volontaires de notre Réserve Communale de Sécurité Civile.

J'ai prononcé un discours que je vous livre...

"La tradition républicaine veut que, le 14 juillet, les autorités représentatives se rassemblent, avec le Peuple, pour renouveler le contrat passé entre la représentation nationale et la population, sous le regard des forces armées subordonnées à la République.

"C’est ce triangle vertueux - le peuple, les élus, la Loi - qu’il convient d’honorer.

"La permanence des symboles est une force parce qu’ils sont compris de tous. Ces symboles, chaque pays les crée à son image : un drapeau, un hymne, une devise.

"La France, dans ce tableau, à une responsabilité particulière parce que, dans un monde ancien, elle a promu une organisation nouvelle qui, en donnant à l’individu toute sa place, le situe dans un cadre collectif.

"Liberté individuelle, devoir collectif.

"La Marseillaise, chant de guerre, chant révolutionnaire, chant libérateur - « la haine des tyrans, la confiance dans la victoire, l’amour de la liberté » a écrit Stephan Zweig -, est le premier, et sans doute le plus célèbre, des hymnes nationaux modernes.

"Pourtant, il n’est reconnu véritablement qu’en 1879, après bien des vicissitudes, mais repris chaque fois que nécessaire par les insurgés républicains.

"N’oublions jamais cet enseignement de Machiavel : « La meilleure forteresse des tyrans, c’est l’inertie des peuples ». Aussi, ce chant, porteur d’un souffle, a-t-il été adopté par tous les défenseurs de la liberté et de la concorde nationale, et entonné en Europe, en Amérique du Sud, ou sur le continent africain.

"Ses paroles, décriées par certains, reflètent la détermination des patriotes d'il y a 220 ans à conquérir, contre l’ensemble des nations européennes hostiles, leur droit à instaurer la République.

"Bien sûr, aujourd’hui, le sens littéral de ses paroles heurte notre humanisme, mais le sens littéral compte bien peu au regard du symbole !

"Pourquoi nous indignons-nous devant quelques footballeurs égocentrés ? Mais parce que, au-delà d’eux-mêmes, ils représentent la Nation française, parce que La Marseillaise est jouée avant le match, et que, de fait, ils participent à l’idée que se font de la France les peuples du Monde.

"Et pourquoi la France est-elle, encore, reçue comme le pays des libertés et de la citoyenneté ? Parce que le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l’Homme, parce que la France assure l’égalité devant la Loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion, parce que, fière de sa devise et malgré les paroles guerrières de son hymne, elle prône la fraternité !

"C’est la Nation française, issue des Lumières, et première dans l’histoire, qui reconnut aux Juifs leur pleine et entière citoyenneté, au nom d’un principe universel, le refus des exclusions, j’ai nommé : la Laïcité.

"Ce mot n’a pratiquement pas d’équivalent dans la plupart des langues, et la laïcité serait donc bien une spécificité française. D’aucuns voudraient y voir un empêchement à rayonner ; gardons-nous de cette régression, Jaurès disait : « La laïcité est la seule doctrine qui ne soit pas contraire à la liberté, car elle se confond avec la liberté. »

"Oui, il est bon de rappeler, afin que nul ne l’oublie, que la République est indivisible, laïque, démocratique et sociale : préambule, article 1er, de notre Constitution.

"Comment vivre ensemble si chacun s’enferme dans sa culture sans chercher à comprendre celles des autres ?

"Tant de défis sont à relever dans les années à venir, en France, en Europe, dans le Monde. Ils sont économiques, sociaux, culturels, éthiques. Éthiques !... Je ne ferai pas de commentaire...

"Poser les problèmes, élaborer collectivement des solutions, c'est pour tous une responsabilité citoyenne qui s’inscrit dans une conception dynamique de la laïcité. Il y va de l’avenir de la démocratie.

"À la Seyne, nous prenons modestement notre part, avec nos conseils de quartiers, nos conseils municipaux des enfants et des jeunes, et, tout dernièrement j’ai eu le plaisir d’inaugurer un espace dédié à la démocratie locale et la gestion de proximité seynoise : « Le Comptoir citoyen ». Ce lieu doit vivre avec vous et par vous.

"Oh, certes, cela ne sera pas réalisé en un jour !...

"Et puis, je suis en colère. Notre commune a connu, un récent soir de fête, ce que certains appellent un fait-divers. Et que je qualifie plutôt de drame. Un acte de sauvagerie inouï. Il montre combien le déficit en éducation est profond, que la notion de citoyenneté est perdue pour beaucoup, parce que, désormais, dans cette société, peu importe la collectivité, peu importe l’autre, seule la réussite individuelle contre les autres est valorisée. Des jeux, de l’avilissement, du faux espoir !

"Pourtant, nous avons dans nos tripes cette aspiration au service des autres dans l'abnégation. Nous l'avons vu ces dernières semaines, avec l'élan spontané de solidarité qui s'est fait jour à l'occasion du désastre qu'ont connu la Dracénie et la basse vallée de l'Argens, tant chez nos employés communaux que chez beaucoup de nos concitoyens, que je salue, avec une pensée particulière pour ceux qui sont investis auprès des sinistrés dans le cadre de notre réserve communale de sécurité.

"Or, pour les catégories les plus vulnérables, l’accentuation des inégalités face au logement, à la santé, à l’école, aux loisirs, à l'accès à l'emploi, et même à la recherche d’un emploi, porte atteinte aux potentialités de développement individuel et social, et ce, notamment, par l’éducation.

"En effet, la situation des enfants et des adolescents en France est loin d’être satisfaisante. Beaucoup plus vulnérables que les adultes, ils sont directement touchés par les inégalités socio-économiques toujours croissantes qui entraînent précarité et pauvreté.

"Des réductions drastiques concernent les aides attribuées à la jeunesse, à la culture, à l’éducation, au sport. C'est inacceptable.

"Pour l’heure, chacun de nous peut désormais se poser des questions essentielles.

"Ne peut-on remettre en cause l’application dogmatique, voire cynique, du capitalisme libéral ?

"Ne peut-on mettre en œuvre une éducation qui permette à chaque enfant de devenir un adulte libre de ses choix, conscient de ses droits et de ses devoirs ?

"La Nation démocratique fonde sa légitimité sur un citoyen libre et informé. Ne peut-on permettre à chacun de connaître et maîtriser les moyens modernes d’information ?

"La liste des questions n’est pas exhaustive. Elle est au contraire très ouverte.

"Parce qu'il faut, en ce jour de célébration de l’avènement de la République, plus peut-être qu'en un quelque autre moment, rejeter tout asservissement de la pensée, et apprendre à juger et décider par soi-même.

"Il faut apprendre et admettre qu’autrui peut penser différemment.

"Oui, Français, nous sommes liés par une identité collective. Et la fête du 14 juillet, celle qu'on a appelée « la fête éternelle du genre humain », qui a symbolisé et symbolise encore l’espoir d’une ère nouvelle, cette fête participe à notre cohésion. Car c’est la vie partagée qui élève les concitoyens.

"Vive la République... la république de la Liberté, de l'Égalité, donc de la Laïcité, et de la Fraternité, celle qu'on appelle aujourd'hui la Solidarité.

"Vive la France !"

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Devoir de mémoire