2 juin 2021 3 02 /06 /juin /2021 17:58

L'État-arbitre a dû siffler pour le rappeler à M. Muselier. La course qu'il engagée avec ses pseudo-adversaires d'extrême-droite pour apparaître comme le champion de Provence de la sécurité ne lui rapportera aucune médaille. Ce sport n'est pas homologué par la loi pour les J.O. politiques régionaux.

Bien sûr la tranquillité publique, la sécurité des biens et des personnes et la justice constituent une part des garanties de liberté que doit assurer une nation républicaine. Mais c'est bien pour cela qu'il s'agit d'une compétence que l'État ne délègue pas aux collectivités et se réserve d'assumer.

Malgré ce, de même que « rétablir la sécurité » est l'une des « 5 priorités » du projet régional de l'extrême-droite de M. Mariani, le tout premier chapitre du bilan de M. Muselier est consacré à son plan... « Région Sûre ». Hors sujet...

 

UNE SITUATION PLUS PRÉOCCUPANTE QUE DANS L'ENSEMBLE DE LA FRANCE

Nul ne peut nier que la situation est préoccupante pour nos concitoyens. Elle l'est même plutôt plus en Provence que dans l'ensemble de la France métropolitaine. En attestent les derniers chiffres mis en ligne par le ministère de l'Intérieur d'où sont extraits les éléments ci-dessous.

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Hormis pour les violences sexuelles, notre Région connaît en effet plus de faits d'infractions, délits et crimes, rapportés au nombre d'habitants, que la moyenne de la France métropolitaine. Et si, sauf pour les violences intrafamiliales et sexuelles, le nombre de faits diminue dans l'ensemble du pays, y compris en Provence, cette baisse n'est significativement plus importante chez nous que dans la moyenne française que pour 5 types d'infractions sur les 13 recensés par le ministère.

 

DES INITIATIVES-GADGETS NE RELEVANT PAS DES COMPÉTENCES D'UNE RÉGION

On passera vite, le sourire tout de même en coin, sur les termes utilisés par M. Muselier dans son bilan, qui sont de la poudre aux yeux sémantique pour des citoyens auxquels on ne cesse de ressasser qu'ils doivent trembler à toute heure du jour et en tous lieux : « garde régionale forestière », « garde régionale des lycées », « garde régionale des transports », « pass sûreté », « détection des signaux de radicalisation », « criblage total des associations », « comparaison faciale », etc.

On passera aussi sur l'épisode grotesque des fameux « portiques de sécurité » installés dans certaines gares (pas n'importe lesquelles : à celle de La Seyne, par exemple, ville populaire, donc forcément repaire de malandrins, mais pas à celles de Bandol, d'Ollioules-Sanary ou de Toulon, communes exemptes de forbans coupe-jarrets, ainsi que ça a été relaté dans un article de ce blog puis un autre). Ça a bien fait rigoler, puisque ces engins détecteurs qu'on pouvait contourner ne servaient à rien, mais il aura fallu attendre plusieurs mois pour que M. Muselier réalise qu'il jetait l'argent par les fenêtres et qu'il mette fin à cette mascarade.

 

UN PARTI PRIS POLITICIEN DE CHASSE SUR LES TERRES DE L'EXTRÊME-DROITE

Alors, pour des missions qui ne sont pas de sa compétence, mais de celle de l'État, afficher que la Région a consacré « plus de 100 millions d'euros » à ce « plan Région Sûre » illustre que M. Muselier n'a pas lésiné sur les moyens pour son « ambition ». Mais surtout pour chasser sur les terres de l'extrême-droite totalitaire, stigmatisante et liberticide, et caresser dans le sens du poil ceux de nos concitoyens qui se convainquent qu'ils vivent dans un contexte criminogène et, quitte à perdre des libertés, rêvent de voir durcir les surveillances, les répressions et les châtiments.

C'est d'autant plus pitoyable que ce n'est pas l'ensemble des brigands qui est visé dans le bilan de M. Muselier, mais « les islamistes », « la délinquance en provenance des pays de l'Est » ou encore ceux qui blessent les forces de l'ordre « lors des manifestations » !

 

DES MESURES DONT L'EFFICIENCE NE SAUTE PAS AUX YEUX

Mais soyons objectifs. Regardons de près les types d'infractions qui concernent principalement les champs de compétences de la Région, notamment les lycées, les centres d'apprentis, les zones d'activité économique et les transports collectifs. Ce sont essentiellement des coups et blessures, vols, dégradations et destructions, et il faut se rendre à l'évidence : quelles qu'aient été les mesures engagées par la Région, à coups de millions d'euros, la situation s'est largement moins améliorée chez nous que sur l'ensemble de la France métropolitaine !

De l'argent de la collectivité gaspillé en pure perte, donc ? Rien de toute cette analyse n'est très scientifique, mais il n'empêche qu'on doit se demander si la Région n'aurait pas mieux fait de consacrer ses moyens aux missions qui sont les siennes. L'État le lui a d'ailleurs rappelé en lui interdisant d'aller plus loin dans ses projets ultra-sécuritaires qui ne sont pas du ressort régional : systèmes de comparaison faciale à l'entrée des lycées, achat de véhicules, caméras embarquées et autres gilets pare-balles pour la police d'État, ou de vidéosurveillance pour les communes.

 

UNE RÉGION DISPOSE DE LEVIERS DE PRÉVENTION, ENCORE FAUT-IL LES ACTIVER

Au lieu de cela, M. Muselier aurait pu mieux soutenir l'économie sociale et solidaire, celle des travaux publics et de la rénovation de l'habitat, de la gestion des déchets, des "ressourceries" ou des énergies propres, celle des filières de proximité, toutes facteurs d'emploi, notamment pour les personnes non qualifiées qui comptent hélas au nombre de ceux qui, désespérés, peuvent être tentés d'emprunter de mauvais chemins. Il aurait pu se garder de supprimer les aides régionales à l'accompagnement social et éducatif des habitants fragiles des quartiers populaires urbains, notamment des jeunes vulnérables, à la formation professionnelle, à la réinsertion de ceux qui ont été en rupture. Là, il aurait agi dans le cadre des compétences d'une Région. Et il aurait pris sa part dans la prévention des déviances et de l'insécurité.

Et il aurait pu être aux côtés des maires et présidents d'intercommunalités qui se battent sans cesse pour que l'État assume ses responsabilités en matière de police et de justice pour leurs territoires, et qu'il dote les casernes de gendarmerie, commissariats de police, tribunaux et services d'éducation judiciaire et de probation, de ressources humaines qualifiées et en nombre suffisant, et de moyens matériels et logistiques efficients pour accomplir leurs missions républicaines régaliennes.

 

Tout peut changer pour plus de pertinence et d'efficacité. Le "Rassemblement écologique et social" qu'anime Jean-Laurent Felizia ne participe pas au championnat de sécurité de façade auquel se livrent MM. Mariani pour l'extrême-droite et Muselier pour la droite. Il ne nie pour autant pas les problèmes, mais il se propose d'apporter sa contribution de fond à leur résolution par l'accès à l'emploi résultant d'une nouvelle dynamique économique régionale compatible avec les enjeux environnementaux et par le soutien à toutes les initiatives, notamment associatives, concourant à la prévention, l'insertion, l'éducation et la citoyenneté en plaçant l'Humain au cœur. Et en luttant avec les élus et les habitants des territoires pour que l'État républicain assume partout ses propres responsabilités de police et de justice.

 

 

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Publié par Marc Vuillemot - dans Action régionale Civisme - prévention et sécurité