Décidément, le temps de la campagne électorale est propice aux racontars en tous genres. C'est notamment vrai en matière de sécurité, sujet qui est au cœur des préoccupations de nos concitoyens et conduit des candidats à la surenchère. Certains doivent se dire que plus c'est gros, plus ça passe, et plus ça permet d'engranger des voix, en tirant profit de l'inquiétude des citoyens qui ne prennent pas le temps de vérifier la véracité des faits ou la faisabilité des engagements.
Après M. Muselier, Républicain-Marcheur, qui chasse sur les terres de l'extrême-droite, c'est naturellement cette dernière et son guide régional, M. Mariani, qui s'érigent en champions de la lutte contre les malandrins qui est leur fonds de commerce.
Sauf que la plupart de leurs promesses sont irréalistes, voire illégales...
UNE POLICE DES TRANSPORTS, C'EST DE LA COMPÉTENCE DE L'ÉTAT
En s'engageant sur la création d'une « vraie police régionale des transports, sous l'autorité du préfet de police », M. Mariani enfume les électeurs. Il l'écrit lui-même en annonçant placer ce service sous la responsabilité d'un représentant de l'État qu'est un préfet : la police des transports résulte d'une décision d'un gouvernement et non d'un conseil régional. Un article d'un site informatif sur les métiers de la police et la gendarmerie l'explique dans le détail.
Si une commune (ou une intercommunalité dont les membres l'auraient décidé) a, de par la loi, la possibilité d'exercer un pouvoir de police, ce n'est pas le cas d'une collectivité régionale. En promettant cette création, M. Mariani rêve de jouer le rôle de celui qui commande une tournée générale et laisse le soin à un autre, au bout du comptoir, de régler l'addition.
GÉRER LES MURS ET LA LOGISTIQUE DES LYCÉES N'AUTORISE PAS À SE MÊLER D'ÉDUCATION ET DE PRÉVENTION
Mais M. Mariani ne s'embarrasse pas plus du ministère de l'Intérieur que de celui de l'Éducation nationale. Son serment de recruter « des agents de sécurité qui interviendront dans le cadre d' « Unités Mobiles de Sécurisation des lycées » est tout aussi irréaliste que son engagement pour une police des trains régionaux.
Ce n'est pas comme ça que ça se passe. La responsabilité de la prévention et du règlement des incivilités et méfaits des lycéens canailles relève des chefs d'établissements scolaires, et pas « d'agents de sécurité ». C'est pour ça qu'il existe dans l'Éducation nationale des métiers dédiés, ceux d'assistants d'éducation (les anciens "pions") qui s'exercent sous la conduite de membres de l'équipe de direction d'un lycée, les conseillers principaux d'éducation (les CPE, qu'on appelait jadis les "surveillants généraux" ou "surgés"). M. Mariani prend ses désirs pour des réalités : ce n'est pas parce que la Région a la responsabilité de la construction, l'entretien et la logistique des lycées que ça l'autorise à se mêler de leur fonctionnement qui demeure heureusement une compétence régalienne que se réserve l'État.
LE "3919" EXISTE. ON N'A PAS BESOIN D'UN NOUVEAU "22 À ASNIÈRES" !
M. Mariani, se voyant déjà supplantant le ministère de l'intérieur et celui de l'Éducation nationale, assure aussi se substituer à la ministre déléguée chargée des Droits des femmes qui exerce la tutelle du "3919", le service téléphonique pour les femmes victimes de violence.
En faisant briller la création d'un « numéro gratuit régional dédié pour l'écoute et l'assistance aux femmes victimes de violence », M. Mariani réinvente l'eau tiède, mais surtout ajoute de la confusion dans un contexte où les victimes n'ont pas besoin d'être plus déboussolées par un nouveau numéro d'appel que ce qu'elles sont du fait de leur dramatique situation.
ET BIEN SÛR LE SEMPITERNEL COUPLET "ÉTRANGER = DÉLINQUANT"
Enfin, entonnant le refrain habituel de l'extrême-droite populiste reliant accueil des réfugiés et aggravation de l'insécurité et la délinquance, M. Mariani fait serment de s'opposer « aux relocalisations de migrants dans nos villes et villages ». Et là encore il a tout faux et ment aux Provençaux. C'est, sous la tutelle du ministre de l'Intérieur, la ministre déléguée chargée de la Citoyenneté qui a compétence pour le suivi du Schéma national d'accueil des demandeurs d'asile et d'intégration des réfugiés et en aucune façon un président de Région. Il y a et il y aura des centres d'accueil répartis sur l'ensemble du territoire national sur décision du gouvernement, quoi que dise ou fasse M. Mariani, si par malheur les Provençaux lui font confiance.
Quant à ceux des migrants qui sont des mineurs isolés, ce sont les Départements et non les Régions qui en ont la responsabilité au titre de la compétence que leur impose la loi en matière d'aide sociale à l'enfance. M. Mariani a peut-être trop lu les "professions de foi" de ses amis candidats d'extrême-droite aux élections départementales, dont l'essentiel du projet consiste à affirmer qu'eux seuls « mettront un terme au scandale » de l'accueil et l'accompagnement des enfants ayant fui les misères et les drames de leurs pays d'origine, qui, eux aussi, mentent comme des arracheurs de dents car cette mission humaniste d'assistance est obligatoire par la loi.
FACE AUX SURENCHÈRES INEPTES, DES PROPOSITIONS RÉALISTES ET DE BON SENS
La droite et l'extrême-droite n'ont pas le monopole de la tranquillité publique et de la sécurité. Et les acteurs des gauches et de l'écologie ne sont pas des bisounours doux-rêveurs. Les maires issus de ces courants de pensée le prouvent chaque jour partout en France, en soutenant les acteurs de la prévention, en faisant vivre leurs conseils communaux de sécurité et de prévention de la délinquance et des radicalisations, en formant en continu et équipant leurs polices municipales, mais aussi en se battant pour obtenir de l'État qu'il assume sa responsabilité pour leurs territoires, pour que les policiers et gendarmes disposent de plus de moyens humains et logistiques, et pour que les sites les plus fragiles soient encore plus et mieux dotés dans le cadre des dispositifs de Brigades spécialisées de terrain, de Zones de sécurité prioritaire ou de Quartiers de reconquête républicaine.
Mais la gauche et l'écologie se refusent à faire des promesses intenables, parfois contraires à la Loi, pour une Région. Celles que formule dans son programme l'équipe du "Rassemblement écologique et social" de Jean-Laurent Felizia sont réalistes et de bon sens...