Ils l'ont fait. Ils ont osé. Jamais depuis longtemps pareille agression budgétaire des collectivités locales et des services publics n'aura été été à l'ordre du jour d'un vote d'une loi de finances.
Le « comptable en chef », M. Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, avec la complicité active de l'égérie es finances des députés majoritaires de La République en marche (LREM), ex collaboratrice d'une députée UMP et conseillère de ce parti, et ex cadre d'un groupe international de sociétés d'assurances, aura réussi sans trop de peine, avec le silence bienveillant ou contraint des parlementaires qui constituent la majorité d'aujourd'hui, à commettre l'acte le plus abject que les régions, départements, intercommunalités et communes auront eu à connaître depuis les lois de décentralisation des années 80, quelles qu'aient été les options politiques des gouvernements successifs.
Ils l'ont fait. Telles que votées, les dispositions de la loi de finances vont être dévastatrices pour les collectivités locales. Des territoires, notamment les plus pauvres qui accueillent les plus miséreux des résidents de notre nation, et des organismes publics comme les offices communaux et intercommunaux de l'habitat gérant non sans mal une offre si indispensable d'habitat social, vont être contraints, sinon à la faillite, du moins à la prise en main de leurs finances par les préfets, fût-elle contraire à la Constitution de la France, pour qu'ils rentrent dans les clous des mesures imposées par une Europe ultra-libérale et relayées sans état d'âme par le Premier Ministre. La Seyne et son office d'HLM Terres du Sud Habitat, fussent-ils reconnus comme productifs depuis des années d'efforts de gestion et de rigueur, la tête à peine sortie de l'eau, cumulent tous les indicateurs pour faire partie du lot des bannis.
Je le dénonce même si — car je dois être parfaitement objectif pour m'autoriser à déplorer ce qui ne va pas — mes collègues et moi, non sans mal, avons obtenu une rallonge de 20 millions d'euros (sur les 90 indispensables) pour la dotation de solidarité urbaine (DSU) et autant pour le fonds de solidarité pour les communes pauvres de la région Île-de-France. Mais on est à des lieues du simple nécessaire !
Notre députée ouest-varoise, que j'ai interpellée, comme les autres, sur le sujet plusieurs jours avant le vote final de la loi de finances, et que je sais préoccupée par les enjeux de nos territoires urbains fragiles, m'a écrit ces jours derniers, souhaitant comme moi « porter la parole des communes de France qui comptent des quartiers fragiles et paupérisés », qu'elle « pense effectivement que le même effort financier ne peut être imposé à toutes les communes de manière égale, mais qu'il est nécessaire de prendre en compte les ressources de chacune d'entre elles ». Elle, comme d'autres, je le sais, n'aura pas été entendue par ses collègues.
C'est dire le mépris que le Gouvernement de M. Philippe impose à ses parlementaires d'afficher à l'endroit des citoyens et des édiles de leurs circonscriptions, au risque de les contraindre à subir la qualification de parjures. Sauf à les considérer comme des « godillots », ce n'est pas très conforme à la tradition républicaine, tout ça...
Mais, à tout prendre, je préfère encore être à ma place qu'à celle de mes amis de gauche qui ont succombé aux sirènes du « nouveau monde » promis par M. Macron. On va se bagarrer. Comme on l'a toujours fait.