22 mars 2017 3 22 /03 /mars /2017 06:05

Nous étions, samedi dernier, rassemblés sur la place Laïk, notre historique agora du bas de notre marché provençal où les palabres vont bon train, pour accueillir comme nouveaux acteurs de la République, les Seynoises et Seynois devenus majeurs ces derniers mois.

Il s'agissait de leur remettre à la fois dans la solennité et dans la convivialité leur « Livret citoyen » et leur toute première carte électorale.

Le propos que je leur ai tenu à cette occasion...

 

« Mesdames, Messieurs,

« Et je m'adresse an particulier à vous les jeunes qui êtes ici, bien présents - et je vous en félicite -, pour cette remise du livret citoyen.

« Pour la plupart, vous venez d’avoir 18 ans et vous accédez à la pleine citoyenneté.

« Ce n'est pas rien, cette étape de votre vie, vous en avez conscience. Ce moment, nous le passons ensemble, ici, prenant à témoin nos concitoyens, sur une place publique, la place Laïk, au coeur de notre ville.

« C'est un acte symbolique bien sûr. Mais il marque le fait que vous devenez des citoyens de la République à part entière, par votre nouveau droit : voter.

« Je le disais, nous voici sur une place publique. Pourquoi ? D'abord parce que la République a besoin de transparence, elle doit, dès qu'elle le peut, s'exprimer au milieu du peuple.

« Car elle appartient à toutes et tous.

 

LA RÉPUBLIQUE, CE N'EST PAS SE RETROUVER DANS L'ENTRE-SOI

« Publique, notre rencontre aujourd'hui est également bien réelle. Elle n'est pas virtuelle, dématérialisée. Sans critiquer les réseaux sociaux, là, on n'y est pas... Nous ne sommes pas cachés derrière une adresse IP, nous nous regardons droit dans les yeux, on se fait un signe, on se serre la main ou on se fait la bise... Bref, on vit dans le monde réel.

« Ce monde réel qui peut être terrible, difficile, hostile parfois, c'est vrai. Mais qui recèle aussi tellement de richesses, qui peut être magnifique, plein de joie et d'espoir.

« La République, ce n'est pas non plus se retrouver entre soi, de façon égoïste, et encore moins agressive ou haineuse comme c'est le cas parfois.

« L'actualité de 2016, et ces tous derniers jours à Grasse, au lycée Tocqueville, montre que la violence folle, parfois sans raison rationnelle, parfois résultat du fanatisme et du désespoir... Et la peur, qui aveugle et empêche, justement, de se parler, de se comprendre, hélas, parfois...

« Vous l'avez compris. Plus la République est forte, forte de vous toutes et tous, plus elle sait s'ouvrir sur le monde et les autres. Affirmer notre identité ? Nos identités, bien sûr ! Mais pour nous enrichir de nos différences.

« Et faire obstacle à ceux qui n'ont pas compris les mathématiques et qui ne connaissent que la soustraction et la division. Jamais l'addition, la multiplication.

« Au contraire, être citoyen, c’est se donner la capacité, chacune, chacun, de s’élever au dessus de ses seuls intérêts, pour se soucier du bien public, de l'intérêt général.

 

DES VALEURS UNIVERSELLES

« Ces valeurs, historiquement, portent une dimension morale et universelle. Dois-je rappeler qu’elles ont inspiré, et inspirent encore, nombre de peuples qui cherchent les instruments de leur liberté ?

« Une liberté de pensée, une liberté d’agir, mais une liberté relative… En effet, cette liberté est inscrite dans le cadre de règles communes. L’histoire montre que l’excès de liberté des uns tourne immanquablement en excès de servitude de tous. La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent.

« Cependant le danger serait grand de ne pas user de notre libre arbitre et de ne pas le protéger pour tous. Notre devoir, votre devoir désormais, est de permettre la liberté de conviction des autres, les minoritaires, les faibles, les fragilisés. C’est cela être citoyen, c’est cela la République… quand elle est vertueuse.

« C’est un combat ! Ce combat n’est jamais fini. C’est à vous, à nous, tous les citoyens, d’être vigilants. Vous êtes nés à la fin d’un siècle qui connut le fer et le sang ; pourtant surgissent encore les démons qui ont fait le malheur du passé : antisémitisme, racisme, xénophobie… loin, très loin, de la notion républicaine de fraternité.

« Dans notre République, la première des valeurs réside dans la communauté de destin de chacun de ses fils et filles, qu’il ou qu’elle s’appelle Pierre, Djamila ou Cali. Ni l’origine, ni l’appartenance philosophique ou religieuse, ne doivent différencier les citoyens français, ils sont égaux en droits et en devoirs. La République doit protéger le faible, et se doit d’être solidaire.

« Vous l’avez sans doute appris à l’école, la vertu républicaine réside dans la séparation des pouvoirs : l’exécutif est tempéré par une justice indépendante (je ne ferai pas de commentaires), par un législatif créatif et représentatif. Le peuple, c'est-à-dire vous et moi, en principe, a le dernier mot.

 

UNE PIERRE ANGULAIRE : LA LAÏCITÉ

« Retenez que la vigilance, c’est vous, collectivement, par le vote, qui l’exercez. C’est vous qui donnerez à la République indignité ou vertu : désintéressez- vous de la chose publique et vous aurez, au mieux, une démocratie d’élus, dont les valeurs reposeront sur leurs seules qualités d’hommes… qui restent faillibles.

« Nous devons être attentifs à combattre l’exaltation des particularismes qui séparent, qui excluent. Avec, la liberté, la fraternité, l’égalité, la République repose sur une pierre angulaire : la laïcité.

« Le principe est inscrit à l’article premier de notre Constitution. C’est pourquoi le ciment commun reste nécessairement, encore et toujours, l’école publique, laïque et obligatoire. Elle a ses défauts, des échecs, mais aussi une volonté de cohésion sociale, un humanisme universel, des règles de vie commune, une valorisation des potentialités individuelles.

« Ainsi la République des citoyens est une volonté qui agit, qui a bataillé pour la justice sociale, qui a conquis l’éducation gratuite et obligatoire, le droit de grève, la liberté syndicale, la sécurité sociale. Pourvu que ça dure…

« La République des citoyens a su tendre la main à ceux dont la naissance pouvait être un frein. C’est la singularité de notre nation, de notre drapeau, du français langue commune, même si les langues minoritaires doivent avoir droit de cité : se battre pour la paix, la justice, les droits de l’homme.

 

LA TRANSMISSION DU SAVOIR, POUR PERPÉTUER LA RÉPUBLIQUE

« Pour finir, je vous dirai que le citoyen est un sujet de droit. Il jouit des libertés individuelles, la liberté de conscience et d’expression, la liberté de s’associer – indispensable loi de 1901 - la liberté d’aller et venir, de se marier, d’être présumé innocent s’il est arrêté par la police, d’avoir un avocat pour être défendu, de participer à la vie publique, de voter et de se présenter aux élections, et bien d’autres choses…

« En revanche, il a l’obligation de respecter les lois, de participer aux dépenses collectives en fonction de ses ressources, de défendre la société, … car attention, l’incivilité est la fille naturelle du sentiment que tout est dû sans contrepartie. Nous devons, chacun à notre place, agir en pleine responsabilité.

« L’une de ces responsabilités, - vous serez sans doute parents un jour -, est l’éducation. L’éducation se fait tout au long de la vie. Le Savoir, les savoir-être, les savoir-faire, sont des biens précieux. Il convient de les protéger, de les faire croitre, et, surtout, de les transmettre. Car le pouvoir n’est pas dans sa détention mais bien dans sa transmission.

« Je forme le vœu, en vous remettant ce livret citoyen, que vous contribuiez à préserver ce droit à la connaissance, à l’éducation, seule façon de perpétuer la République. »

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