Les révélations du journal "Le Monde" sur des fraudes fiscales font froid dans le dos. On parle de plus de 180 milliards d'euros dissimulés dans des paradis fiscaux avec la complicité d'une banque. Rien que pour les contribuables résidant en France, ça représenterait 6 milliards d'euros et environ 3000 personnes. Ça fait tout de même en moyenne plus de 650.000 euros pour chacun de ces présumés fraudeurs, qui ne doivent donc pas vraiment être en bas de l'échelle sociale...
Comme sûrement beaucoup de mes collègues responsables d'une mairie, je n'ai pas pu m'empêcher de rapprocher ces 6 milliards ayant échappé au fisc des 11 milliards de baisse des dotations que l'État va nous infliger entre cette année et 2017, mettant en péril les équilibres de nos collectivités et notre capacité à maintenir le service public auprès de nos concitoyens, seul véritable outil républicain de régulation des inégalités que l'austérité fait notamment subir aux plus humbles d'entre eux.
J'ai en mémoire cette intervention, il y a deux ans environ, de Gérard Filoche, cadre socialiste, s'insurgeant contre la perte de 25.000 emplois en douze ans dans l'administration fiscale, déplorant la baisse de 12% des investigations des situations des contribuables en cinq ans, avançant le montant pharamineux de 60 à 80 milliards d'euros échappant chaque année à l'impôt, et concluant : "Embauchez sous 12 mois au moins 1000 agents de contrôle fiscal pour renforcer les 5000 vérificateurs actuellement en poste. Chacune des nouvelles recrues rapportera à l'État au moins 2,3 millions d'euros par an grâce aux redressements fiscaux opérés, soit 40 fois le montant de son traitement !".
J'ai d'autant moins envie de me taire aujourd'hui que, d'ici deux mois, je dois proposer un budget communal au vote du conseil municipal. Un budget qui, pour être équilibré ainsi que la loi m'y oblige, me contraindra à ne pas remplacer nombre d'agents retraités, minorant ainsi la qualité des services, à rogner sur les subventions aux associations dont l'œuvre est pourtant si indispensable au maintien des équilibres sociaux, à réduire l'offre éducative, sportive, culturelle, solidaire, pourtant si nécessaire à l'éveil des consciences et la construction de citoyens éclairés et responsables, à diminuer les moyens engagés pour la prévention et la sécurité, ou à bricoler pour tenter de maintenir en état le cadre de vie urbain, les voiries, les espaces et équipements publics, qui se dégradent avec le temps.
Ce n'est plus possible. Je disais récemment à la presse que l'État doit revoir sa copie. Le triste fait divers de cette révélation de fraude à grande échelle prouve qu'il peut et doit s'en donner les moyens. Sans délai.