Plusieurs dizaines de riverains des quartiers de Sainte-Anne, Gaumin et La Canourgue ont répondu à notre invitation à se pencher en début de semaine sur l'avenir de leur site urbain dans une démarche préventive, active et coopérative afin de ne pas subir passivement l'application de la loi "solidarité renouvellement urbain" (SRU) qui risque, si l'on n'y prend pas garde, d'avoir un rude impact sur leur environnement et leur qualité de vie. D'où l'idée d'un "atelier urbain participatif"...
UNE OBLIGATION LÉGALE : RECONSTRUIRE LA VILLE SUR LA VILLE
La loi SRU est surtout connue pour son article 55 qui impose aux communes qu'elles disposent de 25% de logements sociaux. Mais ce n'est pas là le sujet. Cette loi, et d'autres textes qui l'ont suivie, visent aussi à contraindre à "renconstruire la ville sur la ville", pour mettre un frein aux expansions urbaines plus ou moins anarchiques en périphérie, aux quartiers qui sortent de terre dans les zones naturelles et agricoles des villages situés dans un rayon de quelques dizaines de kilomètres autour des centres urbains, défigurant leur environnement, sans services publics, sans lieux de vie sociale, bouleversant les usages, anéantissant l'agriculture périurbaine, et générant des modes de vie absurdes de repli sur soi, et où les heures de trajet, souvent en voiture individuelle faute de transports collectifs adaptés, nuisent autant à la qualité de l'air qu'à la qualité de vie de ceux qui doivent les subir.
FAIRE CESSER LES BOULEVERSEMENTS TOUT EN RESPECTANT LA LOI
Or, à l'occasion d'une succession, d'une mutation professionnelle, ou d'un changement de projet de vie, une propriété urbaine, par exemple une villa ancienne sur un terrain de quelques centaines de mètres carrés, comme on en connaît à La Seyne dans de paisibles quartiers urbanisés à la fin du XIXe ou au début du XXe siècles, autour du centre historique, peut se retrouver mise à la vente. Et, de là, tout peut arriver. Car ces territoires communaux sont prisés des constructeurs d'immeubles. Et il suffit parfois d'une seule opération immobilière pour bouleverser complètement un paysage urbain et la "qualité de ville" des résidents pavillonnaires des alentours. Contre cette évolution inquiétante, la panoplie règlementaire est bien mince : la commune n'a pas le droit de spolier les propriétaires qui peuvent vouloir vendre leur bien en modifiant le Plan local d'urbanisme pour rendre leurs terrains moins constructibles, ce qui leur ferait perdre de la valeur, et elle a obligation, par la loi SRU, de "densifier" les zones urbaines à proximité des centres anciens.
Et la situation devient encore plus périlleuse si, à proximité des propriétés pavillonnaires, existent des terrains jadis à vocation économique, aujourd'hui délaissés, avec des hangers désaffectés, des ruines de bâtiments artisanaux, à valeur moindre et offrant une possibilité foncière importante.
IMPOSER DES OPÉRATIONS D'AMÉNAGEMENT D'ENSEMBLE
Si l'on exclut le fait que la commune se rende elle-même acquéreur de toutes les propriétés de ces quartiers mises à la vente, ce qui imposerait de justifier ses achats en leur donnant une destination d'équipement public et coûterait une fortune que le budget de la collectivité ne pourrait supporter, une solution s'offre toutefois à elle pour minorer l'impact de telles situations inquiétantes pour les riverains qui tremblent à juste titre à l'idée de voir surgir à côté de leur paisible propriété un immeuble de cinq étages, avec mur borgne dominant leur jardin et leurs fenêtres, générateur de problèmes de circulation et de stationnement.
Cette solution est la formalisation d'un plan d'aménagement d'ensemble d'un quartier, permettant d'imposer la réalisation d'un projet unique et global, pouvant être un "éco-quartier", avec des règles de surfaces constructibles, de hauteur, d'alignement et d'implantation des immeubles, des obligations d'infrastructures de réseaux, de circulation et de parking, d'espaces à vocation publique, commerciale ou de loisirs, et de parti pris visuel compatible avec le reste des constructions antérieures du quartier.
La Seyne compte quatre sites que nous avons pu protéger d'un développement anarchique futur : l'un au quartier Brémond, en limite du quartier six-fournais Lombard, l'autre au quartier du Crotton, sur la corniche de Tamaris, et les deux autres dans les quartiers, de part et d'autre de l'avenue Ivaldi, qui faisaient l'objet de la rencontre que nous avons organisée avec leurs riverains et voisins l'autre soir (zones 2AU et 4AU sur l'image illustrant cet article, que l'on peut agrandir en cliquant dessus).
AUX HABITANTS EUX-MÊMES DE DESSINER L'AVENIR DE LEUR QUARTIER
Et, après des mois au cours desquels nous avons tenu de nombreuses rencontres et réunions d'échanges, sur place et à la mairie, nous avons mis nos concitoyens eux-mêmes au travail dans le cadre d'un "atelier urbain participatif" ! Sous la conduite éclairée d'un résident du quartier, lui-même urbaniste de métier, avec les personnels communaux, hors de la présence des élus, quatre groupes ont commencé à "bûcher" sur leur vision de ce que doit être l'environnement futur de leur morceau de ville. Le travail est lancé, il va se poursuivre, des points d'étape seront réalisés. Une démarche de démocratie participative est en cours, inédite à La Seyne hors sites d'HLM en rénovation urbaine.
Nul doute qu'il en sortira le meilleur, compatible avec la loi, préservant les intérêts des propriétaires vendeurs comme des résidents qui veulent continuer à goûter à la quiétude de leur zone pavillonnaire, et contraignant les futurs constructeurs d'une opération d'ensemble intégrée à son environnement, sans gêne fonctionnelle ni paysagère sur ses alentours et la ville.