La Bourse du Travail accueille depuis vendredi le congrès du Conseil National des Associations Familiales Laïques (CNAFAL). Une centaine de délégués de tous les départements de métropole et d'outre-mer se retrouvent pour faire le point de leurs missions de représentation des familles auprès des pouvoirs publics.
J'ai eu le plaisir de les accueillir et de prononcer une allocution d'encouragement pour leurs missions, tant celles-ci sont essentielles et difficiles par les temps qui courent. Extraits...
"Sachez que, de vos horizons divers, d’où que vous veniez, La Seyne vous accueille d’autant plus volontiers que ce qui vous unit, ce sont deux lois, et non des moindres : celle de 1901 sur la liberté d’association, et celle de 1905, de séparation des églises et de l’État. Et sachez aussi que ce qui vous unit nous unit, je me sens totalement des vôtres, et je peux m’exprimer au nom de mon équipe municipale. (...)
"Je sais que les familles laïques font du chemin dans les instances démocratiques représentatives de la famille. Et il y a encore bien du chemin à faire, ce combat est le vôtre, ce combat est le mien, il l’a été dans mon parcours professionnel au sein de l’Education nationale, dans mon quotidien durant des années au sein de tissu associatif seynois et dans mon activité de maire.
"Ce combat, porteur de sens, demande une énergie constante. Défendre la Laïcité est une nécessité à vocation universelle, préservant les libertés de culte et d’opinion et permettant de vivre ensemble dans un espace public concerté. Mais ce combat ne doit pas dévier de sa trajectoire et rester l’idéal à atteindre : il est fondamental si l'on veut faire une société ou vivre ensemble ne se résume pas à la somme de nos égoïsmes.
"Les associations, elles aussi, sont l’héritage de luttes pour une liberté de construire des projets partagés, d’utilité sociale, générateurs de richesses humaines et financières. Aujourd’hui, et je parle enfin de l’Etat, ces associations agonisent, vous êtes bien placés, vous toutes et tous pour le savoir, puisque vous devez le vivre dans vos structures. Difficultés financières provoquées, contrats précaires donnés comme des miettes aux asso puis supprimés sans autre forme de procès. Ici dans le Var, mais dans la France entière, la rentrée de septembre sera terrible pour la petite enfance et les crèches qui, pour certaines, comptaient sur des permanents en contrats aidés. Le résultat sera terrible pour ceux qui connaissent des difficultés financières, tandis que les autres, plus à l’abri, achèteront leurs prestations plus chères… et feront tant qu’ils le peuvent le dos rond. On ne prête décidément qu’aux riches.
"Je dois vous dire, qu’en tant que maire, j’en ai plus qu’assez, à l’heure où je vous parle, de voir mourir des associations mal préparées à évoluer dans ces revirements incessants et brutaux, dans cette politique d’effets d’annonce, de retrait, de coups de pub, de ne même plus pouvoir les aider alors même qu’elles fournissent sur mon territoire une action essentielle pour tous les publics, pour les publics souvent délaissés, et souvent dans le prolongement des politiques municipales. Jusqu’à quelles limites l’Etat se désengagera-t-il ? Des mouvements d’indignation de populations étranglées plantent leur protestation comme autant de tentes sur la voie publique. Le dialogue ne peut-il s’instaurer qu’après une immolation ? Les méthodes sont pour le moins barbares et, lorsque la barbarie est cultivée, nous tous sommes menacés.
"Et aujourd’hui, nous sommes menacés, en tant que citoyens, en tant que consommateurs, en tant qu’édiles, en tant qu’acteurs de la société civile, dans nos projets bénévoles, au cœur de nos activités professionnelles… Ce sentiment devient une réalité grave.
"Je veux retenir, j’y tiens, la leçon que le Conseil National de la Résistance édifia en vrai projet de société dans son programme pour l’après-guerre qui s’intitulait « Les jours heureux ». J’en adopte le titre, l’attitude et la posture, je le fais mien aujourd’hui encore plus qu’hier, je vous engage à le lire et à le faire vôtre, comme, si ce n’est déjà fait, à lire le discours de Stéphane Hessel, « Indignez-vous ».
"Je veux en effet croire que nous, nous tous, sommes autre chose que des chiffres, des quotas, des critères, des indices. Je veux croire que la démocratie doit prévaloir à la destinée d’obscures officines de notations internationales, d’agences assermentées instituées à la marge de toutes formes de dialogue civil, avançant tête baissée pour encorner du citoyen, fouler au pied les revendications, les préoccupations, et les inquiétudes des gens, des habitants, des usagers, qui voient par pans entiers sombrer des acquis fondamentaux.
"Le service public, tout comme l’action d’utilité publique et sociale, ne doivent pas faire partie des premières économies consenties qui auront des répercussions bien plus onéreuses à terme. Il faut veiller, sans cesse, à ce qu’on arrête de nous faire passer l’idée que la casse orchestrée du service public est la conséquence de son inefficacité, que la situation de péril, en la demeure associative, est la faute d’un manque de professionnalisme, que les valeurs républicaines sont obsolètes et que seule l’économie reste.
"Je ne crains pas de le dire : Sarkozy a réussi à affoler la boussole de notre société, à la désorienter, à perdre dans ce fatras ce qui nous fait vivre ensemble ; il a réussi à diviser, à surveiller, il a montré un pouvoir sourd et reste habilement aveugle.
"Face à cela, permettez-moi de vous féliciter pour le travail dans lequel vous êtes engagés, pour les valeurs pour lesquelles vous militez, pour la place du citoyen que vous continuez à oxygéner, à faire vivre malgré tout, pour le maintien sur la place publique d’une volonté de dialogue et d’expression collective et pour la prééminence de l’intérêt général et l’absolue nécessité de la démocratie."