J'ai, comme beaucoup de Seynois, été destinataire de « La lettre politique », un bulletin de quatre pages diffusé par le premier adjoint à la maire de La Seyne.
Son auteur maniant insidieusement l'allusion, le non-dit et l'affirmation sans fondement, jouant des peurs que provoque la période très dure que l'islamisme radical impose aux habitants des démocraties sur fond de crise sociale, sanitaire et économique, ce journal désigne à la vindicte populaire une partie de nos concitoyens et des acteurs du monde associatif seynois. C'est effrayant pour la cohésion sociale de notre ville.
Il en exhale des relents des pires périodes d'exclusion, de désignation de boucs émissaires, d'intolérance et de haine que notre pays, et d'autres encore plus en Europe, a connues au XXe siècle avec l'activisme des idéologies des ligues factieuses.
Comment un républicain, membre d'un parti centriste, peut-il en arriver à exprimer des idées que ne renieraient ni les pires tenants d'un totalitarisme excluant et violent, ni les extrémistes justifiant leur terrorisme par une lecture folle d'une religion, ceux-là mêmes que l'auteur prétend justement combattre ?
Les membres d'extrême-droite de la « coalition » qui a remporté les élections municipales l'ont-ils contraint à porter leur funeste parole ou l'ont-ils converti à leurs visions nauséabondes pour les valeurs de la République ?
Qu'en pensent les responsables du parti auquel appartient notre premier adjoint ? Qu'en pense le président de la métropole dont il est un des vice-présidents, lui qui a toujours fait preuve d'une position claire de fermeté et de refus de tout compromis vis-à-vis de l'extrême-droite ? Qu'en pensent les élus républicains de la majorité municipale avec lesquels il co-gère la commune, et en premier lieu la maire de La Seyne ? Compte-t-elle lui conserver sa confiance ?
J'ai heureusement aussi été destinataire d'un communiqué publié en réaction à ce bulletin infâme par les élus minoritaires des gauches et de l'écologie, ainsi que les partis qui les accompagnent. Ils ont eu raison de réagir, sans polémique, mais en rappelant la réalité des choses, et en alertant sur le danger des fractures qui risquent de survenir dans notre communauté communale aussi riche que fragile de par ses diversités. J'approuve sans réserve le contenu et le ton de leur réaction. Il est de mon devoir de le relayer ici...
COMMUNIQUÉSous prétexte de faire vivre le débat démocratique, M. Jean-Pierre Colin, premier adjoint au maire de La Seyne, diffuse à 25000 exemplaires un bulletin, « La lettre politique ».
À la lecture de son premier numéro, comment ne pas être choqué par la stigmatisation insidieuse de certains Seynois ? Il n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai après s’être illustré en conseil municipal par des propos digne de l’extrême-droite. Le propos est bien éloigné de la solidarité et du vivre ensemble qui devraient animer tout élu se réclamant de la République. Selon M. Colin, il serait en effet entretenu à La Seyne un « djihadisme d'atmosphère », dont seraient responsables, entre autres, des associations dont certaines sont accusées d'être parmi les « centres actifs d'un islamo gauchisme délétère ».
Cette attitude est indigne et irresponsable.
Au moment où nous sommes tous percutés par les crises sanitaires, économiques et sociales, nous avons besoin de bienveillance, de fraternité, de sens commun, de sérénité pour prendre soin de l’humain.
La globalisation stigmatisante d'une partie de notre population par le caractère captieux de ces écrits est d'autant moins digne d’un élu de la République qu’à La Seyne, ville historique d’accueil, nous expérimentons et cultivons depuis des siècles les modalités d’un vivre ensemble respectueux des uns et des autres.
La richesse du monde associatif seynois n’est pas étrangère à cette qualité de vie et aux relations fraternelles qui nous lient les uns aux autres. Nous avons à La Seyne une tradition d’Éducation Populaire animée notamment par les acteurs des associations, naturellement agréées par l’État pour œuvrer à l’émancipation de tous et à la formation des plus jeunes à l’exercice de la citoyenneté, vrais remparts contre les intégrismes.
Les associations agréées d’Éducation Populaire reçoivent ainsi des financements de diverses institutions publiques telles que l'État, la Région, le Département, la Métropole, la Ville, la Caisse d'Allocations Familiales. Leurs projets sont financés parce qu’ils répondent aux cahiers des charges attendus par chacune de ces institutions. Et elles sont à ce titre dûment contrôlées, tant sur le plan financier que celui de l’éthique.
Le cheminement de pensée de M. Jean-Pierre Colin est d'autant plus difficile à suivre qu’il est élu de plusieurs de ces institutions et que, s'érigeant en accusateur, il pointe de supposées défaillances de vigilance de la part des collectivités qu'il représente. Il attaque visiblement sans connaître. Le vrai courage serait d’engager le dialogue avec la population et notamment celle qui se trouve stigmatisée par ses écrits. Mais il ne connaît pas encore assez La Seyne, et il serait formateur pour ce néo-Seynois de rencontrer notre tissu associatif et nos habitants.
Mieux encore, il apprendrait que ces mêmes associations sont annuellement contrôlées par un commissaire aux comptes qui a l'obligation de signaler au procureur de la République tout manquement à la loi et aux règlements. Et que le rôle du commissaire aux comptes ne se résume pas au seul contrôle de l’utilisation des deniers publics mais aussi à celui du respect des statuts et de l’objet associatif. La vie statutaire des associations est autant contrôlée que leur bilan comptable.
Depuis 2014, la ville de La Seyne conditionne l’attribution de subventions à la signature de « La Charte d’engagement réciproque ». Cette charte fixe un code de bonnes pratiques, ainsi que les attentes et obligations mutuelles. Elle reconnaît le rôle majeur qu’occupent les associations et leurs importantes contributions à l’intérêt général. Elle entend encourager ce dynamisme associatif, et notamment l’implication citoyenne au travers du bénévolat. Fondée sur les valeurs républicaines « Liberté – Égalité – Fraternité - Laïcité », cette charte s’applique de facto aux associations à but non lucratif sur le territoire seynois et subventionnées ou aidées par la municipalité, ainsi qu’à toute autre association désireuse d’y contribuer et d’y souscrire. La signature de cette charte n’exclut pas la signature de conventions particulières (attribution de subventions, mise à disposition d’une salle, prêt de matériel, etc).
Les objectifs de cette charte sont les suivants :
rendre plus visible le rapport partenarial entre la ville et les associations ;
maintenir un lien permanent Ville / associations et développer le dialogue civique entre la Ville et les associations ;
encourager les dynamiques inter-associatives ;
respecter la liberté associative, garantir le pluralisme et l’équité ;
soutenir l’innovation et le développement social ;
favoriser l’engagement citoyen et la participation de chacun à la vie de la cité dans le respect de la laïcité.
Madame le Maire, qui, elle, est Seynoise, ne peut l’ignorer. Que pense-t-elle alors des écrits de son premier adjoint ? A-t-elle la même vision des choses ? La publication de M. Colin porte-t-elle une parole partagée par l'ensemble de la majorité municipale ?
Pour le groupe municipal « La Seyne, l’énergie positive pour une ville verte et ouverte » : Olivier Andrau, Hakim Bouaksa, Anthony Civettini, Cécile Jourda, Bouchra ReanoAvec : PS La Seyne, PCF La Seyne, EELV La Seyne, MRC La Seyne, GRS La Seyne, POC La Seyne
09/12/2020