28 juillet 2020 2 28 /07 /juillet /2020 08:15

Il n'y a pas si longtemps que ça, des inquiétudes se sont manifestées quant au devenir de « l'éducation prioritaire », ce dispositif qui vise à combler les inégalités de réussite à l'école du fait des situations sociales, économiques, culturelles des familles de certains sites urbains et ruraux vulnérables.

Craignant que, sous couvert de « proximité », cette politique nationale indispensable soit régionalisée et donc soumise aux enjeux politiques locaux, des voix se sont élevées pour alerter.

La création d'un Secrétariat d'État chargé de l'éducation prioritaire annonce-t-elle une redynamisation de cette politique égalitaire dans le cadre régalien national ou l'entame d'une partition suffisamment bruyante pour couvrir la sonnerie du glas qu'on envisagerait de sonner pour elle, comme certains le redoutent après les propos que le Président de la République a tenus en 2018 sur les stratégies de discrimination positive visant à réparer les fractures urbaines, jugées coûteuses et peu efficaces après 40 ans de mise en œuvre ?...

 

NON, L'ÉDUCATION PRIORITAIRE N'EST PAS DE L'ARGENT JETÉ PAR LA FENÊTRE 

Après quatre décennies de renforts de moyens engagés par l'État pour l'éducation, plus ou moins fluctuants suivant les gouvernements, il faut en effet reconnaître, on le voit bien à La Seyne – et on l'a mesuré avec force lors du confinement sanitaire et de l'enseignement à distance –, que les disparités de réussite scolaire entre enfants et jeunes des divers quartiers de résidence demeurent patentes. Et qu'il faut sans cesse sur le métier remettre l'ouvrage. Mais quoi de plus normal ? Les premiers bénéficiaires des années 80 sont devenus des adultes, et les générations nouvelles de nos quartiers vulnérables sont de plus en plus victimes de la pauvreté, principale cause des difficultés que rencontrent leurs enfants à tirer parti de l'éducation pour qu'ils réussissent leur future insertion professionnelle, sociale et citoyenne.

 

RÉNOVER L'ÉDUCATION PRIORITAIRE POUR L'AMÉLIORER, PAS LA DISSOUDRE...

Il n'y a pas le choix. L'éducation prioritaire doit être poursuivie et confortée. De même que certains sites ruraux, tous les quartiers « politique de la ville » doivent en bénéficier. Ce n'est d'ailleurs toujours pas le cas à La Seyne, malgré mes démarches constantes et les engagements des autorités académiques, puisque seul le quartier Berthe est « réseau d'éducation prioritaire », et non le centre ancien tout aussi socialement dégradé.

Les effectifs des classes doivent demeurer réduits et les communes doivent être aidées par l'État pour le permettre. Les enseignants doivent être mieux soutenus par des renforts humains plus significatifs qu'aujourd'hui. Des moyens de diversification pédagogique doivent leur être alloués par l'État. Leur engagement doit être mieux valorisé et rémunéré.

L'École, à tous ses niveaux, doit être plus et mieux ouverte à son environnement, partie prenante d'un projet éducatif de territoire, permettant une action éducative globale et cohérente, qu'elle soit menée par les personnels de l'Éducation nationale, par les parents et les fratries qui doivent être soutenus, et par les acteurs du socio-éducatif, du sport et de la culture qui ne doivent toutefois pas se substituer aux enseignants, qu'ils soient fonctionnaires des collectivités, salariés ou bénévoles des associations, dans l'esprit des programmes de « cités éducatives », promus naguère auprès du gouvernement par des maires de villes populaires, comme celui que nous avons obtenu pour La Seyne.

Il y a là un chantier dont Nathalie Élimas, la nouvelle secrétaire d'État, doit s'emparer. L'Association des maires Ville & Banlieue de France, portant la parole des territoires urbains sensibles, va certainement la solliciter en ce sens.

 

L'ÉDUCATION PRIORITAIRE DOIT DEMEURER UNE POLITIQUE RÉGALIENNE DE L'ÉTAT

Mais il faudra aussi l'alerter sur le fait que la régionalisation de l'éducation prioritaire pose question. Dans une académie comme celle de Nice, vouée à fusionner avec celle d'Aix-Marseille, il est à craindre que, une nouvelle fois, les radars de l'État soient focalisés sur les plus importantes métropoles.

Les élus locaux seynois et toulonnais, en lien avec les syndicats d'enseignants et associations de parents, auront intérêt à veiller au grain ; ce ne sera jamais du temps perdu que de se déplacer pour tanner avec vigueur les autorités académiques et ministérielles pour que les sites locaux d'éducation prioritaire ne soient pas les dindons des farces marseillaise et niçoise, leurs quartiers fragiles se taillant la part du lion des moyens que l'État doit continuer à engager. Sans cette ardeur revendicative et sans cadre national de suivi et d'évaluation, la situation pourrait gravement se dégrader dans certains territoires.

Ce serait tout de même le comble de générer de l'inégalité accrue en voulant, si la création d'un ministère dédié n'est pas de la poudre aux yeux, conduire une politique visant, justement, à combattre la plus injuste des iniquités, celle qui savonne la planche de l'avenir des petits de la République qui ont eu la malchance de naître et vivre dans des contextes sociaux dégradés !

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