Nous avons donc inauguré mardi soir notre nouvelle médiathèque Andrée-Chedid, en présence de François Lamy, ministre délégué à la Ville, de Robert Alfonsi et Mireille Peirano, représentant Michel Vauzelle, président du Conseil régional PACA, d'Ange Musso, vice-président de la communauté d'agglomération Toulon Provence Méditerranée, de Patrick Martinenq, conseiller général de La Seyne, et de bien d'autres élus, personnalités associatives, fonctionnaires, et citoyens. Le discours que j'ai prononcé à cette occasion...
"Vous n’allez rien y comprendre, mais c’est la deuxième fois que faisons une inauguration en ce lieu. Que je vous explique : la Médiathèque Andrée Chedid est une opération qui s’inscrit dans l’objectif de la ville et du bailleur social communal, « Terres du Sud Habitat », de réaliser un ensemble mixte alliant un équipement public à des logements. Et ce sont les logements que nous avons inaugurés naguère.
"Si, en matière culturelle, nous ne devions avoir qu’une seule ambition, ce serait - mais ça n’a rien de nouveau - la culture de tous, pour tous. Cet équipement, lieu à usages multiples, pour les gamins autant que les seniors, de l’immeuble de la rue d’à côté comme des pavillons des communes balnéaires voisines, a pour vocation de faciliter l’échange, la sociabilité, la rencontre, l’accès et l’apprentissage au savoir, et les loisirs.
"Il n’est dès lors pas anodin d’appeler cette médiathèque Andrée Chedid. Et je veux saluer M. Louis Chedid qui nous fait l’honneur d’être des nôtres. Son épouse, Andrée Chedid, romancière, nouvelliste, dramaturge, et surtout poète, avait des origines orientales et a su exprimer sa tendresse en mots anglais autant qu’arabes et français. Elle était née en Egypte et vous avez vécu tous les deux au Liban.
"Andrée Chedid est l’incarnation d’un multiculturalisme fécond. Son œuvre est une quête d’humanité, un questionnement sur la condition humaine, en particulier dans le monde méditerranéen. Elle est un trait d’union entre les générations, les cultures savantes et populaires. Elle a offert de magnifiques chansons à son petit-fils Matthieu, plus connu sous son nom de scène de -M-.
"Dans cette veine, développer l’accessibilité aux lieux de culture au plus grand nombre est un souci partagé par l’architecte Jean-Louis Duchier qui a pensé cette belle médiathèque, son intérieur comme sa grande façade vitrée qui s’illumine à la nuit.
"A La Seyne, désormais, on accède toute l’année au bibliobus et à nos trois bibliothèques : l’historique, celle du centre-ville que nous appelons Pierre Caminade ; celle du Clos Saint-Louis, dans le sud ; et la médiathèque Andrée Chédid, ici, au nord.
"Ces bibliothèques ont chacune leur spécificité, ce qui fait que toutes sont dédiées à l’ensemble de la ville et des alentours et que chacun, où qu’il réside, viendra chercher ici ce qu’ils ne pourra trouver près de chez lui, et vice versa.
"Et, rassurez-vous, il y aura des livres partout.
"Un mot de remerciement aux différents financeurs : TPM (9%), le département (8%), et l’État, ça, c'est du rarissime... 78%, dont 17% du ministère de la culture et 61% de l’ANRU. Ce qui ramène la part communale à... 5%. Je le dis juste histoire de faire taire ceux qui se gargarisent de ressasser que « dans le budget de la ville, il n'y en a que pour Berthe »...
"Pour l’équipement, 900.000 € sur 3 ans : la ville contribue pour 700.000 € et la DRAC pour 200.000 €. On trouvera sur 1.000 m², 20.000 livres, 7.000 CD et 5.000 DVD. Je vous renvoie au dépliant « Bibliothèques, mode d’emploi ».
"Gratitude aussi pour l’équipe d’Annick qui mouille la chemise depuis des mois pour que ça marche. Pour l’équipe de Pierre, celle de Joël et celle de Marcel-Paul. Pour celle de Caroline, et Philippe, et Boris. Et pour Anne qui a mis autant de liant que d’huile dans les rouages. Et pour tous les besogneux enthousiastes * qui ont travaillé au projet.
"Alors, oui, la République qui se respecte a des rêves. Celui, par exemple, où la culture fait partie intégrante de l’éducation au même titre que les notions de liberté et de justice sociale. Parce que la culture est l’une des réponses à la quête de lien social.
"Or les mutations technologiques, l’accroissement des loisirs développés par une industrie qui excelle à alimenter le désir... plutôt que combler l’écart, assoient la distinction.
"Il n’est certes pas du pouvoir des communes de pallier toutes les insuffisances d’un système éducatif et culturel pour le plus grand nombre. Cette problématique reste, avant tout et malheureusement, conditionnée par l’héritage familial, le milieu social d’origine, et le niveau scolaire.
"C’est pourtant dans la commune que le citoyen aspire à trouver des réponses à un ensemble diversifié de besoins. Et c’est bien la destination très concrète de cet équipement.
"Il s’inscrit dans un tout simple autant que vaste et ambitieux programme de rénovation urbaine : redonner enfin à Berthe sa dimension de « morceau de ville ». Il s’agit de transformer ce qui était devenu un « non lieu » en un territoire où il y a de la résidence, du commerce, de l’économie, du service. De la vie, quoi.
"Requalifier les espaces publics, construire du neuf et du beau et démolir de l’insalubre et de l’invivable, réhabiliter, « résidentialiser » comme on dit, jusqu’à dénommer les rues et les résidences dans le cadre de comités participatifs. Et je dois dire que nombreux ont été les habitants à se passionner pour ce dernier projet. Ils ont dû parfois se pencher sur le passé des lieux, sur les personnalités, les familles qui les ont fait vivre avant, pendant et après qu’ils ne soient devenus dans les années 60 une... Zone à Urbaniser en Priorité.
"La tâche de la reconquête urbaine est parfois très triviale : évacuer systématiquement les épaves, réparer tout de suite les dégradations, assurer une propreté quotidienne, rechercher l’appui et le concours des habitants, adapter un éclairage public satisfaisant, entretenir et embellir les services communs, les espaces verts, les places publiques.
"C’est aussi profiter de la rénovation pour offrir des mesures alternatives à la sanction, animer des dispositifs d’insertion, favoriser les initiatives locales de réparation et redynamisation. Toutes mesures qui ont existé, qui ont disparu, et qui, Monsieur le Ministre, ré-existent petit à petit sous notre action conjointe.
"Je ne saurais trop remercier les associations, les bénévoles, les agents des services publics, de la commune et de l’État, qui s’investissent souvent sans compter. Ils contribuent, ô combien, au mieux vivre à Berthe.
"La mise en place d’une Gestion Urbaine de Proximité, d’un juste équilibre entre constructions publiques et privées, la réorganisation de l’espace public, participent à ce renouveau que j’appelle de mes vœux.
"Mais le changement ne sera durable que dans l’appropriation et dans l’Education. « C'est dans le gouvernement républicain que l'on a besoin de toute la puissance de l'éducation », écrivait déjà Montesquieu. L’enjeu est, dans ces conditions difficiles, de construire une politique culturelle et éducative qui permette, surtout à notre jeunesse, de trouver les ressources de son autonomie, de sa responsabilisation - résister à la frustration, accepter les contradictions, trouver les priorités.
"Nous voulons que cette Médiathèque en soit l’instrument pour comprendre le monde dans lequel nous vivons, respecter notre environnement, permettre le libre-arbitre, et inciter à s’associer pour chercher ensemble le bien commun.
"Oui, La Seyne affirme son ambition de promouvoir une politique d’accueil, d’éducation, de formation, globale et transversale.
"Vous le savez, nous sommes tributaires du contexte sociétal. La promesse du tout, tout de suite, a accouché d’enfants impatients, exigeants. Les petits abandons successifs, la montée des individualismes, la recherche d’une réalisation immédiate des moindres désirs, met en jeu des phénomènes qui menacent la cohérence sociale.
"Ces difficultés conduisent à faire appel à de multiples formes extrascolaires d’apprentissages. Ce sont elles qui mettent en jeu l’ensemble des relations de la famille, de la profession, de la cité, des groupes sociaux, des communautés professionnelles et spirituelles. Ici, des structures comme le Centre Mandela, le Foyer Wallon, la MAEFE, l’APEA, Nouvel Horizon, l’OMASE, Les enfants de la Teranga, Femmes dans la Cité, Le Petit Prince, les clubs sportifs, les équipes de Tisot et de Renard, et beaucoup d’autres, sont indispensables.
"Le Contrat Urbain de Cohésion Sociale se doit de continuer à les soutenir. Et ce partenariat repose sur la conviction qu’il est possible d’apprendre les uns des autres, et que tous et toutes peuvent être des agents de changement.
"Et nous ne pouvons favoriser l’équité républicaine qu’en favorisant les regards croisés, à l’opposé d’un repliement catégoriel. Alors, cet équipement, qui, d’ores et déjà, va conventionner avec les bibliothèques des écoles, ainsi que - je le souhaite mais j’y mettrai mes conditions de co-éducateur public qui a son mot à dire sur le territoire - le centre de documentation du collège voisin, cet équipement, donc, est et sera un nouveau facteur d’égalité devant le savoir.
"C’est en proposant à l’enfant des activités, en permettant au jeune d’en vivre, que l’on découvre ce qu’il peut donner, ce qu’il peut faire, ce qu’il peut devenir… et que lui même, en s’emparant de ces découvertes, parvient à « faire œuvre collective ».
"J’ai des convictions fortes. Je suis pour une culture ouverte sur l’altérité et porteuse d’universalité. Je suis pour favoriser les échanges, les rencontres de jeunes – j’ai relancé les échanges internationaux et les jumelages avec nos villes étrangères amies, assoupies depuis des décennies - Je suis pour la lutte contre le crétinisme médiatique, mais je n’oublie pas que les nouveaux médias jouent un rôle déterminant dans la vie des jeunes, et même des ainés. Je suis pour le projet réalisé et non pour le miroir aux alouettes. Je suis pour la compréhension des difficultés sociales, mais je n’excuse pas les déviances.
"Au-delà de son offre d’objets de culture et de savoir, cette médiathèque est un équipement structurant qui contribuera à la cohérence et la continuité territoriale de la commune. Et de l’agglomération.
"Cette médiathèque, elle est simplement républicaine. Belle vie à elle."
* : Au risque d'en oublier, je pensais à tous ceux, d'hier et d'aujourd'hui, qui ont voulu que nous y parvenions : depuis Jean-Louis Respaud, puis Luc Patentreger et Gilles Triquet, adjoints à la culture, qui avaient fixé le cap des 3 bibliothèques de la ville, en passant par ceux qui se sont succédé au service municipal de la culture, et notamment aux bibliothèques (Bernadette, Françoise, Julie, etc.), ceux qui ont intégré le projet dans le Grand projet de ville, puis dans le PRU, ceux qui ont monté et suivi les dossiers au DSU, puis au GIP, puis au service en charge de la quête des ressources financières, et tant d'autres...