(suite de la première partie)
C'est comme si c'était fait ! Du moins si l'on en croit le mensuel varois "Métropole" (voir photo). Le Var serait découpé en six territoires et la couverture de "Métropole" suggère même qui seraient quatre des six présidents des futures intercommunalités ! Vive la démocratie !
Mais, enfin, le journal local ne fait que traduire la méthode imposée par le gouvernement. Parce que la méthode vaut son pesant d'or. Il faut que l'opération soit bouclée en quelques mois. Phase 1 : le préfet installe en avril une commission composée d'élus locaux (CDCI) et lui présente le découpage qu'il a imaginé, appelé "schéma départemental de coopération intercommunale". Phase 2 : d'ici au mois d'août, ou bien on propose un autre découpage qui doit recueillir 2/3 des voix de la CDCI, ou bien l'affaire est pliée. Phase 3 : tout ça est mis en place pour que, en 2012, le nouveau dispositif soit prêt à fonctionner.
Ça s'appelle de la marche forcée. Et du déni de démocratie.
Car, enfin, que fait-on de la légitimité que les élus locaux tirent du suffrage universel ? N'ont-ils plus le droit de décider, comme le prévoit la Constitution de la République française ("les collectivités s'administrent librement"), d'avec qui ils veulent coopérer ? Ne peuvent-ils plus porter les aspirations des citoyens qui les ont élus ?
Comment est-il possible que l'on impose un découpage arbitraire qui, sur bien des points, ne tient nullement compte de de l'histoire de la coopération intercommunale ? Que fait-on des huit "territoires" sur lesquels s'appuie depuis des années le Conseil général du Var, qui ne se chevaucheraient plus avec les six "territoires" imposés par le préfet ? Que fait-on des actuelles communautés de communes et d'agglomération qu'on retaille à la hache ? De quel droit décide-t-on que telle commune, qui a choisi jusqu'à présent de rester hors intercommunalité, sera intégrée d'office dans un groupe de communes ? Sous quel prétexte redessine-t-on le "Pays" de la Provence Verte sans en parler avec les maires qui l'ont patiemment bâti ? Pourquoi foule-t-on au pied les regroupements volontaires de communes dans les parcs naturels régionaux, existants comme celui du Verdon, ou en devenir comme celui de la Sainte-Baume ou celui des Maures ? Dans quel dessein ne consulte-t-on pas préalablement les élus du Conseil Régional qui a, de par la Loi, compétence en matière d'aménagement du territoire ? Ne craint-on pas, dans la mesure où il serait peu probable que le gouvernement accepte trois "métropoles" en région Provence Alpes Côte d'Azur (Marseille, Nice et Toulon), que, à terme, le futur territoire du "Grand Toulon", désormais contigu au territoire du "Grand Marseille", soit absorbé par ce dernier ? Le nombre des questions est impressionnant.
Et, telle qu'elle est prévue, cette reconfiguration est celle de la polarisation, de la spécialisation et de la compétition entre les territoires. Comme le remarque justement Cécile Helle, vice-présidente de la Région, "on risque de voir émerger de nouvelles féodalités et d'encourager les tentations hégémoniques de l'urbain au détriment du périurbain et du rural".
Ces nouveaux territoires risquent de perdre leur taille humaine. Il faut craindre que les maires n'aient plus grand chose à gérer et qu'une concentration des pouvoirs entre les mains de futurs "technocrates" éloignés des citoyens n'accroisse encore la distance entre les lieux de décision et les citoyens.
Cette affaire-là ne va vraiment pas dans le bon sens. Sauf à penser que le détricotage des acquis démocratiques de la décentralisation engagée par F. Mitterrand dans les années 80 serait une bonne chose. On ne peut pas en rester là.