Comme beaucoup de mes camarades et sympathisants socialistes, j'ai appris le choix de Pierre-Yves Collombat, notre unique parlementaire de gauche varois (un seul sur onze députés et sénateurs ! Comme si la gauche ne représentait pas même 10% du corps électoral du département... Ah, on peut dire qu'elle est faite sur mesure pour certains, la loi électorale ! mais ce n'est pas le sujet du moment...), le choix, donc, de quitter le groupe socialiste du Sénat auquel il appartenait en sa qualité de sénateur PS, pour rejoindre le groupe des Radicaux.
Tout le monde s'en fout et ça ne va pas changer le monde, me diront mes visiteurs. C'est un peu vrai, tant, par les temps qui courent, nombre de nos concitoyens en sont à compter leurs économies pour se loger, assurer la mobilité nécessaire à l'exercice de leur travail quand ils ont la chance d'en avoir un, ou à la recherche d'emploi, ou assurer une qualité de vie la moins indécente possible à leurs familles, surtout à l'approche des fêtes de fin d'année.
De mon côté, j'ai tout de même un peu discuté avec notre sénateur. Pour comprendre. Contrairement à ce qu'indique le titre d'un article d'un quotidien régional, il n'a pas quitté le Parti socialiste. Juste le groupe des sénateurs socialistes.
Et, si personne ne le dit, moi je dis pourquoi il a fait ça. C'est parce que, dans la répartition des responsabilités entre les parlementaires du Sénat dont la nouvelle majorité issue des élections de septembre est désormais à gauche, on aurait cru intelligent de confier la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation à... un sénateur centriste. Un de ceux par qui le malheur des collectivités locales arrive, qui ont voté avec leurs alliés de l'UMP la réforme territoriale contre laquelle une majorité d'élus locaux est aujourd'hui vent debout. Parce qu'elle saborde l'édifice républicain et met à mal la Constitution de la Vème République qui stipule que les collectivités s'administrent librement. Si c'est avéré, allez comprendre !
Moi, j'ai un peu de mal à piger. La question de la réforme territoriale est un enjeu majeur pour lequel nous, les maires et les élus locaux, nous ferraillons, dans presque tout le pays, face à des préfets qui appliquent (et nul ne peut leur en vouloir de faire leur boulot) à la virgule près les termes de la Loi, tentant d'imposer à marche forcée un regroupement des communes contre les volontés de leurs édiles (même après que Fillon a dit qu'il fallait prendre son temps, mais un propos de Premier Ministre ne fait pas force de loi...). Le sujet est si sensible et si important pour notre démocratie qu'il a indiscutablement amené des "grands électeurs" de droite et du centre à voter pour des candidats sénateurs de gauche il y a quelques semaines, entraînant le basculement de la majorité sénatoriale.
Et, alors qu'il faut que le Sénat se prépare à engager un bras de fer déterminé avec le Gouvernement et l'Assemblée Nationale pour les contraindre à faire machine arrière, voilà qu'on confierait le pilotage de ce secteur capital à... un adversaire.
Il est des fois où on marche sur la tête. Et je serais bien curieux de savoir ce qu'en pensent la majorité de nos sénateurs socialistes et nos partenaires des autres formations de la gauche et de l'écologie. Mais il est des soirs où je dois être un Martien pour me poser de telles questions.