Autant je suis partisan résolu de la libre administration des communes avec un rapport à un État accompagnateur, conseilleur, assistant, contrôleur de la légalité, et je joue mon rôle avec enthousiasme et détermination, autant il est des jours où mon découragement alterne avec ma colère, tant il semble que rien n'est fait, en haut lieu, comme on dit, pour que cette belle mécanique de l'édifice institutionnel soit huilée comme il le faut, dans un rapport de confiance, de reconnaissance et de respect mutuels.
Découverte de la presse au petit matin, la tasse de café frais à portée de main. Tous les journaux évoquent les vingt-six mesures qui doivent permettre d'améliorer la sécurité routière après le constat d'une grave évolution de la mortalité. Très bien. C'est du bon sens.
DES TRAVAUX OBLIGÉS ? QUI VA PAYER ?
Et je tombe sur l'une de ces mesures, qui ne me semble en effet pas bête : on va devoir supprimer les places de stationnement situées à moins de cinq mètres d'un passage protégé pour piétons. C'est vrai, chaque conducteur a dû le vivre quelquefois dans sa vie, une voiture garée cache à sa vue les piétons qui entament leur traversée de la chaussée. Le danger est réel. Bonne idée.
Une question me taraude aussitôt : qui va payer les travaux de réaménagement de voirie ?... Ça, ce n'est pas dit dans les journaux, mais je ne me fais guère d'illusion, c'est dans la cagnote collective alimentée par le contribuable communal qu'on va piocher les moyens nécessaires. Là, normalement, je devrais embrayer sur une petite rage matinale, mais, me serais-je levé du bon pied, je me dis que ça vaut peut-être le coup de creuser un peu la question, tant la protection des personnes est un sujet d'importance.
HÉCATOMBE ? EN TOUS CAS PAS CHEZ NOUS !
Et je vais donc consulter les derniers chiffres sur le site Internet de la préfecture de la Région Provence Alpes Côte d'Azur, ceux arrêtés à novembre 2014. Et, là, surprise, l'hécatombe annoncée n'en est pas une, au contraire.
Dans notre région de cinq millions d'habitants, qui accueille plus de deux millions de visiteurs en période estivale et qui est traversée par des flux impressionnants de voitures et de poids lourds sur l'axe Barcelone-Gênes, en constante augmentation, ce qui constitue tout de même un panel statistique fiable, il y a eu près de 4% de tués en moins par rapport à l'année précédente. Dans le seul Var, le résultat est certes moins bon que sur l'ensemble de la région, car on relève exactement le même nombre de morts (68) sur la période que sur la même en 2013.
Chez nous en tous cas, on est donc loin de la boucherie exponentielle annoncée et que nous avons sûrement tous gobée !
Au deuxième café, déjà bien remonté, je creuse un peu les statistiques sur le site de l'observatoire de la sécurité routière du Var. Et, devinez quoi, de 12 piétons morts en 2013, dont la moitié sur un passage protégé, on est revenu à 7 en 2014, dont... un seul sur un passage protégé... Et aucun de tous ces malheureux à La Seyne...
ET SI ON SE CALMAIT UN PEU AVEC LE JACOBINISME ARASO-UNIFICATEUR ?
Du coup, au troisième café, ma religion est faite. Ils m'ont fait en 2014 le coup des rythmes scolaires, qui coûtent à la commune plus du double de ce que l'État lui verse, pour un résultat lamentable, démantibulant toute l'offre antérieure périscolaire dont bénéficiaient 2085 enfants le mercredi matin et mettant dès 15h45 à la rue 90% des gamins de certaines écoles de nos quartiers populaires, au risque que ne s'amende un peu plus le terreau de l'inactivité sur lequel se développent les pépinières de futurs irresponsables aux consciences malléables par n'importe quel obscurantiste barbare !
Alors, s'ils veulent que je réaménage les voiries autour de tous les passages protégés seynois, ils viendront le faire eux-mêmes, avec les crédits de leurs ministères. Moi, je conserverai les maigres ressources dont je dispose pour poursuivre, dans le dialogue avec mes concitoyens dans chaque quartier, les modestes et utiles aménagements de sécurisation routière que, depuis quatre années, nos techniciens élaborent avec les habitants eux-mêmes au cours des rencontres régulières que je tiens dans tous les quartiers de La Seyne, jusqu'aux plus reculés.
Leur slogan, "la sécurité routière, c'est l'affaire de tous", ils ne pourront pas me reprocher de l'avoir concrètement traduit en actes dans une démarche de démocratie participative.