On peut dire que je suis en colère. Oh, je ne suis pas seul. Les maires des grandes villes – et ceux des villes moyennes comme ceux des villes populaires – sont en colère.
Après les remarques déplacées du ministre de l'Industrie stigmatisant certains maires, selon lui coupables de ne pas assurer la sécurité dans leurs communes, et proposant à leur encontre des sanctions du type de celles prévues par la loi SRU s'agissant du nombre de logements sociaux, s'est tenue à Paris, à l'initiative de l'Association des Maires des Grandes Villes de France, une "Conférence des Villes" sur le thème "Cohésion sociale et urbaine" qui a connu une affluence record jamais égalée : plus de 1300 participants, dont... trois élus de La Seyne : Jocelyne Léon, adjointe à la prévention et la sécurité, Annick Le Gal, conseillère municipale aux jumelages, et moi.
À cette occasion, toutes tendances politiques confondues, nous avons adopté un manifeste intitulé "Les maires montent au créneau" dans lequel nous demandons une action concertée entre l'Etat et les collectivités locales pour lutter contre le délitement du pacte social.
L'initiative était partagée par l'association des maires "Ville et Banlieue", du Conseil d'Administration de laquelle je suis membre, et dont les adhérents, maires de communes, très pauvres pour la plupart, accueillant des quartiers populaires en lourde difficulté, s’inquiètent de la tournure des mesures prévues dans une circulaire du 22 juillet dernier, soumettant leur action locale dans le domaine de la sécurité à l’ingérence d’un contrôle de l’Etat. Cette circulaire vise à faire la différence entre "les Maires qui parlent et les Maires qui agissent" (dixit le ministre de l'Intérieur). Un bilan devait être remis par les Préfets le 15 septembre. La circulaire détaillait les actions municipales à évaluer : nombre de mesures de signalement, point sur la vidéoprotection, mesures de suivi des familles, etc.
Nous avons rappelé que nos concitoyens considèrent, comme c'est d'ailleurs inscrit dans la Loi, que l’Etat est le premier responsable de la sécurité, comme le confirment les résultats d'un sondage TNS Sofres/AMGVF, qui montre que 49 % des Français jugent que c'est la Police Nationale et la Gendarmerie qui peuvent agir le plus efficacement contre l’insécurité, loin devant les municipalités qui sont citées par un peu moins d’un quart des Français (24%).
Mais nous avons aussi affirmé que la lutte contre l'insécurité, préoccupation de tous les élus et de tous les citoyens, nécessite une réponse globale, car « il n’existe pas de lutte efficace contre l’insécurité sans politiques publiques de solidarité, de développement économique, d’insertion et d’emploi, d’habitat et de transports, d’éducation et de culture ».
Le Président de la République, le Gouvernement et leurs relais locaux se trompent en ressassant sur le thème de l'insécurité, le lien délinquance-immigration, et les maires, les quartiers populaires des villes, voire les villes entières, montrés du doigt.
Les Français ne sont pas dupes. Un sondage SOFRES du mois de septembre montre bien que, pour eux, les causes principales de l'insécurité sont de trois ordres : la situation économique et le chômage, les mauvaises conditions de vie dans certains quartiers, la perte de repères familiaux amenant au manque d'autorité des parents. Les problèmes d'intégration des immigrés, comme l'inefficacité de la police et de la justice n'apparaissent que très loin dans les causes citées.
À La Seyne, dans tous les axes déclinés, nous avons montré notre volonté d'efforts. Nous exigeons donc de l'État qu'il fasse de même, comme il sait le faire pour le PRU, pour les autres axes qui concourent à une cohésion urbaine et sociale. Et que les autres collectivités et l'intercommunalité nous accompagnent La Seyne sur ces axes : la police, les quartiers anciens dégradés, l'habitat, la mobilité, l'éducation et la prévention, l'économie et l'emploi.
Le rapport ville pauvres – villes riches en matière de revenu moyen est de 1 à 2, celui de l'impôt "collectable" est le même, celui de l'effort fiscal est de 1 à 9 ! Et le service rendu est exactement l'inverse : de 2 à 1...
La solidarité nationale, régionale, départementale et intercommunale s'impose.
Et, évidemment, je m'associe pleinement à l'ensemble de mes collègues maires pour réclamer haut et fort une sorte de "Grenelle de la sécurité" où l'État, les collectivités et les associations pourront dialoguer pour, enfin, rechercher ensemble les voies pour avancer en matière de prévention et de lutte contre l'insécurité et pour la cohésion urbaine et sociale.
> Le manifeste "Les maires montent au créneau"
> Ma déclinaison locale (La Seyne et l'agglomération) du "manifeste"