« Madame la maire, Nathalie, ne cède pas. Ni pour la friche Altavilla du quartier Peyron, ni pour l'ex-école Eugénie-Cotton, ni pour l'ancien dépôt des bus de Moneiret, ni pour le terrain des anciennes tours A du Germinal, ni pour aucun programme immobilier à vocation sociale. Aménage, fais évoluer, améliore, mais ne cède pas.
« On comprend les inquiétudes des riverains des projets de construction de petites résidences pour reconstituer l'offre locative sociale résultant des démolitions, tant à Berthe qu'au centre-ville, mais on doit entendre aussi les milliers de familles qui sont en attente d'un logement à loyer accessible. Ceux-ci sont de très loin bien plus nombreux parmi tes administrés que ceux qui expriment leurs craintes.
« Et ton devoir est d'agir pour le plus grand nombre.
« Va à la rencontre des futurs voisins des projets. Ils n'ont peut-être pas pris part aux nombreuses réunions publiques qui ont permis de définir ces perspectives de construction et les valider. Expose-leur les raisons et l'historique de ces programmes. Mobilise à tes côtés les institutions publiques qui ont construit avec la Ville les programmes de rénovation urbaine de Berthe et du centre-ville, mais aussi les représentants des habitants des quartiers qui ont participé officiellement aux comités de pilotage des programmes et les ont entérinés au nom de tous.
DES PROJETS RÉSULTANT DE CONCERTATIONS CITOYENNES
« Si tu le souhaites, pour te dédouaner, mobilise-moi pour t'accompagner et assumer. Je te le dois au nom de la continuité républicaine. C'est moi en effet qui ai poursuivi après Arthur Paecht la mise en œuvre du programme de rénovation urbaine de Berthe, qui ai élaboré en 2018-2019 celui du centre ancien que tu déploies aujourd'hui, et qui ai porté les révisions du plan local d'urbanisme de 2011 à 2019. Ce sont là les cadres dans lesquels sont gravés dans le marbre des objectifs urbains toutes ces réalisations indispensables de logements. Ils n'ont fait l'objet d'aucune désapprobation citoyenne car ils ont été très largement concertés avec les gens, les Comités d'intérêt local, les conseils de quartiers, les très officiels "conseils citoyens" et le monde associatif et économique.
« Ces documents officiels sont publics et opposables au sens juridique du terme. Nul n'est censé les ignorer. S'ils ont omis de participer aux débats citoyens qui ont précédé leurs finalisations, nos concitoyens qui s'émeuvent aujourd'hui ont pu et peuvent les consulter pour en connaître la réalité bien modeste et la typologie. En outre, dans le livret de projet 2020-2026 de ton équipe, largement distribué au cours de la campagne électorale, il n'est à aucune page indiqué que tu envisageais de renoncer à tel ou tel de ces programmes. Tu n'as donc pris personne en traître.
SANS LOGEMENT DÉCENT, TOUS LES AUTRES DROITS RESTENT INACCESSIBLES
« Enfin, comme c'est prévu par la loi, dans chaque secteur concerné par les projets de constructions qui soulèvent des émois, fonctionne un "conseil de quartier" animé par un de tes adjoints assisté de fonctionnaires compétents en animation et médiation. Active la démocratie locale si elle s'est un peu assoupie. Tu verras, l'échange, si tu ne convaincs pas tout le monde, permettra au moins de rétablir des éléments objectifs sur les enjeux. À défaut, tu courras le risque que des démagogues, dont certains issus de ta propre majorité, s'emploient à fracturer un peu plus la société seynoise déjà bien fragilisée par les inégalités socio-économiques, culturelles et territoriales. Et ce sont ceux qui détestent la démocratie et la république qui en récolteront les fruits.
« Le 5 juillet 2020, le jour même de ton élection aux fonctions de maire, Laurent Desmard, président national de la Fondation Abbé-Pierre, livrait quelques écrits que je te propose de relire : ”Sans un logement digne et décent, tous les autres droits, à l’alimentation, à la santé, à l’éducation, à la sécurité… restent inaccessibles. L’abbé Pierre avant nous le répétait sans cesse. Depuis plus de trente ans, tous nos rapports dénoncent la pénurie et le coût exorbitant du logement. Et évidement les conséquences catastrophiques de la crise touchent en priorité les personnes et les ménages les plus modestes. Un peu partout sur le territoire, on voit revenir le fléau de la faim pour des adultes, des jeunes, des enfants. Pour beaucoup d’enfants, la cantine assurait le seul repas équilibré de la journée. Partout la distribution alimentaire a dû être multipliée dans les quartiers, dans les résidences universitaires, dans les squats ou dans les bidonvilles où même l’eau fait défaut. Comment vivre à cinq dans 25 m2 ? Comment faire ses devoirs quand la famille ne partage qu’une pièce à tout faire ? Comment laisser un peu de repos à celle ou celui qui vient de sauver des vies rentre à la maison dans un logement surpeuplé ? Comment, comment, comment ? Il nous faudra maintenant répondre à toutes ces questions…“
« Dans ta boîte à outils de première magistrate, patiemment garnie par tes prédécesseurs, tu disposes de quelques instruments pour apporter certaines réponses. Ces projets immobiliers sociaux, partagés avec tous les partenaires institutionnels de la Ville et validés par les citoyens, en font partie. »