C'est la loi. La date du 19 mars a été choisie en 2012 par la représentation du peuple français au Parlement pour être la « journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc ».
Une autre commémoration a lieu le 5 décembre, autre journée officielle dédiée à l'hommage aux morts de la guerre d'Algérie, fixée en 2003 par le président Chirac le jour de l'inauguration du monument à la mémoire de tous les soldats morts en Afrique française du nord.
Il est vrai qu'il n'y a pas consensus. Mais faut-il, comme le font la municipalité seynoise et l'extrême-droite, mettre de l'huile sur le feu ?
TROIS DATES COMMÉMORATIVES QUI FONT DÉBAT
La querelle ne date pas d'hier. Chacun doit comprendre que le 19 mars ait été choisi par l'État. C'est le jour anniversaire du cessez-le-feu de 1962, suite aux accords d'Évian signés la veille entre la France et le Front de libération nationale de l'Algérie. C'était aussi un pas dans un processus vers l'indépendance pour les Algériens qui, comme tout peuple, ont droit à disposer d'eux-mêmes. On a également un devoir de mémoire envers ceux qui sont tombés au combat comme pour les soldats qui ont survécu. Et chacun doit de même comprendre que, pour les harkis, les pieds-noirs, et leurs descendants, ce cessez-le-feu est symbole du début d'une trop longue période, jamais refermée, de déchirement, de souffrances et d'abandon. Ceux-là, pour beaucoup, préfèrent le 5 décembre. Et une autre journée, le 25 septembre, a été dédiée par décret en 2003 à l'hommage aux harkis et autres membres des formations supplétives de l'armée française.
LES PLAIES SONT ÉTERNELLES, À L'HISTOIRE DE FAIRE SON ŒUVRE
L'important n'est-il pas, même si les plaies des uns et des autres ne se refermeront jamais, que, peu à peu, la connaissance des faits et de l'histoire, la reconnaissance du caractère de guerre de ce conflit, avec ses exactions et ses abominations dans les deux camps, pour les combattants comme pour les civils, permettent d'objectiver ces temps de l'histoire de la France et de l'Algérie, comme d'ailleurs de toutes nos anciennes colonies ?
Moi qui ne suis pas toujours tendre avec le Chef de l'État et son gouvernement, je dois saluer l'initiative de confier à l'historien Benjamin Stora la mission de produire un rapport sur « les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d'Algérie ». Il a été remis à M. Macron il y a deux mois. Ceux qui s'arcboutent sur des positions tranchées seraient bien inspirés d'en prendre connaissance. Il est accessible en ligne sur le site Internet de l'État « Vie publique ».
POURQUOI SOUFFLER SUR LES BRAISES ?
Avant même que l'État ait fixé ces dates, depuis mon arrivée au conseil municipal en 1993, je me suis toujours efforcé d'être présent aux diverses cérémonies, qu'elles aient été organisées par la commune ou par des associations d'anciens combattants, notamment la FNACA. J'ai continué au cours de mes mandats de maire.
Et je pensé qu'il était dans l'ordre des choses qu'il en soit durablement ainsi. Je me suis trompé. En qualifiant le 19 mars de « tâche sur le drapeau français », le premier adjoint, associant la municipalité à son propos, joint sa voix à l'extrême-droite qui, elle, parle de « commémoration de la honte ». La majorité municipale ne sera pas présente à la cérémonie de ce jour. Et ce ne sera pas parce que la pandémie de coronavirus interdit les rassemblements.
Quel but poursuit-on en ravivant la douleur et en plaçant des obstacles sur la longue route vers la concorde et le respect mutuel sur lequel doivent cheminer nos concitoyens ?