C'est une réalité. Si la démographie seynoise continue de progresser à raison d'un pour cent chaque année depuis une décennie, la population d'enfants ne cesse de décroître. Et de façon fort disparate sur le territoire de notre commune. Des quartiers vieillissent plus et plus vite que d'autres, et c'est une tendance durable constatée depuis près de vingt ans.
Du coup, certaines écoles se vident inexorablement. Au quartier La Maurelle-Bellevue-Pont de Fabre, dans un rayon de 300 mètres autour de l'établissement "Intermarché", il existe trois écoles maternelles : l'une, Antoine de Saint-Exupéry, devrait perdre une classe à la rentrée 2017, une autre, Marie-Mauron, n'en a plus que trois, et la dernière, Romain-Rolland, faute d'un nombre suffisant d'élèves, n'héberge plus que deux classes au lieu des cinq qui y existaient jadis.
A contrario, à Berthe, quartier classé en site d'éducation prioritaire, là où les nombres d'écoliers par classe gagneraient à être minorés pour soutenir les efforts des enseignants vers l'égalité des chances des enfants, les effectifs demeurent conséquents, et même plus importants pour certaines écoles qu'ils ne le sont dans certains établissements du sud de la ville.
UNE RÉVISION DICTÉE PAR LA DÉMOGRAPHIE ÉCOLIÈRE ET L'AUSTÉRITÉ
De la même manière que le Département, en charge des bâtiments accueillant les collégiens, doit rééquilibrer la répartition des élèves entre les quatre collèges publics de La Seyne, la Ville devrait ainsi être contrainte de réviser ses secteurs scolaires primaires.
C'est une démarche délicate car elle bouscule des habitudes, celles des enfants, celles de leurs familles, et celles de l'ensemble des personnels qui travaillent pour les élèves. Peu d'élus locaux se risquent à l'entreprendre et, si l'État ne réduisait pas drastiquement les dotations qu'il alloue aux communes, celles-ci pourraient continuer à supporter des frais de fonctionnement significatifs pour maintenir ouverts des établissements, même s'ils abritent peu d'élèves. On admettra sûrement avec moi qu'il devient, en période d'austérité subie, incontournable que l'argent des contribuables serve à couvrir les coûts de l'éclairage, du chauffage, des fluides, de l'entretien et du ménage d'une seule école que ceux de deux écoles de deux et trois classes.
EN PROFITER POUR RÉDUIRE LES INÉGALITÉS ENTRE ÉCOLES
Alors, d'un mal pourquoi ne pas tenter de faire un bien ? À devoir revisiter la carte scolaire, nous voudrions en profiter pour tenter d'améliorer certaines conditions de fonctionnement et réparer des anomalies historiques, sous réserve que la majorité des parties prenantes en soient d'accord.
N'est-il pas souhaitable que les enfants de deux écoles, la maternelle Amable-Mabily et l'élémentaire Jules-Verne, ne soient plus hébergés dans des locaux préfabriqués vétustes, même s'ils sont bien entretenus, datant de 1947, tandis que la plus récente des écoles seynoises, Jacques-Derrida, à quelques centaines de mètres, ne fait pas le plein ?
N’est-il pas plus convenable que ces écoliers, dont certains n'ont que trois ans, ne soient plus obligés de marcher un kilomètre en ville tous les jours pour se rendre à un restaurant scolaire dont leurs écoles sont dépourvues ?
N’est-il pas raisonnable de chercher à améliorer les trajets du domicile à l'école, de permettre aux familles de disposer dans l'établissement même qui accueille leurs enfants d'un centre de loisirs périscolaire les prenant en charge avant et après l'école mais également le mercredi, ou aux enseignants et aux élèves de profiter d'un gymnase scolaire qui fait défaut dans leur établissement actuel ?
N'est-il pas opportun de mobiliser une part de l'estimation de quelque 80 à 100.000 euros de coûts de fonctionnement qui seront économisés chaque année pour mieux soutenir les enseignants par de petits équipements utiles ou l'augmentation des dotations communales au fonctionnement des classes, des coopératives scolaires ou des associations complémentaires de l'enseignement public ?
L'ÉTAT ÉDUCATIF DOIT SE MONTRER D'AUTANT PLUS BIENVEILLANT
Bien sûr, il ne faudrait pas que l'Éducation nationale profite des modifications envisagées — mais aucunement décidées — pour réduire le nombre global de postes d'enseignants affectés dans les écoles seynoises. Ni pour la rentrée 2017, ni pour les suivantes. Nous avons l'engagement des services académiques que ce ne sera pas le cas et même que des efforts et de la souplesse seront consentis pour accompagner la mutation sectorielle. Nous pourrons même développer la scolarisation des tout-petits et prévenir des fermetures possibles de postes dans certaines écoles maternelles. Et, comme toujours, si des décisions nationales devaient contrecarrer la promesse départementale de bienveillance, nous serions aux côtés des équipes d'enseignants, de leurs syndicats et des associations de parents d'élèves pour peser contre des décisions d'inacceptable rigueur.
DES PEURS ET DES COLÈRES BIEN COMPRÉHENSIBLES
J'aurais naturellement préféré annoncer, par exemple, la réalisation d'un groupe scolaire neuf en lieu et place des préfabriqués septuagénaires des écoles Amable-Mabily et Jules-Verne, telle que prévue il y a plus de vingt ans mais jamais réalisée. Mais il faut être lucide. Comment entreprendre aujourd'hui, sans aide extérieure, un tel projet de 5 à 8 millions d'euros alors que la Nation a tellement diminué son appui financier à la commune que, de 32 millions d'euros qui pouvaient être dédiés aux investissements municipaux en 2008, nous ne disposons plus aujourd'hui que de 10 à 12 millions annuels, dont la moitié doit être consacrée, par contrat établi en 2006 avec l'État, à la rénovation des quartiers prioritaires ? Nous sommes condamnés à faire avec les moyens du bord.
Enseignant public retraité depuis peu, militant de la cause éducative depuis toujours, syndiqué sans discontinuer depuis ma formation initiale, veuf d'une enseignante, père de deux enfants (dont une professeure), et désormais grand-père, je pense savoir mesurer et comprendre les inquiétudes de tous : enfants, parents, personnels enseignants et non enseignants.
UNE RESPONSABILITÉ À ASSUMER POUR L'ÉCOLE RÉPUBLICAINE
Mais j'en appelle à la mémoire de chacun. Lorsque nous avons dû décider, il y a quelques années, pour les mêmes raisons qu'aujourd'hui, de fermer la vieille école préfabriquée Jean-Baptiste-Coste pour l'installer, pour partie à Ernest-Renan et pour partie à Jean-Baptiste-Martini, les mêmes peurs et colères légitimes se sont exprimées. Et les choses se sont pourtant passées au mieux.
Les écoliers apprennent désormais dans des écoles "en dur", avec des espaces de restauration et d'activités périscolaires sur site, et leurs arrivées ont conforté les effectifs déclinants, permettant d'éviter des disparitions de postes de professeurs, même si, bien sûr, les projets des équipes ont dû être un peu bousculés et si cela a conduit à la disparition d'une fonction de direction pourtant indispensable à l'animation du projet d'école, à l'accompagnement des maîtres et au lien avec les familles.
NE PAS S'AFFOLER AVANT MÊME QUE LA CONCERTATION NE SOIT COMMENCÉE
Dans le contexte difficile dont souffre l'école de la République, même si le gouvernement semble tenir son engagement de recréer les postes d'enseignants supprimés par son prédécesseur, tâchons tous ensemble, malgré les vicissitudes des temps de disette budgétaire imposée, de gérer au plus juste pour soutenir l'offre éducative publique communale. Avec le concours de chaque acteur de l'éducation, à sa place respective et en coopération, on peut y arriver.
Mais encore faut-il qu'il y ait une volonté partagée. C'est pourquoi nous avons commencé à rencontrer les autorités de l'Éducation nationale qui semblent favorables, certains syndicats d'enseignants qui ne le sont pas du tout et d'autres qui ont un avis mitigé, des parents qui sont inquiets et globalement peu satisfaits. Et nous avons même reçu des courriers d'enfants, dont certains ne sont pas d'accord et d'autres le sont. D'autres rencontres sont prévues, notamment avec nos personnels communaux qui travaillent pour l'éducation, leurs syndicats, les associations périscolaires et les conseils de quartiers. Et, après avoir expliqué tranquillement les propositions de nos services et entendu tous les avis, nous proposerons un choix que nous soumettrons au conseil municipal qui décidera en conscience, ainsi que la Loi lui fait obligation.
Il ne sert à rien de s'affoler ou, pire, d'affoler les gens comme l'ont fait certains sur le fondement de rumeurs porteuses d'éléments incomplets, voire de s'énerver, avant même que les pistes d'amélioration de l'existant n'aient été paisiblement et intégralement exposées pour être discutées.
À La Seyne, nous sommes assez fiers de nos démarches de démocratie participative auxquelles nous consacrons beaucoup d'énergie et de moyens. Pour la sectorisation scolaire, il n'y a aucune raison qu'il en soit autrement.