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Mon courriel à Jean-Sébastien Vialatte, à propos de la proposition de loi "Carle"...
"Monsieur le député-maire,
Cher collègue,
Le 25 janvier 1910, Jaurès, dans un célèbre discours devant les députés opposait l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905 à la demande du parti clérical d'instituer la "répartition proportionnelle scolaire", c'est à dire le financement de l'enseignement privé par les finances publiques selon le nombre d'élèves.
Constants dans leur fidélité à ce principe laïque, les élus républicains se sont opposés aux lois Marie, Barangé, Debré, Pompidou, Guermeur, qui ont installé cette répartition proportionnelle, que certains nomment aujourd'hui "parité public/privé".
Le concept de « parité » entre école publique ou privée n’a aucun fondement juridique.
Exclusivement concept politique visant à revenir sur la séparation légale de l'Église et de l'État, il participe, de fait, au démantèlement du service public qui, seul, supporte toutes les contraintes afférentes.
Le privé, lui, revendique des subsides publics au nom de la « parité » et récuse au nom de sa « liberté » les obligations correspondantes.
Aujourd'hui, 28 septembre 2009, l'Assemblée Nationale va délibérer sur un projet de loi, dite "Loi Carle", qui constitue un pas nouveau dans la destruction du service public de l’enseignement.
Elle constitue une menace pour l'existence des écoles des communes rurales.
Elle risque aussi de provoquer une fuite discriminatoire de la banlieue et des quartiers populaires vers la ville. Notre collègue Pierre Cardo, député et, jusqu'à ces derniers temps, maire de Chanteloup-les-Vignes, membre du même groupe que vous à l'Assemblée Nationale, a fort bien décrit ce risque qui ne manquera pas de fragiliser notre école publique, notamment, pour ce qui nous concerne, dans nos sites urbains populaires, tel notre quartier Berthe à La Seyne auquel, vous comme moi sommes particulièrement attachés.
Certains disent que « Nanterre paiera pour Neuilly »...
Cette loi, en substituant au rapport école-commune, né des lois Ferry, une relation usager-commune, sur fond libéral, est un nouveau pas vers la privatisation de l'école laïque par l’immixtion du "chèque éducation".
Les principes constitutionnels fondamentaux d’organisation du service public sont battus en brèche par l’inscription, pour la première fois, dans la loi, d’un principe de « parité » entre l’institution "Ecole publique laïque" et une entreprise privée d’éducation à caractère confessionnel.
Jamais, non plus, le législateur n’a considéré que la « liberté d’enseignement » implique un financement public obligatoire.
C’est justement au nom de ce principe de « liberté d’enseignement » que les tenants de cette loi récusent les contraintes d’accord préalable de la commune. Ces obligations ne sont imposables qu’à la seule école publique qui assume, elle, les obligations de service public : égalité devant l’accueil, continuité, gratuité et laïcité.
Le financement des élèves du public hors commune, sous condition et accord a priori, résulte de l’obligation constitutionnelle d’organiser le service public laïque d’éducation en tout lieu.
Je vous appelle en conséquence à voter NON, aujourd'hui, lors de la présentation de ce projet à l'assemblée nationale.
Veuillez agréer, Monsieur le député-maire et Cher collègue, l'expression de mes sentiments cordiaux, républicains et laïques."
Marc Vuillemot
Maire de La Seyne-sur-Mer