Annie Martin-Ghibaudo est notre pugnace maire-adjointe chargée de la santé. C'est elle qui représente La Seyne à ce qui est supposé être l'instance dirigeante du Centre Hospitalier Intercommunal de Toulon - La Seyne (CHITS), qui gère notre hôpital George-Sand, le fameux conseil de surveillance.
J'écris "supposé" car, bien qu'il s'agisse d'un service public de proximité, les élus locaux, normalement porteurs de la parole des usagers, n'y représentent que la portion congrue. Jugez plutôt : deux élus de Toulon, une de La Seyne, et deux du conseil général du Var, soit cinq personnes contre deux fois plus d'autres membres, tous professionnels de l'établissement ou personnalités qualifiées. En clair, ce sont les gens du métier qui en font à leur guise. Curieuse vision pour un service de la République...
Il faut dire que, des usagers, on semble s'en moquer depuis la réforme de l'administration des hôpitaux, puisque, ayant souvent été présent en 2012 dans les lieux, j'ai plus d'une fois entendu parler de... "clientèle", s'agissant de patients. Et j'enrage de voir que, sur le sujet, le changement, ça ne semble pas être pour maintenant.
Pour autant, notre représentante au CHITS ne désarme jamais quant au retour à l'offre de soins qui est due aux 200.000 habitants de l'Ouest Var et qui a leur été ravie par ces professionnels qui n'en font qu'à leur tête, et pour leur petit confort : "Ils [les obstétriciens] n'ont pas envie de retourner à La Seyne", dixit l'un des médecins membres du conseil de surveillance ! Ah bon, dans le Var, les personnels de la fonction publique font comme ils veulent ? Le tout avec la complicité de la ministre de la santé du gouvernement Fillon et de son sbire local, le directeur de l'agence régionale de la santé, que, malheureusement, leurs successeurs ne désavouent pas.
Lors de la réunion du conseil de surveillance qui s'est tenue en décembre dernier, Annie Martin-Ghibaudo, seule contre tous, est donc une nouvelle fois courageusement "montée au créneau" pour réclamer la réouverture du dossier de la maternité "dans les trois semaines", au regard des éléments nouveaux que la ministre de la santé venait d'apporter avec ses déclarations sur les déserts médicaux.
Et là, tenez-vous bien, si on avait eu besoin de confirmation qu'on prend les usagers pour des clients, les échanges, retranscrits dans le très officiel procès-verbal de la réunion, qui valent leur pesant d'or, sont éloquents :
"Quand je ne suis pas content d'un service, quel qu'il soit, je m'y rends une fois mais pas deux" (H. Falco, président)
"Nous sommes sur un rythme de 3000 [accouchements] (...) Cette décision [la fermeture] a été plébiscitée par les mamans (...) Cela veut dire qu'il y a une certaine satisfaction" (M. Perrot, directeur)
On croit rêver ! Vite, chéri, fais-moi un enfant, j'ai tellement hâte d'aller accoucher à Sainte-Musse !
Ça pourrait prêter à sourire si ces gens-là ne maniaient pas le mensonge pour vanter, tels de mauvais colporteurs de marché forain, la qualité de leur produit. Par omission, certes, mais mensonge tout de même.
D'abord, il faudra attendre un an de fonctionnement, fin mars prochain, pour confirmer le nombre de 3000 naissances à Toulon. Mais il est plus que plausible, en effet, ce qui fera de la maternité de Toulon, comme nous l'avions prévu, une "usine à bébés" inhumaine, fait confirmé par les témoignages de parturientes que l'on contraint à rentrer chez elles deux jours après l'accouchement, ou que l'on installe dans d'autres services, faute d'un nombre suffisant de lits.
Ensuite, le "produit" n'est sûrement pas si bon que ça, car, lorsque ces camelots de pacotille expliquent que "2500 personnes s'adressaient au CHITS [1500 à La Seyne et 1000 à Toulon] pour accoucher avant le déménagement et aujourd'hui 3000", ils oublient perfidement de signaler que, concomitamment, on a fermé la maternité privée toulonnaise Saint-Michel où se déroulaient 750 naissances par an...
Faites les comptes... il devrait y avoir au moins 3250 naissances annuelles au nouvel hôpital de Sainte-Musse. Comme la courbe des naissances ne s'infléchit pas sur notre territoire, on devrait même en comptabiliser encore plus. Et ça, ça veut dire qu'il y a plusieurs centaines de mamans qui ont peur de problèmes pendant le trajet qui dure parfois plus d'une heure et s'orientent vers les hôpitaux des Bouches-du-Rhône, et qui refusent d'accoucher dans un service déshumanisé par son énormité. Les chiffres des naissances de l'hôpital de La Ciotat le confirment.
L'argument de vente de leur quincaille se retourne contre les bonimenteurs... mais ça ne fait pas sourire notre population désabusée par ces bouracans.
Moi, en tous cas, je ne désarme pas.