Comme chacun le sait, notre communauté s’apprête à voter son Plan Local pour l’Habitat (PLH).
Enjeu majeur pour l’avenir de notre territoire, ce plan vise ainsi à définir les axes fondamentaux de notre politique dans le domaine du logement pour les années à venir. Au-delà de la matière proprement dite, il vient préciser et renforcer en termes de moyens les options de l’agglomération pour son développement économique. Il ne peut en effet y avoir de développement économique sans organiser et planifier le logement, pas plus d’ailleurs que sans organisation ni planification des transports publics.
Nous sommes tous convaincus que si l’un de ces deux derniers piliers venait à être défaillant, c’est bien l’ensemble de l’édifice qui s’écroulerait. Or, je n’ai pas l’impression que l’ambition que nous affichons pour le développement économique soit la même dans le domaine du logement.
C’est cette préoccupation majeure qui m’amène aujourd’hui à prendre cette initiative pour vous interpeller par écrit et voir avec vous si vous partagez, ou pas, mes inquiétudes.
Il est certain que nos services vont démontrer qu’il y a, contre toute attente, une réelle ambition. Certes. Mais quelle est-elle, en vérité ?
> Est-ce le maintien au moins à niveau du parc alors qu’il y a un véritable déficit qui s’accroît d’année en année ? Est-ce ambitieux que de n’envisager la résorption du déficit que sur deux ou trois décennies, alors que c’est maintenant que la question se pose de manière criante ? Quelle est la place laissée à nos concitoyens les plus démunis ou, tout au moins, à ceux qui, malgré leur labeur, ne parviennent pas à se loger dignement et durablement (près de 8 sur 10 des Varois sont aujourd'hui éligibles au logement social) ?
> Il a été dit en commission de l’habitat que l’écart entre les plus riches et les plus pauvres tend à être multiplié par 9. Justement... allons-nous enfin nous décider à utiliser l’ensemble des outils légaux, quitte à être innovants ou expérimentaux, comme nous sommes capables de l’être dans le domaine de la mutualisation des services, pour maîtriser et réguler le marché du logement ?
> Quelle est notre politique foncière (utilisation rationnelle du droit de préemption, équilibre des habitats sur l’ensemble de notre territoire) ?
> Notre objectif est-il de faire de notre agglomération une vaste résidence de personnes aisées et/ou âgées ? La force de notre territoire ne réside-t-elle que dans la construction d’Etablissements d'Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes et de locaux commerciaux ?
> Comment traitons-nous la strate de population des 29/39 ans dont on nous dit qu’elle a le plus de mal à se fixer sur notre territoire, alors qu’elle en est la force vive d’un point de vue économique ?
> Pourquoi ne respectons-nous pas la Loi SRU (Solidarité Renouvellement Urbain), nous empêchant par là même d'atteindre une véritable mixité sociale ? Pouvons-nous nous satisfaire du paiement d’une amende par celles de nos communes qui ne respectent pas les règles ?
> Pouvons-nous accepter que le fruit de cette amende ne soit pas reversé à celles des communes qui, non seulement respectent la loi (ce qui me paraît être la moindre des choses dans notre République), mais se voient paradoxalement pénalisées sur leur propre développement par les effets conjugués de la paupérisation, du poids de l’aide sociale, du chômage, du mal logement ?
Mes collègues membres des instances où s'élabore notre PLH me confirment que toutes ces questions de fond ne sont pas traitées. Le travail fait en commission est insuffisant en ce sens qu’il ne prend pas en compte la réalité de l’enjeu et les questions quotidiennes.
Pour aller jusqu’au bout, je ne suis pas convaincu que la gestion du contingent préfectoral par les communes ou l’agglomération soit une véritable solution. Au contraire, c’est, à mon sens, non seulement une vraie/fausse réponse, mais elle vient en outre marquer une fois encore le désengagement de l‘Etat sur des questions cruciales, ne serait-ce qu’en renvoyant vers nous la responsabilité d’une attribution impartiale.
Je ne suis pas non plus convaincu, et cela me pose un autre problème, par la prise en charge par l’agglomération, c’est-à-dire sur des deniers publics, la couverture du risque locatif... pour du logement purement privé, alors même que, par ailleurs, nous peinons à soutenir le programme de réhabilitations du parc locatif d'un de nos bailleurs publics, pourtant inscrit dans le Plan de Relance du gouvernement.
Vous le voyez, notre Plan Local de l’Habitat, tel qu’il est présenté ou envisagé, ne peut me convenir en tant que maire d'une de celles de nos communes qui accomplissent un effort en ce domaine.
Mais, au-delà, c’est notre responsabilité collective de membres de notre exécutif qui est engagée.
C’est notre responsabilité en tant que décideurs de l’avenir notre territoire qui est en question. Si gouverner c’est prévoir, je crains que, en l'espèce, la prévision ne soit pas notre point fort.
Je souhaiterais donc, mes chers collègues, recueillir votre sentiment sur ces différentes questions, sachant qu’il est temps d’amender notre PLH. En l'état, ce qui nous est aujourd'hui soumis ne me semble pas pouvoir recueillir l'assentiment de la majorité des élus de ma commune et, probablement, d'un certain nombre d'autres collègues, quelles que soient nos sensibilités respectives.
Je formule le vœu de ne pas être contraint d'émettre un vote divergent des vôtres, fragilisant notre démarche collective et sincère qui, jusqu'à ce jour, donne force et crédit à notre intercommunalité.
C'est pourquoi j'en appelle avec sincérité à notre esprit de solidarité envers nos concitoyens que nous savons développer, ensemble, dans d'autres domaines.
Veuillez agréer, mes chers collègues, l'expression de mes sentiments coopératifs et loyaux.